crise
L’enseigne de bricolage riposte à la décision de justice qui lui interdit d’ouvrir le dimanche par une stratégie de communication de crise tout terrain. Elle pourrait également se pourvoir en cassation.

Finalement, ils ont fermé leurs portes dimanche dernier. Les magasins franciliens de l'enseigne de bricolage Bricorama n'ont pas ouvert le 4 novembre, sur les conseils de leurs avocats. Mais le distributeur conteste, par d'intenses actions de lobbying, une décision de justice qui lui interdit d'ouvrir ses magasins en Ile-de-France le dimanche sans dérogation.

Début 2012, à la demande du syndicat Force ouvrière, Bricorama a été condamné à ne plus ouvrir le dimanche ses points de vente franciliens, sous peine d'une astreinte de 30 000 euros par établissement. Un jugement confirmé par la cour d'appel de Versailles (Yvelines) le 31 octobre. En juillet, le tribunal de Pontoise (Val-d'Oise) avait condamné le distributeur à une amende, qui pourrait s'élever à environ 18 millions d'euros, selon Bricorama, mais un sursis a été prononcé pour son exécution.

Entretemps, Jean-Claude Bourrelier, le patron de Bricorama, a fait appel en juin au cabinet de conseil FTI Consulting afin d'élaborer une stratégie de communication de crise. «Nous avons réfléchi à la façon de nous adresser au gouvernement et aux députés, précise FTI. Ils n'avaient pas été forcément sensibilisés à cette affaire.»

L'argument de bataille choisi au départ est celui d'une situation de concurrence déloyale par rapport aux deux leaders du secteur, Castorama et Leroy Merlin. Ces derniers possèdent des magasins situés dans les périmètres d'usage de consommation exceptionnel (les zones PUCE), ce qui leur permet d'obtenir des dérogations pour ouvrir le dimanche. Le cabinet de conseil FTI souligne que les magasins franciliens des deux géants du bricolage sont très proches de ceux de Bricorama qui, pourtant, n'ont pas obtenu la dérogation.

Avant d'être imité par McDonald's avec une campagne contre la hausse de la TVA dans la restauration dans les quotidiens nationaux le 30 octobre (lire ci-dessous), Bricorama a acheté le 9 septembre une page de publicité dans Le Journal du dimanche afin d'y insérer une lettre ouverte aux gouvernements et aux parlementaires.

Quelques interviews dans les médias plus tard (BFM, Le Figaro, etc.), cette missive avait été lue par les services concernés et des rendez-vous avec quelques-uns des ministères  avaient été pris. «Nous n'avions pas le temps d'une action de lobbying sur la durée, en raison de l'échéance de l'appel, explique FTI. Le tempo s'est réglé en fonction de cet impératif calendaire.»

Le 17 octobre, Bricorama s'est distingué en distribuant à l'Assemblée nationale une boîte à outils à environ 200 députés d'Ile-de-France. «Des députés nous ont demandé s'ils pouvaient en recevoir, eux aussi, note FTI. Les députés visés sont restés fidèles à leur orientation politique. Avant même l'envoi des boîtes à outils, un député UMP, Jean-Pierre Decool, s'était emparé du sujet et a réussi à fédérer une douzaine de ses homologues.»

Une opération qui, pour certains, s'apparente plutôt à du «buzz». «J'éprouve le sentiment que c'est un ultime recours alors que le lobbying consiste à anticiper, estime Jean-Christophe Adler, fondateur du cabinet Affaires publiques consultants. Afin d'influencer les décisions publiques, cela aurait peut-être dû se jouer à l'échelon local et pas avec des députés de l'opposition.»

Fin octobre, un sondage commandé par Bricorama à Opinion Way témoigne que 53% des Français se déclarent favorables à l'ouverture de la grande distribution le dimanche. «Ce sondage a été décidé après une rencontre fortuite avec Arnaud Montebourg (le ministre du Redressement productif, NDLR) qui nous a affirmé que les Français étaient contre le travail dominical», précise FTI.

Pour l'heure, Bricorama mise sur des actions de ses salariés pour diffuser son message et prépare de prochaines actions.

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