Dossier Start-up
Du 6 au 9 novembre prochain, la grand-messe technologique qu'est devenue le Web Summit se tiendra pour la deuxième fois à Lisbonne. Un beau coup de projecteur pour le Portugal, qui se rêve en Silicon Valley européenne.

Depuis sa création en 2009, le «Davos des geeks» se tenait à Dublin, en Irlande, pays d’origine des fondateurs Paddy Cosgrave, David Kelly et Daire Hickey. Mais pour les cinq prochaines années, c’est la capitale lusophone qui a été choisie pour accueillir le Web Summit, événement gigantesque consacré aux nouvelles technologies et à l’innovation. «C’est plus qu’un événement. Pendant une semaine, Lisbonne est exposée aux yeux des entrepreneurs, des investisseurs et des politiques du monde entier. L’objectif, c’est de faire briller le Portugal sur la carte de l’innovation», se réjouit Adolfo Mesquita Nunes, ex-secrétaire d'État au Tourisme de 2013 à 2015, reconnu pour son action digitale et innovatrice et qui a contribué au rapatriement du Web Summit au Portugal. «C’est aussi le moyen de créer les conditions pour attirer les entreprises et les inciter à rester», ajoute-t-il.

Après un premier rendez-vous en 2016, la ville entière va pour la deuxième année consécutive battre au rythme de cet événement, pourtant très spécialisé, du 6 au 9 novembre 2017. Les 545 000 habitants de Lisbonne s'apprêtent à accueillir plus de 60 000 participants (contre 50 000 en 2016) et plus de 650 intervenants issus de 165 pays. Un impact touristique indéniable. Depuis l'aéroport jusque dans les quartiers reculés, la ville entière s'organise autour du Web Summit: les transports, les soirées de networking dans différents établissements, l’affichage et les décorations, etc. 

Retombées importantes

Les retombées directes sur l'économie du Portugal peuvent s'élever à 200 millions d'euros, dont 50 millions pour l'hôtellerie, selon les chiffres du gouvernement. Surtout, c’est l’occasion de renforcer l’image de Lisbonne comme terre technologique et entrepreneuriale. Et le pont du 25-Avril en acier rouge suspendu au-dessus du Tage, bâti par le même architecte qui a construit le pont du Golden Gate à San Francisco, ne manque pas de donner un petit air de côte ouest américaine à la capitale du Portugal, qui cherche à marcher dans les pas de sa grande sœur, la Silicon Valley, pour devenir le cœur européen des nouvelles technologies. 

«C’est un pays qui a toujours été tourné vers l’innovation, vers la découverte, mais sa révolution tardive en 1974 et la grande crise de 2011 ont fortement freiné son développement technologique Paradoxalement, c’est ce retard qui a permis au pays d’opérer de véritables sauts technologiques, pour finalement prendre beaucoup d’avance sur de nombreux sujets», raconte Sandra Lucas Ribeiro, directrice de projet du bureau lisboète de Faber Novel, ouvert en 2012.

Par exemple, seuls 3% des Portugais possèdent une carte de crédit, le paiement est donc largement dématérialisé. Un système unique et commun à toutes les banques, développé dès 1985 par la SIBS (Sociedade Interbancaria de Servicos), a notamment permis à Brisa (gestion des autoroutes), en 1991, d’équiper les voitures d’un capteur placé à l’avant du pare-brise pour un passage au péage sans contact. Aujourd'hui, la majorité des parkings à Lisbonne en sont équipés. De même, les parcmètres se payent avec le smartphone, mais également les drive du McDonald's, etc.

Retour des cerveaux

Pour répondre à ces besoins en compétences high-tech, le pays peut compter sur ses grandes écoles d'ingénieurs, anglophones, dont le prestigieux Institut supérieur technique de Lisbonne. Les formations universitaires ont également bonne réputation. «Pendant des années, les diplômés quittaient le pays pour rejoindre des entreprises étrangères. Mais depuis quelques temps, les jeunes préférent entreprendre dans leur pays et les expatriés reviennent», explique Matthieu Douziech, fondateur français d'Harpoon.jobs, plateforme de recrutement gérée par un algorithme, installée au Portugal.

L'écosystème des start-up lisboètes est encore jeune, immature, mais commence à se structurer. Surtout, il est florissant. «Son histoire a débuté en 2012, quand la mairie de Lisbonne, avec un budget participatif, a fondé l’incubateur Startup Lisbon avec un financement de 5 millions d'euros», relate Manon Le Padellec, cofondatrice du groupe French Upers, association née en janvier 2016 qui rassemble la communauté des passionnés des nouvelles technologies français, francophones et francophiles de Lisbonne. Depuis, de nombreux incubateurs internationaux s'installent à Lisbonne, qui en compte plus de 80: Second Home, Impact Up…

Les secteurs principaux couverts par les jeunes pousses sont la fintech et le commerce en ligne. À l’instar de la «licorne» (start-up valorisée à plus de 1 milliard de dollars) portugaise Farfetch, un site e-commerçant spécialisé dans les produits de luxe, qui compte parmi ses actionnaires Condé Nast. Qualité de vie, bord de mer, loyers moins chers que dans les autres métropoles européennes… les atouts de la ville sont nombreux. Pour l’entrepreneur français Raphaël Schneider, fondateur de Payabi: «C’est un pays dynamique, à taille humaine, les contacts s’y développent très facilement et la main-d’œuvre est très qualifiée.»

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