L'actu vue par...
Gaël Sliman, président d'Odoxa, commente pour Stratégies l'actualité de la semaine.

61 % des Français qui ne sont pas prêts à accorder une majorité à Emmanuel Macron, selon Ipsos Steria, après son élection triomphale.

C’est un triomphe en trompe-l'œil, qui ne comporte ni blanc-seing, ni chèque en blanc. Macron a bénéficié d’un vote de rejet à 57 %, contre 49 % pour Hollande en 2012 et 33 % pour Sarkozy en 2007. Une majorité a voté contre Marine Le Pen. Cela ne veut pas dire qu’il n’aura pas de majorité. Il a de gros atouts, avec 20 millions de Français qui ont voté pour lui, le légitimisme de l’opinion et sa propre popularité - c’est la personnalité préférée des Français depuis deux ans en alternance avec Alain Juppé. Et il bénéficie des divisions de ses adversaires, notamment les Républicains. Il est quand même le favori pour les législatives. Mais il a intérêt à ne pas faire d’impairs ces prochaines semaines.
 
Ses mots et ses images lors de ses discours après son élection.
Il a voulu rattraper l’erreur commise au soir du premier tour où il avait donné le sentiment de vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué, d’être quelqu’un d’arrogant en allant célébrer sa victoire à La Rotonde qui rappelait le Fouquet’s. Résultat : il s’est effondré la première semaine après le 23 avril. Cette fois, il a surcompensé, il fait mieux mais il a surjoué dans la volonté de manifester de la gravité. Il a lu son prompteur de manière beaucoup trop visible. Puis, il a été devant la Pyramide du Louvre un peu trop grandiloquent en voulant rentrer dans le costume de Mitterrand, à la limite du ridicule. C’était trop, même si cela a bien fonctionné pour les médias étrangers. Sur le fond, il a trouvé les mots justes, les mots graves. Il a eu raison de dire qu’il allait mener son programme et rien que son programme. C’est la seule solution possible. Même si on aurait pu attendre qu’il dise qu’il allait tenir compte de ceux qui n’avaient pas voté pour lui au premier tour.
 
Les instituts de sondages recrédibilisés depuis le premier tour, alors que le data souffre du mauvais pronostic de Filteris.
Depuis 2002, il y a eu une quarantaine d’élections où les sondages ont eu très peu d’écart avec les résultats et ont annoncé le bon ordre d’arrivée. Cette accumulation positive a été démentie par la postvérité qui a pris le pouvoir après le Brexit et l’élection de Trump. Des médias ont dit qu’ils arrêtaient de publier des sondages. Sarkozy et Fillon ont prétendu que les sondages se trompaient et ont été chercher Filteris ou Gov. On nous a beaucoup opposé le big data. Mais il ne faut pas opposer les deux. On a été l’institut le plus précis sur la primaire de la droite grâce à notre utilisation du big data avec Dentsu Consulting.
 
Des rédactions ne couvrent pas la soirée de Marine Le Pen par solidarité avec Mediapart et Quotidien (TMC), exclus par le FN.

On n’a pas à exclure, trier, violenter les journalistes. Il est logique qu’il y ait des réactions de solidarité entre médias. Il faut arrêter de tolérer la postvérité. Cette attitude ne passe plus dans l’opinion. Après, il faudra bien couvrir le Front national.
 
La tentative de déstabilisation d’un candidat sur les réseaux sociaux via les Macronleaks...
C’est le mauvais côté des réseaux sociaux. Une info inventée a en apparence la même valeur qu’une vraie. Mais ceux qui ont abusé de la postvérité, qui ont voulu instrumentaliser les fausses rumeurs ont explosé en plein vol. Marine Le Pen l’a payé cher. Notre système a quelque chose de bon. Ces coups tordus se développent mais explosent au visage de ceux qui s’y raccrochent.
 
Le débat Macron-Le Pen du 3 mai
Marine Le Pen avait un objectif à la Trump. Le calcul initial était de pourrir le débat, de faire sortir Macron de ses gonds. Elle devait renverser la table en pariant qu’il ne supporterait pas la contradiction. Mais son diagnostic était erroné. Elle a rapidement perdu pied. 2 heures et demie, ce n’est pas le même exercice que des débats à cinq ou à onze. Et si on n’a pas un projet très solide, notamment sur l'Euro, ça se voit.  En outre, il y a une différence de niveau. Autant les meetings étaient difficiles pour Macron, autant il est très solide dans l’exercice du grand oral centré sur les questions économiques. Marine Le Pen n’a pas été la plus convaincante pour 72 % des Français et même un tiers des électeurs du FN.

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