Entre le 15 juin et le 15 septembre, 60% des Français partent en vacances. Les audiences TV en pâtissent. Du coup, de la gare jusqu’à la plage en passant par les autoroutes, les annonceurs multiplient les dispositifs pour suivre les vacanciers, plus attentifs et plus disponibles.

«Chouchou, chichis, beignets chochocolat», chaque année, la même ritournelle rythme les vacances des 30% de Français qui choisissent le littoral hexagonal comme lieu de villégiature. Mais le refrain ne serait pas complet sans le bruissement si reconnaissable des banderoles publicitaires qui flottent au vent, emmenées par des ULM ou des petits avions dont le bruit interpelle suffisamment les vacanciers pour leur faire lever la tête. La banderole publicitaire est l'un des techniques les plus anciennes utilisées par les marques pour faire passer leurs messages, mais également l'une des plus efficaces, avec en moyenne 400 000 contacts touchés par heure de vol.

 

Mais si la période estivale est depuis très longtemps préempté par les marques pour communiquer de manière privilégiée avec les consommateurs, les modes et les moyens varient depuis quelques années. L'heure étant moins à l'échantillonnage qu'à l'expérience et au service.

 

La présence des marques sur les plages ne date pas d'hier, tant les grands annonceurs de l'industrie alimentaire avaient compris le bénéfice à tirer de la vague humaine qui se rue depuis les années 1930 sur le littoral français. Mais, aujourd'hui, les marques ne se contentent pas seulement de tournées d'été le long des côtes, elles investissent également gares et autoroutes pour accompagner le consommateur pendant ses vacances. «Ces dernières années, nous avons vu une recrudescence des dispositifs sur les autoroutes, dans gares ou les aéroports, qui se sont transformés pour devenir de véritables lieux de vie, confirme Sophie Dahan, directrice marketing de Globe Groupe, qui orchestre depuis des années les tournées d'été de grandes marques. Cela leur offre un territoire de communication vierge qui leur permet de se rapprocher d'un consommateur très disponible.»

 

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Mais chaque point de contact a ses contraintes. «Sur l'autoroute, on peut retenir les gens pendant dix minutes maximum, car ils effectuent une pause, alors que dans une gare, l'expérience peut être plus longue car les gens arrivent généralement en avance», remarque Sophie Dahan. Des marques alimentaires en profitent ainsi pour aller à la rencontre des voyageurs, comme la marque d'huile d'olive Puget (Lesieur/Sofiprotéol) qui, cette année, concentre ses efforts sur la gare de Lyon parisienne et sur celle de Saint-Charles à Marseille avec un affichage numérique, et qui, entre les deux endroits, organise des animations et des distributions de produits au cours de 52 trajets de la ligne IDTGV Paris-Marseille. Un dispositif qui devrait permettre de toucher un peu plus de 23 000 voyageurs.

 

Des marques, ainsi le chocolat Milka, ont ainsi créé de véritables aires à leur image pour inviter les voyageurs à faire une pause tendresse, tandis qu'Autogrill, spécialiste de la restauration et des services aux voyageurs qui gère en France 58 établissements sur autoroutes, 14 dans les gares et un à l'aéroport de Marseille, a imaginé avec l'agence High Co Shopper les Autogrill Bags, des sacs remis à chaque client contenant échantillons et bons de réduction de plusieurs annonceurs.

 

Les plages, point d'orgue des tournées estivales

 

Si ces dispositifs intéressent de plus en plus les marques, c'est que «travailler sur les moyens de transport permet de toucher les flux de population que nous recherchons toujours pour optimiser le coût contact de la communication», argumente la directrice marketing de Globe Groupe. Et ces flux sont en croissance par rapport à 2013. Les Français étaient ainsi 56% à déclarer partir en vacances l'année dernière, contre 60% cette année, dont 74% en France (50% au bord de la mer, 23% à la campagne et 13% à la montagne). C'est ainsi que certaines tournées des plages, comme celle de la marque alimentaire Andros mise au point par Globe Groupe, proposent une véritable kermesse aux enfants grâce à un «food truck» dispensant diverses activités, comptent parmi leurs arrêts des étapes sur autoroutes. Le rêve pour les parents quelque peu fatigués et stressés. Mais si ces lieux de transit sont généralement des endroits où le consommateur s'ennuie, ce qui confère une valeur ajoutée à toutes les marques qui contribuent à faire passer ce moment de manière agréable, il n'en est pas de même pour la plage, point d'orgue des tournées estivales que se disputent parfois plusieurs marques.

 

Pour le groupe Coca-Cola, par exemple, ce ne sont pas moins de cinq tournées qui sont organisées: deux pour Coca-Cola, une pour Nestea, une pour Coca-Cola Zero et une pour Finley. Comment dès lors interpeller le vacancier avec une telle concurrence?
«Les marques sont de plus en plus nombreuses à se positionner sur ce créneau, et de manière de plus en plus poussée car, avant, nous étions essentiellement sur des tournées d'échantillonnage, confirme Fabienne Balleux, directrice de l'événementiel chez O-Connection. Le but étant de faire passer au consommateur le plus de temps possible au sein de l'univers de la marque, il faut quelque chose de novateur, qui l'interpelle et le lui donne envie de rester.»

