Ça casse dur à la télé. En 2015, les nouveaux programmes internationaux ont fait fi des conventions sociales ou religieuses. C’est l’une des tendances de fond observées en 2015 par Eurodata TV Worldwide, la structure de veille internationale de Médiamétrie. D’un côté, ce sont des codes dont s’émancipent les personnages des fictions, comme en Israël, où, dans Milk and Honey (Keshet), quatre amis d’enfance dans un petit village de Galilée ouvrent, discrètement, une entreprise d’escort boys destinée aux dames, dans un environnement pas franchement ouvert à ce type d’initiative.
Canal+, cette année, devrait diffuser la production internationale The Young Pope (HBO, Sky, Canal+), qui raconte le début très controversé du pontificat, fictif, du premier pape américain, Pie XIII. La distribution sera prestigieuse: Jude Law, Diane Keaton, Cécile de France, etc. En Suède, la religion est aussi au cœur de Pray for Love (Zodiak), un programme de rencontres destiné... aux pasteurs.
D’autre part, ce sont les faits historiques que la télévision remet en cause à travers l'uchronie, les séries et fictions explorant de nouveaux points de vue. Ainsi, 11/22/63, proposé sur la plateforme SVOD Hulu et réalisé par J.J. Abrams, tente d’estimer ce que seraient les Etats-Unis aujourd’hui si l’on avait empêché l’assassinat du président Kennedy le 22 novembre 1963: le chaos! Dans The Man in The High Castle (Amazon), c’est carrément l’Allemagne et le Japon qui auraient gagné la Deuxième Guerre mondiale. Sur Arte, Trepalium racontera un monde futur, proche, dans lequel 80% de la population sont rejetés hors des villes, sans travail et dans des conditions sociales et de vie insupportables.
La télévision casse aussi les codes de la production, notamment avec l’installation des caméras subjectives. Le téléspectateur partage la vision du héros dans une narration totalement immersive, comme dans la série Anton 90 (New Creation, DR3), au Danemark, où toutes les images sont filmées par le personnage principal... que personne ne verra, finalement. En Israël, un reality show, Point of you, suit la vie quotidienne de candidats uniquement à travers leurs lunettes équipées d’une caméra. Leur identité n’est révélée que lors du dernier épisode.
Enfin, la culture geek s’installe aussi dans le petit écran. En Grande-Bretagne, Airheads/Airmageddon met en compétition des pilotes de drones, ces engins volants stars du Noël dernier. Aux Etats-Unis, ce sont les émojis qui sont le cœur d’un jeu rappelant Pictionary: The Great Emoji Challenge voit s'opposer des candidats qui doivent déchiffrer des messages rédigés exclusivement avec ces pictogrammes que l’on s’envoie via textos ou réseaux sociaux. Le gain du vainqueur, lui, n’est pas virtuel, puisqu'il recevra un chèque d’un million de dollars.
L’Inde, leader des séries originales
Eurodata TV Worldwide a également repéré plus de 8 500 nouveaux programmes sur les chaînes du monde entier, dont un peu plus de la moitié (53%) sont des créations originales. C’est la fiction qui donne le ton, avec 40% des lancements, suivi par les programmes factuels (magazines, talk-show, etc.) 37% et les divertissements (23%). Toutefois, en fiction, seuls 43% des nouveaux téléfilms et séries sont réellement originaux, les autres étant des adaptions locales d’histoires exportées.
Par pays, le champion de la nouveauté l’an passé a été l’Inde qui, notamment en fiction, a mis à l’antenne 80% de nouvelles séries ou téléfilms. Ce taux s’élève à 60% en Chine et 45% en Russie. Le Japon et la Corée du Sud sont les champions des programmes de divertissement. Au Japon, 29% des émissions de ce genre étaient originales en 2015, tandis que la Corée du Sud affiche 26%. Enfin, la Grande-Bretagne et le Danemark sont les champions des magazines/talk-shows avec, respectivement, 47% et 38% de nouveautés dans ce genre.
