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A l’image de Now This aux Etats-Unis, le pure-player français spécialisé dans le divertissement renonce à son site pour ne plus exister qu’en vidéo sur les réseaux sociaux. Un pari qui n’est pas sans risque.

L’ampleur du changement rappelle l’époque où, dans la presse, les premiers journaux ont arrêté leur version papier. Le 3 octobre, Minute Buzz a officiellement fait une croix sur son site internet pour se consacrer entièrement aux réseaux sociaux, Facebook en tête, avec des contenus uniquement vidéo, une première en France. «Aujourd’hui, tout se passe sur les plateformes sociales. Nous devons nous mettre là où sont les usages», explique Laure Lefevre, cofondatrice du pure-player spécialisé dans le divertissement.

Le pari est audacieux: selon nos informations, Minute Buzz totalisait en juin dernier une audience globale de 1,5 million de visiteurs uniques, que ce soit sur ordinateur, mobile ou tablette. «Oui, nous renonçons à cette audience, mais c’est pour concentrer toute notre énergie sur une autre: 8 millions de 18-35 ans nous suivent sur les plateformes sociales, et nous voulons doubler ce chiffre», souligne Maxime Barbier, l’autre fondateur.

Près de 600 vidéos par mois

Fini, donc, les articles publiés sur le site de Minute Buzz. La page d’accueil renvoie désormais vers les comptes Facebook, Twitter, Snapchat, Instagram et You Tube du média. Près de 600 vidéos y sont publiées chaque mois, avec pour ambition de «contribuer à changer le monde par le bonheur», tout un programme.

Aux Etats-Unis, de rares médias ont déjà tenté l’aventure du tout-social. C’est le cas de Now This, fondé en 2012 par deux anciens dirigeants du Huffington Post, Kenneth Lerer et Eric Hippeau, qui a décidé en février 2015 d’arrêter son site pour se concentrer sur la production de vidéos pour les réseaux sociaux. Bilan, dix-huit mois plus tard: plus d’un milliard de vidéos vues mensuellement!

«C’est une stratégie difficilement envisageable à long terme. Ceux qui font ce choix ne sont alors plus maîtres de leur destin puisqu’ils sont à la merci d’un revirement économique ou technique de ces plateformes», avance Philippe Couve, fondateur du cabinet de conseil Samsa.fr.

Difficile, en effet, de lutter contre les revirements de Facebook en matière d’algorithme. Dernier en date, la pénalisation des articles pièges à clic depuis août dernier, ce qui n’inquiète pas pour autant les dirigeants de Minute Buzz, selon qui Facebook favorise avant tout les vidéos dans son algorithme.

Offre commerciale réorganisée

A l’occasion de ce revirement stratégique, le pure-player a également réorganisé son offre commerciale autour de trois piliers: le sponsoring de vidéos, le brand content (qui représente actuellement 60% du chiffre d’affaires) et la création de contenus en marque blanche. L’un des enjeux pour le média sera de centraliser les données des différentes plateformes sociales afin de fournir aux annonceurs des indicateurs de performance, basés sur le temps passé et le reach généré. Seul bémol: depuis que Facebook a reconnu avoir surévalué durant deux ans le temps de visualisation des vidéos de 60 à 80%, les annonceurs doutent de la fiabilité des données disponibles.

Pour autant, Minute Buzz a confiance dans son modèle: «Je suis sûre que nous allons donner des idées à d’autres», estime même Laure Lefevre.

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