L'application Pokemon Go est sorti le 25 juillet en France. Petit récapitulatif pour les publicitaires retardataires des enjeux qui les attendent sur ce phénomène.

Le jeu de réalité augmentée, développée par Niantic est enfin disponible en France. Le but est simple : partir à la chasse aux Pokemon dans le monde réel. S’ils apparaissent sur l’écran de votre téléphone, vous pouvez les chasser avec la Pokeball, puis vous battre contre d'autres chasseurs. Le jeu basé sur la licence du dessin animé japonais a battu tous les records en matière d’appli. Que faut-il en retenir quand on travaille dans la pub ?

 

Une révolution jamais vue

ll faut bien prendre conscience de ce qu’il se passe. Même si vous n’êtes pas adepte du jeu, si un Pikachu reste pour vous un ustensile de cuisine bruxellois, que vous regardez les vidéos des émeutes à Central Park avec un air plus que dubitatif, au point d’utiliser le bloqueur de Pokemon Go sur internet, soyez lucide : le phénomène est d’ampleur.

 

L’application réalise 1,6 million de dollars de revenu par jour, sans compter la publicité, rien qu’avec la boutique. Il est en effet possible d’acheter des accessoires dans le jeu, pour rendre la chasse plus facile (un sac plus grand pour tenir les Pokemon, etc.)

 

En termes d’utilisateurs, en atteignant les 100 millions de personnes, l’application a fait en six jours (dans certains pays seulement) ce que Candy Crush avait fait en un an et demi sur toute la planète ! Elle dépasse Twitter en termes d’utilisateurs actifs qui de plus, ne s’arrêtent pas là : ils y consacrent aussi beaucoup de temps. Sortie depuis moins d’un mois aux Etats-Unis, les chasseurs passent en moyenne 35 minutes par jour sur l’appli. Soit dix minutes de plus que sur… Facebook, selon Sensor Tower.

 

Et même quand l’appli n’était pas encore sortie, nombreux étaient ceux qui l’avaient déjà. Monoprix en a d’ailleurs fait les frais. L’enseigne a fait une opération spéciale de « ravitaillement des chasseurs », avec un sac rempli de produits (bar de céréales, brumisateur, crème solaire, batterie rechargeable…) le vendredi 22 juillet, soit avant la sortie officielle, au magasin de Saint-Michel, dans le cinquième arrondissement de la capitale. Sur simple présentation de l’appli, chaque chasseur pouvait repartir avec son sac. Erreur. Face à la cohue, la queue avait plusieurs centaines de mètres de long, pour quelques maigres satisfaits. Et la majeure partie des participants a plutôt été déçue… Gare donc, aux opérations que vous mettez en place. Ayez conscience du volume de personnes que cela draine.

 

Pourquoi un tel succès ?

« La vague Pokemon Go repose essentiellement sur le succès de la licence, sur son succès passé, et sur le fait qu’elle est particulièrement bien adaptée à travers le scénario du jeu, explique Corentin Picaut, social media consultant pour l’agence We Are Social. C’est d’ailleurs très intéressant pour les développeurs. Car l’appli elle est loin d’être parfaite selon les standards habituels : elle bug, elle consomme énormément de batterie, parfois elle ne fonctionne pas ou mal, et il existe une grosse polémique sur les données personnelles qu’elle récupère. Mais cela n’empêche pas les utilisateurs d'en être addict ». Belle leçon. Ici, c’est le schéma narratif qui prend le dessus sur l’ergonomie, ou la praticité, voire même la sécurité. Certes, la licence joue pour beaucoup dans le succès. Mais l’exemple peut démontrer que l’idée de départ, sa mise en application et l’émotion ressentie dépassent les désagréments vécus. Sans oublier d'ajouter les bénéfices sur la santé (le fait de se déplacer) et la création d’une communauté bien réelle, elle. 

 

La réalité virtuelle a-t-elle à voir là-dedans ?