 

Pour Nestea, l'agence a ainsi imaginé un dispositif inattendu construit autour d'une patinoire. Baptisé «Osez quelque chose de différent», dans la droite lignée de la campagne de communication, ce «summer tour» est déployé du 25 juin au 24 août dans 35 sites et invite les vacanciers à la détente, Nestea en main, dans sa «cool zone». Elle vient ainsi se positionner sur un territoire jusque-là adopté par Lipton Ice Tea qui, depuis des années, organise ses «Summer Days», une opération proposant jeux et animations qui est activée en deux temps. La première tournée a été organisée sur les campus et dans les centres-villes du 24 mars au 26 avril, puis la tournée des plages prend le relais du 12 juillet au 14 août.

 

Pour ces dispositifs, les marques rivalisent de créativité et proposent des stands toujours plus grands et toujours plus attractifs. Dans la lignée des bons vieux Club Mickey, Coca-Cola déploie ainsi un espace de 500 mètres carrés pour sa tournée «Le sport ça me dit», qui propose gratuitement aux petits comme aux grands huit ateliers d'activités physiques. Un véritable parcours qui incite à bouger et qui compte attirer quelque 5 000 participants.

Et si les budgets alloués à ce type d'opération ne sont pas dévoilés, leur succès dit tout du retour sur investissement qu'elles génèrent. «Notre métier est de mettre le produit et la marque dans les mains des consommateurs de la manière la plus efficace et avec le plus d'impact possible, observe Ludovic Pouilly, responsable des partenariats marketing et d'expérience de marques chez Coca-Cola France. Nous avons la conviction que l'expérience, la preuve par l'exemple, est susceptible de créer de l'émotion, qui elle-même créera le souvenir, la notoriété voire l'attachement à la marque, et donc l'intention d'achat ou le réachat.»

 

Du côté de Globe Groupe, les chiffres indiqués pourraient laisser rêveurs bien des annonceurs: «Nous constatons une mémorisation moyenne entre 89 et 96%, un taux d'achat multiplié par sept sur une population exposée et un taux de buzz moyen de 3,3. Une force d'impact redoutable alors que la recommandation d'un proche influence 42 % des Français dans leur acte d'achat.»

 

Suivre le soleil… mais pas seulement

 

Autre donnée à retenir, ces dispositifs permettent de toucher une cible parfois difficile à atteindre. Ainsi, «atteindre les familles sur le temps scolaire est compliqué, car l'école n'est pas compatible avec les marques et certains dispositifs ne peuvent donc être déployés que le mercredi après-midi, par exemple», ajoute Sophie Dahan. Et si les résultats sont globalement très bons, c'est également parce que «les techniques de communication varient par rapport au reste de l'année, le consommateur est disponible et se laisse plus facilement aller. Il a du temps, il est en famille, il est plus décontracté et donc plus réceptif.»

 

Certaines marques profitent également de l'occasion pour entrer directement en contact avec leur consommateur, comme c'est le cas pour Sosh, qui présente ses innovations Phone et Domino dans une tournée de dix dates estampillé «Sosh-sur-Mer». «Sosh est une marque digitale qui n'est distribuée qu'en ligne et dont le service client est assuré aussi en ligne, rappelle Quentin Delobelle, directeur de la stratégie marque et création chez Orange. L'idée, quand on est une marque digitale, est de donner des rendez-vous dans la vraie vie à ses clients et plus largement à tout le public.» C'est ce que permet cette tournée qui, contrairement à beaucoup d'autres, a le mérite de s'arrêter sur toutes les côtes françaises, et ne mise pas tout sur la seule Méditerranée.

 

Car si cette dernière concentre un flux important de vacanciers, la station d'Argelès-sur-Mer (Pyrénées-Orientales) explosant tous les scores de visites, les autres plages ne doivent pas être négligées. «Bien sûr, il faut suivre le soleil, concède Sophie Dahan. Mais la météo peut également être favorable en Bretagne, et des logiciels permettent justement d'analyser les flux et la météo pour optimiser la sélection des villes.»

 

Une sélection qui se fait soigneusement pour être sûr de rencontrer sa cible au bon moment, et au bon endroit. Pour sa gamme Frappucino, qui est distribuée en GMS (grandes et moyennes surfaces), Starbucks a ainsi misé sur un roadshow pour «aller à la rencontre des vacanciers et recruter de nouveaux clients, indique Ludovic Devry, responsable du développement en grande distribution chez Starbucks. Le choix des villes s'est donc effectué en fonction de l'arrivée de nos produits en grande distribution dans ces régions, croisée avec l'absence de Starbucks dans ces villes.» Un véritable travail de la donnée qui ne suffit toutefois pas à garantir sa présence dans les villes souhaitées. Car toutes ne sont pas favorables à la présence des marques sur leurs plages, comme le confirme Fabienne Balleux, d'O-Connection. «Certaines municipalités sont très réfractaires à des dispositifs commerciaux, cela peut être dû au manque de place, mais aussi au fait qu'ils sont antipubs.» Quand bien même, cela rapporte de l'argent, puisque certaines municipalités ne se privent pas de faire payer leur «audience» à des tarifs importants là où d'autres accueillent les animations gracieusement.

 

Ultime conseil pour boucler la boucle des vacances: «Il est essentiel de faire suivre la prise de parole en été par une communication “back-to-school” qui permet de garder le contact avec le consommateur», conclut Sophie Dahan, de Globe Group. Au risque de voir l'expèrience de la marque s'estomper aussi rapidement qu'un bronzage estival.

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