SPECIAL RIO
Posséder une accréditation pour les Jeux olympiques n’ouvre pas les portes de toutes les compétitions. Sur place, les journalistes doivent encore demander un ticket pour les événements les plus demandés. J’ai dû le faire, comme les autres.

Avec mon accréditation olympique, portée «obligatoirement et de manière visible» à longueur de temps autour du cou, je pensais détenir le sésame ultime : celui qui m’ouvrirait les portes de l’ensemble des compétitions. Eh bien non ! Pour certains événements, il faut passer par le Ticketing. En clair, je dois demander une sur-accréditation me permettant d’accéder au site. Cette procédure a été mise en place par le Comité international olympique (CIO) à Athènes, pour les Jeux de 2004 pour les événements les plus demandés par la presse. Ils sont baptisés «High Demand Events», et depuis douze ans, il se sont multipliés : cérémonies d’ouverture et de clôture, compétitions de natation, matchs de basket-ball de la Dream Team américaine… En fait, ce sont les compétitions les plus prisées par les médias nord-américains. Pour y assister il faut en faire la demande et passer au comptoir. Ce sont les comités olympiques nationaux qui gèrent ces places pour leurs journalistes nationaux.
 
Mon nom sur une feuille

En France, le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) a délégué cette charge à l’Union des journalistes de sport en France (UJSF). Pour obtenir ma sur-accréditation, je dois passer une tête dans les locaux de l’AFP (agence France presse). Ils se situent au 3e étage du Main Press Center, dans le Parc olympique de Barra. J’y retrouve Jean-François Renault, un ancien de l’Equipe qui a dix neuf J.O. au compteur. Il veille sur les 194 journalistes français, rédacteurs et photographes, travaillant sur les Jeux à Rio. Un chiffre qui ne tient compte ni du contingent de l’AFP, environ 190 personnes, ni des journalistes de la radio ou de la télé. Sur le bureau de Jean-François Renault trainent quelques feuilles sur lesquelles sont notés les événements nécessitants un ticket supplémentaire. Il faut y inscrire son nom. «Je ne te garantis rien, me prévient-il d’entrée. Pour la natation, par exemple, ce sera non, car la tribune est ridicule et notre quota pour la presse française est très limité». Comme la discipline est très prisée par les Américains, toutes les finales sont classées niveau «High Demand Event». Idem pour la gymnastique féminine ou les matchs de basket de la Dream Team des Etats-Unis.
 
La télé prend presque toute la place
 
«C’est purement un problème de place en tribune de presse, précise Jean-François Renault. En Natation, elle ne comprend pas beaucoup de pupitres». Le syndic de presse gère aussi les accréditations des photographes. Ils sont 28 français accrédités à Rio, là encore sans compter l’AFP. «Pour eux, le nombre d’emplacements dans les enceintes est encore plus réduit», note Jean-François Renault. «Mais, tout cela se négocie», me lâche-t-il avec un petit sourire.
Ainsi, pour les sports collectifs, comme le hand-ball ou le basket-ball, le CIO octroi, généreusement, un quota plus important aux représentants des médias des deux pays concernés par les matchs. Le recours au Ticketing permet évidemment aux organisateurs de limiter le nombre de places dans les tribunes de presse, et d’optimiser celles vendues au grand public. «Le nombre d’accrédités presse écrite ou photographes n’a pas évolué depuis 2004, regrette Jean-François Renault. Il est resté bloqué à environ 5800, alors que, dans le même temps, la famille audiovisuelle s'est considérablement étoffée : ils sont 18 000 aujourd’hui». Une preuve des difficultés économiques que vit la presse traditionnelle… et du fait que les Jeux sont devenus un show télévisuel.
 
Des choix cornéliens
 
Toutefois, les médias audiovisuels ne sont pas exclus du système du Ticketing. Là encore tout se gère par famille. En France, c’est France Télévisions, le diffuseur officiel principal qui est l’unique interlocuteur auprès de OBS (Olympic Broadcating Services), la structure, filiale du CIO, gérant tout ce qui touche à la télé. Pour France Télévisions, le Ticketing peut donner lieu à un choix cornélien quand une seule place de commentateur est accordée aux chaînes françaises : à qui donner la priorité entre le groupe audiovisuel public et Canal+, qui diffuse aussi les Jeux ? Au final, j’ai dû faire une croix sur le fait d'assister aux courses du nageur Florent Manaudou. Stratégies est, pour de bonnes raisons, moins prioritaire qu’un titre de la presse grand public. En revanche, peut-être aurais-je une chance de voir l’équipe de France de hand en finale… si les Bleus obtiennent aussi leur ticket pour ce match.
 
 

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