Un des gros thèmes du jeu est la réalité virtuelle. Pokemon Go combine déplacement réel et scénario virtuel. Elle utilise à cet effet toute la technologie disponible à bord d’un téléphone : géolocalisation, capteur de mouvements et caméra. Rien de nouveau ici. La réalité virtuelle existe depuis longtemps, et de nombreuses marques ont lancé des applis combinant toutes ces technologies pour « embellir » la vie réelle. Des jeux, comme Ingress, réalisé par Google, ou des services immersifs ont déjà été lancé par des marques (comme Ikea). Mais elle restait d’un usage épisodique voire restreint. En France, Ingress n’a jamais vraiment percé en dehors d’un public déjà connecté. Et aucun n’a touché le grand public avec vigueur.

« La réalité virtuelle ne s'est pas démocratisée. La sortie et le succès de Pokemon Go changent toute la donne. Il y aura un avant et un après, estime Corentin Picaut. On savait que la réalité virtuelle s’insérerait dans notre quotidien, mais on ne l’attendait pas avant 5 ou 10 ans. Pokemon Go et son succès ont permis à la technologie d’être connue de tous et d’initier un bon nombre de personnes. »


Car Pokemon Go, avec un traitement médiatique hors norme rayonne bien au-delà ce ceux qui l’ont téléchargé. A tous les chasseurs, il faut ajouter ceux qui les observe dans la rue, ou qui ont entendu parler du concept de l’appli. La médiatisation du phénomène est sans précédent pour une application. On peut ainsi dire que « grâce » à Pokemon Go, la réalité virtuelle pourrait s’ancrer plus facilement dans les usages.

 

Comment y insérer les marques ?

Face aux succès, de nombreuses marques s’interrogent pour s’insérer dans l’appli, et surfer sur la vague pokemonesque. Mais comment faire ? « Les placements de marques « in app » semblent, pour le moment, réduits à la location temporaire des endroits où sont disposés les Pokemon, des arènes de combats ou d’autres éléments du jeu », explique Corentin Picaut. Un moyen de drainer beaucoup, (vraiment beaucoup) de trafic près de chez vous ou au coeur de votre boutique… Mais à ce jour, seul Mcdonald's semble avoir passé un accord commercial au Japon, officiellement. On peut néanmoins s’attendre à ce que cela s’étende à d’autres enseignes. « Même si le développement d’offres commerciales ne semble pas être la priorité des développeurs du jeu, estime Corentin Picaut. On peut penser, vu leur état d’esprit, et au regard des communautés qui se développent en dehors du jeu, qu’ils renforcent d’abord le volet social. Au regard de l’aspect communautaire du jeu, et du comportement des utilisateurs qui échangent et discutent entre eux, Pokemon pourrait bien devenir un jour, un complet réseau social. »

 

Brainstorming

Autre solution pour profiter à plein de la tendance : faire preuve d’imagination avec des opérations out-app. Comme celle de Monoprix, par exemple. « Mais on pourrait imaginer d’autres choses, remarque Corentin Picaut. Pourquoi pas une marque de VTC avec des courses de chasseurs dans une ville ; un équipementier sportif pourrait dessiner une tenue spéciale pour les chasseurs, avec les accessoires adaptés ; pensons à un festival qui pourrait garantir la présence d’un Pokemon rare, une agence de voyages un trajet spécifique pour trouver une des mêmes bestioles exceptionnelles, un hôtel etc, mais aussi concevoir un hardware spécifique ».


Le jeu possède une dimension locale qui nécessite à la personne de se déplacer. Autant l’utiliser et profiter d’avoir son client en personne en face de soi. 

 

Cela va-t-il durer ? 

Il y a plus de 150 Pokemons de première génération. Et on compte six générations en tout. Si le phénomène aura tendance, forcément, à se calmer petit à petit, les nouveautés et les capacités des éditeurs à relancer de nouvelles fonctionnalités dans l'application jugera de sa durée dans le temps. "Mais nous pouvons leur faire confiance pour renouveler l'offre", augure Corentin Picaut. 

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.