Édition
La maison d'édition Nathan s'est retrouvée dans la tourmente le mois dernier après un exercice qui a fait grand bruit et prenant pour exemple des migrants. Outre l'énoncé choquant, la communication de crise de l'éditeur a aussi posé problème.

Tout commence avec un « banal » exercice de mathématiques de niveau lycée, nécessitant l’utilisation d’une suite arithmétique pour être résolu. Dans la nouvelle édition d’un ouvrage destiné aux filières ES et L, l’éditeur Nathan propose un problème dans lequel l’élève doit tout d’abord compter les migrants arrivant sur une île, avant de les « arrondir à l’unité ». Cela afin d’apprendre à exprimer une augmentation de population. À cette activité, s’ajoute une illustration des plus gênantes, une photo, sur laquelle on aperçoit un canot pneumatique où s’entassent une cinquantaine de migrants. Rappelons que l’année dernière, selon l’ONU, plus de 5000 migrants sont morts en Méditerranée... 

Bad buzz pour Nathan

Mais ce n’est pas tout. Après le tollé provoqué sur les réseaux sociaux par l’énoncé, la maison d’édition a tenté de se justifier à travers un premier communiqué censé démontrer l’utilité de sa démarche : « Les programmes actuels encouragent la transdisciplinarité [...] et invitent également à traduire une situation. » Mais ces explications ne passent pas sur la Toile. Corinne Acheriaux, une élue s’emporte sur Twitter qualifiant le texte « [d’]indicible en matière de sordide ». Deux jours plus tard, Nathan publie un second communiqué signé de la présidente des éditions, Catherine Lucet, présente ses excuses et promet que tous les ouvrages seront remplacés. Un peu tard comme réaction !

 

« Il ne faut pas se justifier à tout prix »

Caroline Marchetti, associée fondatrice de Maarc : « Aucune communication de crise n’est de nature à absoudre la faute commise. Dans cette situation l’indignation a été très puissante aussi bien en termes de qualité que de quantité. Par conséquent, il ne faut pas chercher à se justifier à tout prix. Si nous avions dû gérer cette crise, nous aurions tout de suite reconnu une défaillance au sein de la maison d’édition et que tous les manuels seraient rappelés et remplacés gratuitement, ce qui n’a été fait que trop tardivement. La justification de crise ne fonctionne jamais, elle est même totalement contre-productive. Dans ces cas-là il faut faire profil bas, dire que vous êtes désolé et que vous allez réparer votre erreur. »

 

 

« Nathan est placé sous la surveillance de l'opinion »

Marie Muzard, directrice générale de MMC :« Etant donné que le buzz avait franchi les frontières du web pour gagner les médias traditionnels,  Nathan aurait pu accorder une interview à un grand média au lieu de se limiter à poster un communiqué sur son site  et à le relayer sur ses réseaux sociaux. Avec cette affaire des migrants, son « casier digital » n’est plus vierge. Ce bad buzz a clairement laissé des traces critiques sur la Toile et dans certains esprits. Mais les mauvais souvenirs peuvent s’estomper avec le temps, sous réserve d’une communication « post-crise » adaptée. Nathan a intérêt à être très vigilant dans ses choix éditoriaux et au-delà, dans ses différentes initiatives. Il ne faudrait pas transgresser de nouveaux tabous. D’où l’intérêt d’associer toutes les parties prenantes dans la validation de ses choix éditoriaux. Espérons que l’éditeur prendra mieux en compte le risque réputationnel ainsi que les sensibilités de l’opinion. »

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