Agences
Grégory Pascal, CEO de SensioGrey et président de l’AACC Digital, revient sur les principales évolutions du marché des agences digitales et appelle à un changement de mode de collaboration.

Comment évolue le marché des agences digitales ?

Il est très dynamique. Les deux tiers de nos membres sont très satisfaits de 2018 et optimistes pour 2019 : 80 % annoncent qu’ils vont recruter cette année. Autre signal intéressant, l’AACC Digital est la délégation qui a enregistré le plus grand nombre d’adhésions en 2018.

Du côté des pratiques, on voit ces derniers mois apparaître de nouvelles configurations d’appels d’offres où les concurrents de la veille deviennent les partenaires du lendemain. Le nouveau modèle est celui de la désintermédiation. L’enjeu va être la convergence des métiers, comme l’ont fait les sociétés de conseil en intégrant la technologie et la création. Il faut que les ESN – les entreprises de services du numérique – et les gros acteurs de la tech aillent à leur tour vers le conseil, l’UX, etc.

Faut-il entendre à travers ces nouvelles configurations d’appels d’offres que les annonceurs ont intégré les changements qui s’opèrent ?

La convergence va donner naissance à un marché gigantesque qui nécessitera une parfaite connaissance des acteurs. Les annonceurs ont perçu les changements, mais ils doivent intégrer cette nouvelle culture de la coopération et de la collaboration. Laquelle leur permettra de repenser leur façon de pitcher. Nous sommes encore trop souvent dans une configuration où l’annonceur pose une question et nous juge sur notre réponse. Or nous devons entrer dans une logique de cocréation de la réponse. Les pitchs devraient donc avoir pour objectif de voir si nous sommes capables de travailler ensemble. Ce qui exige une plus forte implication des annonceurs.

En pratique, comment faites-vous passer le message ?

Nous essayons via l’AACC et en partenariat avec l’UDA d’évangéliser les annonceurs, de leur expliquer comment construire de nouveaux briefs, comment comprendre les métiers et les contraintes des agences. Il faut instaurer une relation de long terme alors que le sans-engagement et le fonctionnement au projet sont devenus le standard. C’est dommage, car pour être efficace et pertinent, il faut bien se connaître et il faut du temps. Paradoxalement, les exemples de collaboration durable et performante existent et les annonceurs semblent avoir conscience de la situation, mais continuent à vouloir briefer, briefer et encore briefer !

Comment expliquez-vous cela ?

On voit un fort turn-over dans les directions marketing chez l’annonceur. Beaucoup changent tous les trois ans, c’est un signal important. Il devient ainsi difficile d’avoir une vision à long terme, et de construire durablement sa marque. Je ne remets pas en cause le côté bénéfique de la mise en compétition, ni le fait qu’il est parfois utile de changer quelqu’un dans la boucle. Je défends simplement l’idée que presser les gens en permanence est contre-productif. Les agences consacrent environ 10 % de leur chiffre d’affaires à la recherche de nouveaux clients et aux compétitions, ce qui revient à faire travailler gratuitement les gens. L’impact est colossal. 

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