Dossier ZOOM
Depuis un an, JC Decaux casse ses codes maison avec son laboratoire La Rue. Dans un espace ouvert, 35 collaborateurs issus de 17 métiers pilotent les briefs des clients et interagissent avec un large écosystème. Leur ligne d’horizon: entrer dans l’ère de la coconstruction.

Dans les étages, rien n’a changé. De longs couloirs rectilignes s’étirent jusqu’à un point de fuite indéfinissable, départageant deux alignements parfaits de portes figées dans un garde-à-vous hiératique. Les parois sont revêtues d’un bois couleur miel, parfaitement assorti à la moquette claire. Le silence règne, à peine troublé par un très léger chuintement: peut-être la climatisation ou l’écho assourdi d’une escouade de routeurs sagement empilés derrière une porte.

Au rez-de-chaussée, en revanche, tout a changé. Derrière une porte protégée par un lecteur de badge, un nouveau monde a émergé. D’emblée, la différence de ton est manifeste. Sitôt franchi le seuil, le visiteur est prié de suspendre sa cravate à l’une des patères multicolores qui ornent l’espace d’entrée. Bienvenue dans La Rue, le laboratoire de JC Decaux. Premier choc: la lumière du jour, omniprésente grâce à de larges baies vitrées de pleine hauteur. Ouvrant à la fois sur la rue et sur une cour intérieure arborée, elles plongent cet espace de 200 m² au cœur du réel.

Après le vestibule, le visiteur se retrouve sur la «place», un espace garni de canapés où peuvent se tenir les réunions, mais aussi les moments moins formels. Le lab offre une multitude de lieux différents, explique sa conceptrice, l’architecte Mélanie Baudoin: «La Rue a été conçue comme un village, avec des lieux bien identifiés: la place, la salle de réunion, les canapés «cocons», le living et la cafétéria. L’objectif était de pouvoir se réunir à tout moment, de ne pas rester assis toute la journée.»

Une mobilisation à tout moment

Les 35 occupants du lab restent en effet rarement assis de longues heures aux tables de travail qui longent les baies vitrées. Tout commence dès qu’un membre de l’équipe de JC Decaux Live, installée le long des baies côté cour, reçoit un brief, explique Adrien Figula, directeur de ce département: «Le commercial l'analyse et l'enrichit, puis réunit les ingénieurs, créatifs et autres compétences. C’est alors que le brainstorming commence.»

Le processus pouvant commencer à tout moment, la réunion peut se tenir aussi bien sur la place que dans l’un des cocons, ou même l’un des deux bureaux vitrés que mobilisent habituellement les deux codirecteurs du lab. Aucune routine non plus dans le quotidien des participants. Sortir en permanence des sentiers battus est même l’objectif, indique Erik Soulard, creative technologist: «Mon travail consiste, entre autres, à détourner la technologie pour créer des expériences plus engageantes et innovantes, de nouveaux usages publicitaires dans un contexte de “smart city” en devenir, et ce de manière transverse dans le groupe.»

À ce premier brainstorming en succèdent d’autres, qui peuvent mobiliser n’importe quelle compétence. Un pouvoir que le lab a obtenu des plus hautes instances, rappelle Isabelle Schlumberger, directrice générale de JC Decaux, chargée du commerce, du marketing et du développement: «La Rue a immédiatement eu le soutien des membres du comité exécutif, qui ont accepté que leurs collaborateurs puissent être mobilisés à tout moment pour enrichir nos projets.» Juristes, spécialistes du marketing et chercheurs du bureau d’études de Plaisir (Yvelines) ou de Singapour peuvent donc être mobilisés à tout moment, si besoin par vidéo-conférence.

Les équipes de La Rue sont aussi régulièrement mobilisées sur deux autres activités. D’abord avec la préparation, pendant trois à quatre semaines en moyenne, des Explore Days. Ces sessions réunissent au centre de recherche de Plaisir l’ensemble des acteurs en interaction avec une marque. Agences médias, agences digitales, etc., se retrouvent ainsi durant une journée avec l’annonceur.

Prendre le temps de réfléchir

Si l’exercice est complexe, il a le mérite de placer JC Decaux dans une approche proactive par rapport à ses partenaires, souligne Arnaud Laferté, brand content manager: «L’objectif est de les nourrir, les inspirer et les encourager à explorer des voies nouvelles sur notre média, en réalisant toute la latitude créative dont ils disposent.» Les Explore Days sont aussi des moments de créativité porteuse de valeur sur le long terme, ajoute Damien Melich, directeur de la création et des contenus de JC Decaux et codirigeant de La Rue: «Les sept sessions d’Explore Days déjà menées nous ont permis de faire émerger huit projets que nous inscrivons dans un temps long et qui se nourrissent les uns les autres.»

Réunir pendant une journée jusqu’à trente personnes aux agendas si chargés n’avait rien d’évident, mais la démarche suscite un engouement croissant, assure Isabelle Schlumberger: «Les agences, qu’elles soient publicitaires, digitales ou médias, nous sollicitent pour créer des Explore Days avec leurs clients. Dans le monde de l'immédiateté, prendre le temps de réfléchir est très précieux.»

Les Explore Labs sont l’autre activité mobilisant chaque mois les équipes de La Rue. Cette fois l’événement se déroule sur place. But du jeu: se connecter à l’extérieur grâce à un écosystème déjà fort d’une centaine de partenaires. Triés sur le volet, les invités viennent disserter ou exposer les sujets et techniques du moment les plus en pointe. Les deux dernières sessions ont ainsi accueilli le directeur marketing de Twitter et une équipe de HTC venue présenter et faire essayer son nouveau casque de réalité virtuelle. Animation garantie. Autant de nouvelles vibrations qui se diffusent dans les étages et viennent troubler ce silence géométrique dont le règne touche peut-être à sa fin.

Un enrichissant «imaginarium»

Pour Isabelle Schlumberger, directrice générale de JC Decaux, chargée du commerce, du marketing et du développement, La Rue fait entrer JC Decaux dans une nouvelle ère: «Nous avons imaginé un lieu ouvert et vivant suscitant l'envie de venir discuter et échanger. La Rue est un “imaginarium” où les bonnes ondes se mettent au travail. J'y suis très souvent en réunion. Ce lieu symbolise ce qu'est JC Decaux: un acteur incontournable de la “smart city”. La Rue est un creuset dans lequel tout le monde peut s'exprimer sans barrières. Il nous a permis d'irriguer le marché publicitaire et d'enrichir la vision que nos clients avaient de nous d’une dimension industrielle et servicielle.»

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