Création
Les premiers palmarès des Cannes Lions (Promo & Activation, Direct, Print & Publishing) se démarquent par des partis pris de simplicité radicale, de recherche d’humanité, dans une 63e édition marquée par l’omniprésence de la réalité virtuelle.

Dans les couloirs du palais des Festival, on croise des hordes de cyborgs. Le visage à demi-caché par un masque, ils se contorsionnent sur leurs sièges, éclatent de rire, ou agrippent, de peur, leurs accoudoirs. La réalité virtuelle, ou VR [virtual reality] est la reine, aujourd’hui plus que jamais, des 63es Cannes Lions.

Pourtant, les palmarès dévoilés le 20 juin marquent un désir bien concret. Celui de revenir «à des valeurs humaines, à la collectivité», comme le résumait Mark Tutssel, global chief creative officer de Leo Burnett Worldwide et président du jury des Lions Direct. Celui-ci a décidé de récompenser «The Swedish Number», signé par Ingo Stockholm pour The Swedish Tourist Association. L’opération permettait de joindre directement au téléphone des Suédois disposés à parler de leur pays. Jusqu’au… Premier ministre! «Dans un monde où nous passons notre temps à tweeter, à envoyer des SMS, à publier des "snaps", il est facile de confondre la technologie avec la véritable connexion humaine. Il est rafraîchissant de voir une opération comme celle-ci, qui revient à la forme de communication la plus humaine: la voix, via le combiné du téléphone», explique Mark Tutssel.

Goût de la provocation

Retrouver le plaisir simple d’un grain de voix… ou d’une journée à la campagne, hors de chez soi - en tout cas certainement pas dans les magasins. Le Grand Prix Promo et Activation promeut lui aussi une forme de retour aux petits bonheurs… non marchands. La récompense suprême échoit en effet à «Opt out side», opération créée par Venables Bell & Partners San Francisco pour le retailer REI: celui-ci a prôné le «Blackfriday backlash», le boycott des soldes à outrance, en encourageant les consommateurs à aller plutôt se promener dans la nature. L’opération se trouvait en balance avec «Brewtroleum» d’Heineken (Colenso BBDO Auckland): le brasseur a créé du carburant à partir du houblon, «un vrai "game changer", qui a permis de relancer la marque de bière, tout en ouvrant des stations-service dans le pays», selon Olivier Apers, executive creative director de BETC et juré du prix Promo. Mais, in fine, alors que le jury, divisé en deux camps à égalité, voyait s’opposer les pro-Heineken et les pro-REI, «nous avons décidé de remettre le Grand Prix à la plus grande opération antipromotion de tous les temps», lâche, un brin provocateur, Rob Reilly, global creative chairman de McCann Worldgroup.

Print en perte de vitesse

La vraie provoc’, serait-ce le retour aux fondamentaux ? Comme le Grand Prix Print & Publishing, «McWhopper» de Y&R NZ Auckland pour Burger King, une annonce tout en texte - qui rappellerait presque la fameuse annonce de Bill Bernbach pour la Beetle de Volkswagen? «Nous pensons que ce type d’annonce constitue le futur du print», a carrément annoncé Joji Jacob, group executive creative director de DDB Singapour.

Une déclaration de foi forte pour une catégorie en perte de vitesse. «Cette année, le nombre d’entrées était en nette diminution, note Jamie Standen, creative director de Rosapark et juré du prix Print & Publishing. Aujourd’hui à Cannes, il y a tellement de catégories plus sexy… Mais ce Grand Prix, une annonce parue dans le New York Times, montre justement ce que les journaux ont encore à offrir : leur crédibilité, à l’heure des réseaux sociaux.» Avec un «plus» qui a emporté le morceau, selon Jamie Standen: «Le recours à la lettre, une des manières les plus civilisées de s’exprimer...» Les fondamentaux, on vous dit.

Les autres prix :

 

Le 20 juin, les jurés ont également remis les Grand Prix Glass, qui récompense les campagnes les plus responsables dans leur représentation des genres, et le Grand Prix Radio. Le premier échoit à  « 6 pack band » de Mindshare Mumbai pour Hindustan Unilever et son produit Brooke Bond Red Label Tea, qui a monté un groupe de pop mené par des transgenres. Le deuxième revient à « The everyman meal » d’Ogilvy & Mather Johannesburg pour KFC, variation drolatique sur le thème de la virilité.

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