FOCUS
Faire en sorte que les petites structures deviennent plus fortes face aux pure players et aux grandes enseignes, de nombreux acteurs, institutionnels ou privés, s'y attèlent.

Les commerçants pensent que 14% des consommateurs font une recherche sur internet avant d’acheter dans un magasin de proximité, alors que ce chiffre s'établit plutôt à… 90%. Cette perception erronée du parcours d’achat des Français a été révélée par le baromètre Mappy/BVA fin 2014. Des résultats qui en disent long sur le peu d’appétence qu’ont aujourd’hui les petits commerçants pour les nouvelles technologies.

«Il y a deux problèmes, nuance Emmanuelle Hoss, directrice générale adjointe de la Semaest, société d'économie mixte de la ville de Paris spécialisée dans l'animation économique des quartiers. Celui de la connaissance et celui du temps. Les commerçants n’ont pas forcément le temps de se former, d’apprendre comment créer un site, etc., mais cela ne veut pas dire qu’ils ne sont pas intéressés.» Face à ce constat, la municipalité a demandé à la Semaest «d'accompagner les commerçants sur le sujet du numérique et de faire en sorte qu’ils s’emparent de ces outils et de ces nouveaux usages». La Semaest s’est donc lancée dans une démarche expérimentale, bien nommée Costo, pour Connected Stores, mais aussi pour la sonorité qui traduit parfaitement sa vocation: armer les petits commerçants.

Rencontre entre deux écosystèmes

Après un premier «meet-up» (soirée de réseautage social) en décembre au Numa pour présenter l’initiative à une quarantaine de commerçants, un groupe Facebook fermé a été créé pour que les commerçants puissent échanger, et Costo a entamé une tournée de présentation chez les commerçants pour «échanger sur un thème, comme la fidélisation par le numérique, qui fut l’objet de notre premier “Costo on the road”», explique Emmanuelle Hoss.

Autre outil d’information sur lequel mise la Semaest: la newsletter, baptisée l'«Echo des Costo», et dont la dernière édition fournissait un tutoriel Twitter. Autre corde à son arc, le Costore, une boutique éphémère qui, pour sa première édition, a ouvert du 6 au 16 mars.

«A Paris, nous avons un écosystème de la proximité incroyablement riche et un écosystème de l’innovation exceptionnel. Il fallait que ces deux mondes se rencontrent», soutient Emmanuelle Hoss. Pendant une semaine, une douzaine de commerçants a ainsi pu se frotter à ses clients et quatre start-up ont pu faire une démonstration en conditions réelles de leur concept.

Devenu un «incubateur du commerce de proximité», comme le qualifie Emmanuelle Hoss, le premier Costore a permis aux commerçants de tester diverses fonctionnalités, comme le paiement mobile proposé par Fivory. «Fivory est la passerelle entre la proximité et l'e-commerce, elle regroupe tous les éléments intervenant dans la relation client, comme les programmes de fidélité, les promotions, etc.», précise Anthony Delorme, son directeur marketing.

Après un test grandeur nature à Boulogne-Billancourt, l’application, gratuite pour le consommateur mais disponible sur abonnement pour le commerçant (entre 39 et 79 euros par mois), sera bientôt lancée dans d’autres grandes villes françaises. «Les commerçants, peu importe leur taille, ont tous une chose en commun: ils veulent animer leur base clients, ajoute Anthony Delorme. Que l’on s’appelle Darty ou que l’on soit boulanger, les besoins sont les mêmes.» Le département de production de contenus de Fivory éditorialise la présence du commerçant en ligne et l’application, qui fonctionne par zone de chalandise, permet au consommateur de suivre les dernières promotions de ses marchands favoris, de payer avec son mobile et de bénéficier du programme de fidélité des grandes enseignes comme des petites boutiques.

Ne pas incriminer internet, s'en servir

Avec une autre force de frappe, Solocal Group (ex-Pages jaunes) s’intéresse également aux commerces de proximité et a mis en place début 2015 son département commerce, qui regroupe toutes les solutions destinées à ces acteurs. «Les commerçants de proximité sont déjà connectés, mais il ne le savent pas: les internautes les cherchent sur internet, des avis sont publiés sur eux… Mais eux ne participent pas à leur notoriété sur le web, regrette Patrick Krawczyk, directeur général de Solocal Commerce. Nous accompagnons donc nos commerçants en structurant leur information, comme leurs horaires d’ouverture, leurs dernières promotions, etc., et nous optimisons leur référencement.»

Grâce à ses bases de données particulièrement bien fournies, Solocal Commerce offre aussi la possibilité de réaliser des opérations de marketing à destination de prospects. «L’idée est de mieux utiliser la force d’internet pour faire venir du monde dans leur magasin, ajoute Patrick Krawczyk. Et lorsqu’ils ne sont pas assez sensibilisés, nos commerciaux leur montre leur empreinte digitale.» Et pour que la prise de conscience soit maximale, Solocal lancera bientôt un outil de check-up d’e-réputation.

Les solutions pour les petits commerçants se multiplient: «In-store Review» de Digitas-LBI, Guest Online de Table Online pour les restaurateurs, Justo Clic contre le gaspillage, Visu Commerce pour discuter en direct avec son commerçant par webcam.

Le site Vente-privée a annoncé l’embauche de 150 commerciaux pour étendre son application de géolocalisation et de push Le Pass vers les petits commerçants. «Avec la crise, une majeure partie du commerce a vu son trafic en magasin diminuer, explique Olivier Le Floch, directeur général associé Vente-privée Le Pass. Beaucoup pensent que c’est la faute d’internet. Nous tentons de leur montrer qu’ils peuvent se servir du numérique pour faire venir des clients dans leur magasin.» Pour 550 euros par an, les commerçants peuvent être géolocalisés et envoyer des offres promotionnelles aux clients repérés par Ibeacon. Ils ont aussi accès à des données, lorsque le client scanne un QR code placé en caisse, par exemple. «Nous les aidons également à faire leur marketing, leurs visuels pour les offres, etc., précise Olivier Le Floch. Les commerçants ne sont pas des marketeurs. Cela leur coûte beaucoup moins cher que du tractage ou de l’achat médias

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