Dans son livre Very bad buzz, Marie Muzard passe à la loupe les phénomènes de mauvaises réputations qui affectent les entreprises sur les réseaux sociaux. Amaury de Rochegonde @derochegonde

Les vagues de critiques sur le web ont été deux fois plus nombreuses en 2014 qu'en 2013. Pour Marie Muzard, conseil en «communication sensible on et offline» et auteur de Very bad buzz, à paraître le 19 février chez Eyrolles, c'est même aujourd'hui le risque stratégique numéro un dans les entreprises. «Le bad buzz commence à être pris en compte dans les algorithmes de trading et déclenche automatiquement des ordres de vente», écrit-elle.

Pourtant, 70% des dirigeants reconnaissent qu’ils ne savent pas gérer une crise sur les réseaux sociaux. «Ils se sentent désemparés alors que c'est un phénomène qu'on peut prévenir», estime-t-elle, exemples à l'appui. Selon elle, il importe d'identifier les tabous en ligne, souvent ignorés par les plus de 40-50 ans, à commencer par le sexisme qui arrive devant la discrimination raciale.

Numericable, en voulant s'amuser avec le slogan «téléchargez aussi vite que votre femme change d'avis», l'a appris à ses dépens. «Je ne crois pas que ce soit le rôle des entreprises de faire des coups de poker, à l'instar de Mister Assur qui avait voulu surfer sur le décès accidentel de Christophe de Margerie, patron de Total, pour mettre l'accent sur la prévention des accidents», souligne-t-elle.

Dérapages LOL

De même que leurs aînés doivent comprendre les tabous du digital, les natifs du numérique qui assurent le community management des entreprises n'évitent pas les malentendus, faute d'appréhension du risque. «Énormément de dérapages sont liés à la culture LOL, comme des émoticones quand on s'est planté. Il ne faut pas que les équipes digitales fonctionnent en électrons libres et ne soient constituées que de jeunes qui connaissent la Toile à titre individuel», note-t-elle. La tentation est alors grande de se défausser sur eux en cas de problème, ce qui renforce le bad buzz.

Les crises peuvent pourtant être gérées afin de limiter l'intensité et la «criticité» du bruit. Au-delà de 30% de commentaires critiques sur une page fans, il convient de détourner l'attaque qui peut se révéler anxiogène sur une page dédiée à ce buzz. Ensuite, il convient d'être réactif et honnête, à l'instar de Camaïeu, mis en cause pour avoir employé des sous-traitants du Rana Plaza, l'immeuble qui s'est effondré en 2013 au Bangladesh. À la différence de Zara, Benetton ou Auchan, cette marque a reconnu très tôt sa responsabilité et «fait presque figure de modèle».

Effet Streisand

Marie Muzard déconseille la censure qui s'est retournée contre Nestlé quand il a voulu interdire une vidéo de Greenpeace qui parodiait la pause Kit Kat pour dénoncer l'utilisation d'huile de palme. Résultat: un effet démultiplicateur – ou Streisand – qui aurait pu être évité avec un peu de vigilance et de l'attention à la Toile.

Son conseil? Ne pas tout dire tout de suite ou s'excuser mais plutôt reconnaître quelques erreurs avec un «statement d'attente» pour se rendre crédible et revenir ensuite avec un discours adapté à la situation. À bannir: la pression ou l'intimidation juridique.

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