Design
Le jury du Grand Prix Stratégies du design 2014 récompense la création du nom et le logo de l'espace de «coworking» implanté au cœur de Paris, dans le berceau des start-up.

C'est un immeuble de 1 500 m² sur six étages, rue du Caire, au cœur du quartier du Sentier, berceau des start-up parisiennes. Il a été inauguré le 14 novembre 2013 par une foule festive. C'est un nouvel espace consacré à l'innovation. Son nom: Numa, marque acronyme dont la sonorité claque. C'est cette marque, la stratégie de «branding» associée et le logo conçu pour l'occasion, qu'a récompensé le jury du Grand Prix Stratégies du design 2014.

La tâche n'avait rien d'évident. Comment baptiser le nouveau lieu symbolisant l'excellence de l'écosystème numérique parisien? A l'origine du projet, l'association Silicon Sentier, créée en 2000, rebaptisée Numa en avril 2014.

«Nous avons lancé une compétition rémunérée en avril 2013, résume Marie-Vorgan Le Barzic, la directrice générale de l'association. Nous avions déjà des marques fortes, La Cantine, Le Camping et Silicon Xperience, déclinées pour certaines en régions. Pour chaque nouveau lieu, on avait une nouvelle identité et une nouvelle cible. Aucun de ces choix n'était possible puisqu'on rassemblait ces compétences dans ce nouvel ensemble, un lieu unique.»

En l'occurrence, le Numa est une fusion de ces trois marques: l'espace historique de Silicon Sentier (La Cantine), installé passage des Panoramas, près de la rue Montmartre à Paris, où est né le concept de «coworking», le programme intensif d'accélération et de mentorat pour les start-up (Le Camping), et le laboratoire où étaient éprouvés les concepts imaginés par les start-up (Silicon Xperience). «Le Lieu» (son nom de code initial), financé par les collectivités locales à hauteur de 2 millions d'euros, a bénéficié d'une opération de «crowdfunding» (financement participatif), Co.bâtissons, de la part d'un peu plus de 600 particuliers.

Compréhensible dans toutes les langues

Au terme de la compétition d'agences, Silicon Sentier a décidé de recourir aux services d'Ogilvy RED, agence-conseil en positionnement de marque du groupe Oligvy (WPP), appuyée par son agence de design, CBA. «Plus que le nom, on devait qualifier ainsi une stratégie, une ambition», résume Marie-Vorgan Le Barzic. Au bout de deux mois de travail, le duo d'agences lui a donc soumis le nom, et le logo.

Numa: un nom bref, rassemblant numérique et humain. «Il fallait couvrir et croiser les territoires du numérique et du digital, des start-up et de l'humain, de l'entrepreneuriat et du coworking», précise Olivier Auroy, directeur général corporate de CBA, qui a rejoint l'agence après le travail sur ce projet. «Il fallait faire passer l'idée que tout le système du Numa consiste à mettre en lien des gens: des business angels, mentors, start-up, grandes entreprises, etc.», ajoute Natalie Rastoin, directrice générale d'Ogilvy France et présidente d'Ogilvy RED Conseil.

Un nom qui fait volontairement écho au MOMA (Museum of Modern Art) de New York. «Il fallait s'adresser à des personnes qui s'approprient le lieu pour créer une start-up. Faire simple. D'où l'idée d'une combinaison de syllabes, en référence au MOMA. Le musée est un endroit où il y a de la culture. Le Numa doit être le lieu des gens», ajoute Alessandro Bolchi, directeur de création chez CBA. Ce nouveau nom devait aussi être international, compréhensible dans toutes les langues et symbole de la position de Paris dans la concurrence des capitales et leurs tissus de start-up. Londres a déjà monté des campagnes de communication avec UK Trade & Investment et l'agence Mother autour de sa Tech City, et New York pour sa «Silicon Alley».

«On était alors dans un écosystème parisien des start-up encore informel, festif. Il fallait être dans la concurrence avec New York, Berlin et Londres, trouver un nom en rupture pour montrer qu'on a grandi. Et il faut se rappeler que le Numa a été lancé avant le projet de label French Tech [qui vise à développer les start-up françaises dans le domaine du numérique]», souligne Natalie Rastoin.

Le Numa a été inauguré en pleine floraison de projets ambitieux de lieux pour les start-up, tel le projet d'incubateur de Xavier Niel avec la Halle Freyssinet. Une ébullition d'autant plus portée, alors, par le contexte de campagne électorale pour les municipales.

Pour le logo de Numa, CBA a proposé ces lettres noires «pour symboliser les fenêtres ouvertes, la porosité du lieu sur la ville, la possibilité de pouvoir regarder de l'intérieur vers l'extérieur, de pouvoir rentrer… Nous l'avons retenu d'emblée», précise Marie-Vorgan Le Barzic. Ce logo est apposé sur l'entrée de l'imposant immeuble de Numa, édifice signé TVK pour la conception (espaces événementiels au quatrième étage, terrasse, etc.), l'exécution étant l'œuvre des cabinets d'architectes Juliette Buvat et Hartmann & Partners.

Comme tout bon logo, celui-ci est déclinable. «On peut jouer dessus, inventer une typographie, le compléter», poursuit la directrice générale de Numa. «Nous avons joué avec cette lettre N, des portes et des fenêtres qui s'ouvrent sur le futur», complète Alessandro Bolchi.

 

 

 

3 questions à Marie-Vorgan Le Barzic, directrice générale de Numa : «Pas un nom, mais une stratégie et une ambition»

 

 

Avec Numa, vous avez créé une marque à part entière. Quel était l'objectif?

Marie-Vorgan Le Barzic. Nous avions ce nouveau lieu immense, implanté au cœur du quartier du Sentier à Paris, à la fois espace de coworking pour des entrepreneurs, de conférences, etc. Il lui fallait un nouveau nom, à consonance internationale. Ce lieu succédait à La Cantine, espace de coworking créé par l'association Silicon Sentier, près de la rue Montmartre. Il y avait donc déjà La Cantine, Le Camping… Ce sont des marques fortes, mais il fallait une synthèse. La Cantine avait une image vieillissante, Le Camping un côté franchouillard… Dans ce qui a abouti à Numa, il s'agissait de choisir non pas un nom, mais une stratégie, une ambition. Il fallait requalifier des demandes en quelque chose de porteur, de grand, pour nous désenclaver des problématiques d'identité et d'organisation.

 

Quelles étaient les contraintes?

M.-V. Le B. Il fallait recréer un nom qui soit une proposition de valeur, et non une réponse à quelque chose. Et il fallait faire passer les valeurs d'ouverture, de diversité, de générosité, de performance, d'ambition et d'accessibilité au niveau international. Nous repartions de zéro à partir des marques antérieures. Nous avions pour nom de code «Le Lieu», le nom Numa a été dévoilé lors de la soirée d'inauguration, le 14 novembre 2013.  Par ailleurs, avec le branding, on touchait à l'organisation interne, aux équipes, aux questions de pré carré des uns et des autres.

 
Quel bilan en tirez-vous?

M.-V. Le B. Nous avons eu une proposition de logo qui symbolise les fenêtres, l'ouverture, la porosité du lieu dans la ville, de pouvoir regarder de l'intérieur vers l'extérieur, pouvoir rentrer…, on pouvait y injecter une histoire. Et il est très reconnaissable. Côté chiffres, quelque 80 000 personnes sont passées au Numa en près d'un an. Les six premiers mois, nous comptions 600 événements organisés. Nous envisageons de tourner un film publicitaire pour le web qui montrerait l'énergie qui s'en dégage et rend possible des parcours personnels.

Entretien: C.C.

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