Télévision

Le Portugal a remporté haut la main et pour la première fois l'Eurovision dans la nuit du samedi 13 à dimanche 14 mai à Kiev, devançant la Bulgarie avec une ballade mélancolique tranchant avec le strass habituel du show aux 200 millions de téléspectateurs.

Salvador Sobral, crooner de 27 ans en attente d'une greffe de coeur en raison d'une sévère insuffisance cardiaque, a ému aussi bien les jury de professionnels que le public du concours avec son morceau jazzy Amar Pelos Dois («Aimer pour deux»). «C'est une victoire pour la musique, pour les gens qui font de la musique qui veut vraiment dire quelque chose», a réagi le jeune artiste aux longs cheveux noirs et à la barbe parsemée. «La musique, ce n'est pas un feu d'artifices, ce sont des sentiments, essayons de changer cela et de revenir à la musique car c'est ce qui compte», a-t-il ajouté. 

Le Portugal devance ainsi la Bulgarie, qui a créé la surprise avec un adolescent de 17 ans né à Moscou et formé dans les télé-crochets russes, Kristian Kostov, et la Moldavie. Il éclipse aussi l'autre grand favori, l'Italien Francesco Gabbani arrivé à une décevante sixième place alors qu'il séduit les bookmakers avec son entraînant Occidentali's karma interprété à côté d'un danseur déguisé en gorille devenue la mascotte de nombreux fans. 

La représentante de la France, Alma, n'est pas parvenue à répéter la performance de 2016 (sixième place) mais l'interprète de Requiem, à 28 ans, se maintient dans la première moitié du classement avec une honorable 12e place. Le Portugal n'avait jamais dépassé la sixième place. Il succède à l'Ukraine qui comptait en accueillant l'Eurovision, monument du glamour et du kitsch depuis plus de 60 ans, donner une autre image que celle d'un pays ravagé depuis trois ans par une guerre qui a fait plus de 10 000 morts. Sans ébranler la fête, la mort de quatre civils près de la ligne de front dans l'Est samedi a contraint le président ukrainien Petro Porochenko à annuler sa présence à la finale.

 

La Russie absente 

 

L'Ukraine était arrivée première en 2016 à l'issue d'un duel très politique avec la Russie grâce à la chanteuse Jamala et une ballade évoquant les persécutions subies à l'époque soviétique par les Tatars de Crimée, péninsule ukrainienne annexée par la Russie en 2014. Les tensions entre Moscou et Kiev s'étaient de nouveau invitées cette année dans la compétition.

La candidate russe Ioulia Samoïlova, qui se déplace en fauteuil roulant, a été interdite d'entrée par les autorités ukrainiennes pour avoir chanté en Crimée. Cette décision a conduit au refus de la Russie de diffuser l'événement, et à l'exclusion du pays. Le jeune candidat bulgare, deuxième, avait d'ailleurs fait parler de lui ces derniers jours pour s'être produit lui-aussi en Crimée après son annexion, alors qu'il participait à une émission de télévision russe. Les organisateurs ont mis en avant son âge au moment des faits, 14 ans, pour l'autoriser à participer à la finale. 

Pour l'Ukraine, trois ans après son virage pro-occidental, le concours constitue une vitrine de son rapprochement de l'Europe et de l'adoption de valeurs libérales, malgré la guerre qui oppose son armée à des séparatistes prorusses. Les quatre victimes de samedi, trois femmes et un homme à Avdiïvka, près du fief rebelle de Donetsk, portent à 14 le nombre de civils et soldats ukrainiens morts depuis le début du mois dans l'Est de l'Ukraine, selon les bilans des autorités.

La capitale ukrainienne a malgré tout déployé d'importants moyens pour accueillir les visiteurs étrangers dans une atmosphère de fête avec zones où les fans pouvaient regarder l'émission. «J'ai de grands espoirs pour l'Ukraine parce que le pays est en guerre et qu'ils ont tout si bien organisé malgré tout», a expliqué à l'AFP Hanna, 43  ans, venue de Finlande.

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