Production
Nicolas Coppermann est le président de la nouvelle structure Endemol Shine France, née le 1er mai de la fusion des deux sociétés de production. Reconnue pour ses programmes de flux, l’entité va à présent développer ses activités de fiction et de brand content, en lien direct avec les marques.

Annoncée en mai 2014 au niveau mondial, la fusion entre Endemol et Shine est effective en France depuis le 1er mai. Pourquoi est-ce le dernier pays à réaliser cette opération?

Nicolas Coppermann. La France était le seul pays où les deux sociétés, Endemol et Shine, étaient de taille proportionnée. La volonté du groupe était de ne pas le mettre en péril cet équilibre.

Le nouveau groupe est désormais le premier producteur indépendant mondial. Vous ne l’êtes pas en France. C’est votre objectif ?

N.C. Nous raisonnons davantage en termes de largeur et de qualité de l’offre que de taille ou de volume. L’intérêt du groupe en France est d’être présent avec des équipes constituées du meilleur des deux sociétés. L’ambition est de proposer aux diffuseurs, et de manière plus large aux clients de toutes les plateformes ou aux annonceurs, une offre de qualité et de proposer à nos talents un environnement privilégié. En fait, je ne souhaite pas être le plus gros, mais plutôt le plus chouette!

Quels sont vos atouts?

N.C. Au niveau du groupe, nous avons un assemblage du plus gros catalogue de formats dans le flux et un savoir-faire dans ce domaine. En France, nous disposons d’une équipe qui est aujourd’hui au top de ce qui peut être proposé. La télévision, c’est autant proposer les meilleurs idées et concepts que rassurer et être les meilleurs dans l’exécution.

Le Conseil de la concurrence indique que chacune des deux sociétés bénéficie d’un volume d’activité supérieur à 50 millions d’euros. Est-ce exact?

N.C. Nous ne communiquons pas sur nos résultats, mais c’est significativement plus que cela: nous sommes largement à plus de 100 millions d’euros, et l’objectif est de croître régulièrement. Mais nous ne sommes pas dans cette logique-là, notamment avec des acquisitions. L’enjeu est plus sur la performance, la pérennité et l’adaptation aux évolutions du marché.

Notamment pour les chaînes traditionnelles?

N.C. Oui, elles sont en pleine interrogation. Nous sommes en quête de nouveaux modèles de propositions éditoriales et de production, dans un contexte de ressources en décroissance chez nos clients. Il s’agit d’accrocher les spectateurs, en particulier les plus jeunes.

Endemol et Shine sont surtout reconnues pour les programmes de flux...

N.C. Effectivement, dans le secteur du flux nous couvrons l’intégralité du spectre, tous les genres et sous-genres. L’objectif est de consolider l’acquis et de créer de nouvelles marques. En ce qui concerne la fiction, nous en parlerons après Cannes, mais nous livrerons 30 heures d'ici à fin 2018, ce qui devient significatif. L’objectif est de réaliser 25% à 30% de notre chiffre d’affaires dans la fiction. C’est un axe fort de développement.

Et les autres genres?

N.C. Nous n’avons pas d’agence de presse qui nous permette de faire de l’information. Ce n'est pas dans notre stratégie, mais nous n'excluons rien. Nous irons, pourquoi pas, dans le magazine, mais pas dans l’investigation. Quant au documentaire, quelques projets sont en cours, notamment un sur Christophe Rocancourt [«l'escroc des stars»] prévu pour Canal+. En fait, nous ferons cela à l’occasion, sans rien nous interdire. Ces développements se réaliseront grâce à des collaborations et talents extérieurs, dans une logique d’association respectueuse.

Avec le flux et la fiction, le digital est-il un troisième pilier ?

N.C. Oui, c’est sans doute celui qui réunira les deux premiers. C’est un moyen de découvrir les nouveaux talents, de nouvelles manières de faire, de raconter des histoires et de produire et, enfin, d’être en contact avec les marques. L’évolution du système passera par une plus forte implication des marques dans les contenus. Nous devons apprendre à travailler de manière plus directe avec elles. Rien ne dit que demain, ce ne sera pas équivalent à ce que nous produisons pour le secteur classique. Il y a une obligation raisonnée.

Avez-vous un studio digital?

N.C. Endemol en a un depuis 2012. Nous faisons sans doute moins de bruit que d’autres, mais nous avons déjà, avec Endemol Shine Beyond et ses 50 heures de programmes produits en 2016, notre studio digital. Nous sommes une alternative aux studios des diffuseurs.

Le brand content est-il un axe de développement ?

N.C. Oui, dans le cadre de cette stratégie dans le digital. Nous savons produire des contenus de qualité, comme la chaîne Coke TV pour Coca-Cola, ou Ferrero avec les «25 heures de dingue de Kinder Bueno». Le brand content est une activité en tant que telle, mais elle nous permet aussi de comprendre comment fonctionnent les marques, quels sont leurs besoins, leur rapport aux spectateurs.

Quels sont les rapports avec les diffuseurs traditionnels ?

N.C. J’ai toujours appelé à un partenariat plus fort entre les diffuseurs et les producteurs. Toutefois, cette relation reste assez tendue et antagoniste dans un contexte de marché dont nous espérons tous qu’il va reprendre et où le modèle d’affaires des chaînes est attaqué. Du coup, je trouve que, dans les discussions sur les programmes, on parle beaucoup d’argent et de budget, davantage que de création ou de nouvelles idées. Cela arrive de plus en plus souvent et, personnellement, je trouve que c'est dommage. Ce n'est pas comme ça qu'on va vers la lumière...

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