Presse
Avoir recours à un prestataire pour s’occuper du flux est un sujet tabou pour les sites d’info en continu. Un marché pourtant juteux que se partagent quelques agences.

L’actualité ne dort jamais. Les journalistes si. Hors des heures de bureau, certains médias font appel à des prestataires pour animer leur site. Veille, gestion du flux, hiérarchisation de page d’accueil, breaking news, montage vidéos… «Notre expertise c’est l’écriture Web, la réactivité et la création d’audience», explique Erik Monjalous, président de 6 Medias. Apparus il y a une quinzaine d'années, trois principaux acteurs se partagent le marché: 6Médias (ex-Diora News), né d'une collaboration avec l'opérateur Orange, l'AFP-Services, une filiale au statut particulier qui a signé son premier contrat en 1999 avec la Commission européenne, et Relaxnews, partenaire clé de l'AFP sur les contenus de loisirs.

«Entre nous, c'est la guerre pour récupérer des contrats», confie Olivier Lombardie, directeur commercial et marketing de l’AFP. «Mais c'est un combat sain parce qu'il nous pousse à innover.» Une concurrence dont profitent les clients, qui collaborent parfois avec plusieurs agences. A l’instar du site de RTL, qui fait appel aux prestations de 6 Medias pour les vidéos et de l’AFP-Services pour l'animation éditoriale. Ces agences comptent dans leur clientèle de grands noms des médias en ligne (RTL, 20 Minutes, Le Point, L’Opinion, Orange News, France Télévisions…). Pourtant, avoir recours à des prestataires reste un sujet tabou. Il faut dire que les syndicats de l’AFP dénoncent une confusion des genres (voire encadré).

Nouveaux usages

Pour les médias, la tendance n'est pas à l'externalisation totale. Il s'agit de garder en interne ce qui fait la valeur propre - investigation, long format, reportage de terrain - et de confier le flux à des tiers. Un prestataire est surtout appelé pour son savoir-faire en matière de nouveaux formats médiatiques. «Hier nous étions sur l'envoi de sms. Aujourd'hui, on se concentre sur la vidéo adaptée au mobile et aux réseaux sociaux. Qui sait sur quel créneau nous serons demain?», s'interroge Erik Monjalous. Les agences déléguées se situent sur une niche mais leur développement est certain, car les nouveaux usages sont toujours plus spécifiques. «A l'avenir, on pourrait être appelé pour animer des applications de curation, ou sur Apple Watch», entrevoit Olivier Lombardie.

6 Medias, qui a a connu un chiffre d'affaires de 2,4 millions d'euros en 2014, a engagé une levée de fonds en janvier dernier pour accompagner son développement. La filiale AFP-Services annonce un chiffre d'affaires de 3 millions en 2014 et espère 5 millions en 2015. Du côté de Relaxnews (8,1 millions d'euros de chiffre d'affaires, -1,4 millions en résultat d'exploitation), en négociations exclusives en vue de son rachat par Publicis, un changement de stratégie radical s'opère. «Les clients médias nous ont donné la meilleure légitimité qui soit. On souhaite désormais offrir notre expertise aux marques, qui pourront utiliser les contenus de notre partenaire l'AFP. On réinvente le concept d’agence de presse», s’enthousiasme son coprésident Jérôme Doncieux, qui a lancé l'an dernier Relax Content Manager, une offre d'infos loisirs à destination des marques.

Inquiétudes syndicales
Le Syndicat national des journalistes conteste depuis sa création l’activité corporate de l'AFP-Services, pointant un « risque de brouiller l’image de la maison et de la marque »« Il faut prouver constamment qu'il y a une ligne de démarcation parfaitement claire entre les activités de l'AFP-services et les contenus AFP : tandis que les clients de l’AFP n’ont aucun droit de regard éditorial sur le fil de dépêches, l’AFP-Services respecte au contraire strictement la ligne éditoriale de ses clients et leur délivre à la fois des contenus exclusifs et de l’animation éditoriale, martèle Olivier Lombardie. Par ailleurs, il y n’y a aucune passerelle possible pour les journalistes entre les deux entités ».

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