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Depuis plusieurs années, Amsterdam, qui a accueilli fin novembre les Epica Awards, attire les grandes agences internationales à la recherche d'un point d'ancrage en Europe. Quels atouts ont permis à la capitale néerlandaise de s'imposer comme un haut lieu de la créativité européenne?

La dernière édition des Epica Awards s'est tenue à Amsterdam. Ce n'est pas un hasard, tant la capitale néerlandaise est depuis de longues années un «spot» de la création publicitaire mondiale. Amsterdam fourmille d'agences de publicité. Outre les locales comme Lemz ou We Are Pi, la ville héberge au fil de ses canaux des agences internationales comme Wieden + Kennedy, 72 and Sunny, 180 ou DDB & Tribal, qui ont choisi cette ville comme base européenne plutôt que Londres ou Paris.

«Amsterdam est un endroit unique pour les agences créatives internationales parce que c'est une ville très multiculturelle. C'est un véritable hub créatif de talents», explique d'emblée le Britannique Nic Owen, directeur général de 72 and Sunny Amsterdam. Ce que confirme le Français Alexandre Meyer, senior creative & strategic planner qui travaille en freelance dans la capitale hollandaise: «Amsterdam est un village global créatif.» Et ce n'est pas près de s'arrêter, selon Phil Linturn, chief operating officer de la société de production Glassworks Amsterdam, qui voit «de plus en plus d'agences et de maisons de production qui ouvrent en ville».

Amsterdam, berceau de la création publicitaire en Europe? C'est ce que pense Alexandre Meyer, qui rappelle que la ville «occupe historiquement une place commerciale importante au cœur de l'Europe. C'est dans la culture du pays d'être à la croisée des chemins». Grâce à sa bonne localisation, Amsterdam attire donc des talents de tous pays. «Dans les agences, tout le monde parle anglais», assure-t-il.

Chez 180, les 65 salariés sont de 17 nationalités différentes. Chez DDB & Tribal, les équipes sont composées à 50% de locaux et à 50% d'internationaux. L'agence 72 and Sunny Amsterdam regroupe 21 nationalités réparties sur 75 personnes. «Cela nous permet de produire des campagnes en six langues différentes: anglais, néerlandais, espagnol, français, allemand et russe. Si nous avons besoin de traduire et d'adapter nos campagnes localement, nous avons une équipe intégrée de traducteurs», explique Nic Owen.


Equipes et clients internationaux


Ce mix des nationalités au sein des équipes se retrouve également au niveau des clients. Les agences internationales travaillent, comme leurs noms l'indiquent, pour l'international (d'ailleurs, DDB & Tribal s'est installée près de l'aéroport d'Amsterdam-Schiphol afin d'être plus facilement accessible pour ses clients) mais les agences hollandaises, qui travaillaient à l'origine pour le marché local, se tournent de plus en plus vers les budgets internationaux.

Une évolution que Rogier Vijverberg, directeur de la création de l'agence néerlandaise Super Heroes, explique tout simplement: «Notre marché domestique est vraiment petit. Quand nous avons commencé l'aventure de Super Heroes, nous avons tout de suite cherché à être une agence néerlandaise internationale et nous avons réussi à attirer des clients globaux. Notre défi est maintenant de rester proche de nos racines hollandaises et de continuer à travailler pour des marques locales.» Cette collaboration avec des marques mondiales est notamment facilitée par la présence de groupes comme Heineken, Philips ou KLM à Amsterdam.

Face à ce paysage publicitaire divisé entre agences locales et internationales, difficile de décrire en quelques mots la publicité à la sauce néerlandaise. «La publicité hollandaise n'est pas un monolithe. Comment mettre dans une seule case le travail étonnant de Wieden + Kennedy pour Nike ou Heineken, celui de 72 and Sunny pour Google, celui de DDB & Tribal pour KLM et Adidas, celui de 180 pour Playstation ou celui de Lemz pour Terre des hommes (Sweetie)? C'est impossible», explique Wesley Ter Haar, fondateur et COO de la société de production Media Monks.
Toutefois, Phil Linturn (COO de Glassworks) et Ivo Roefs (co-COO de DDB & Tribal) mettent en avant le côté humoristique des campagnes locales et citent en exemple le film «Muis» pour l'assureur Centraal Beheer (Glassworks) ou l'opération «Self-driving car» pour Centraal Beheer Achmea (DDB & Tribal). Seul bémol, Phil Linturn regrette un manque d'intérêt des marques, agences et sociétés de production pour des travaux plus craftés. «Le marché local aurait à apprendre d'autres pays lorsqu'il faut repousser les frontières de ce que les clients demandent en termes de craft.»


Des agences directes et digitales


Si la diversité du travail des agences basées à Amsterdam interdit tout résumé simpliste, agences locales comme internationales admettent toutefois avoir deux points communs. Le premier, c'est l'utilisation des innovations technologiques pour proposer des publicités toujours plus créatives. «Nous avons un studio de montage et un labo technique pour que l'on puisse manipuler, jouer, tester. Nous n'avons pas peur des nouvelles technologies et avons adopté le modèle "art, copy and code": nous sommes toujours un endroit où les idées sont reines, mais la technologie est partie intégrante de nos process, de la stratégie à la création puis à la production», continue Nic Owen, qui a notamment inventé le Coffee Break, qui programme au hasard des pauses entre collègues autour d'un café dans leurs agendas.

Autre spécificité des agences hollandaises: leur côté très direct autant dans les rapports avec les marques que dans les publicités. «Quand elles pitchent un client, les agences lui disent combien ça coûtera, combien ça rapportera. Elles présentent des cas de manière concrète et pragmatique, car leur but n'est pas de faire de la créativité juste pour être créatif, mais surtout pour être efficace. Les cas sont plus concrets et plus axés clients», s'enthousiasme Alexandre Meyer. Cette année, l'exemple le plus parlant est celui de «Sweetie», qui a certes gagné beaucoup de prix, mais qui a surtout permis l'arrestation d'un pédophile australien.

 

(encadré + photo sweetie si possible)


Le succès de «Sweetie»


Si la campagne britannique «Sorry, I spent it on myself» réalisée par Adam & Eve DDB pour Harvey Nichols a été la plus récompensée cette année, l'opération néerlandaise «Sweetie», réalisée par l'agence Lemz pour l'association Terre des hommes, a également remporté de nombreux prix, dont le Grand Prix for Good aux Cannes Lions. D'autres opérations hollandaises ont été remarquées dans les festivals internationaux, comme «Raw for the Oceans» de G-Star (réalisé par FHV BBDO Amsterdam) ou «Google Night Walk in Marseille» pour Google (conçu par 72 and Sunny Amsterdam et produit par Media Monks).

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