Etude

Une vague de «propagande» numérique, venant essentiellement de Russie via des programmes informatiques autonomes («bots»), diffuse des informations erronées pour manipuler l'opinion publique dans le monde entier, selon une étude britannique présentée à Washington. Cette étude de l'Université d'Oxford porte sur l'utilisation des «bots» sur les réseaux sociaux pour influencer la politique dans neuf pays: le Brésil, le Canada, la Chine, l'Allemagne, la Pologne, Taïwan, la Russie, l'Ukraine et les Etats-Unis.

«La propagande par ordinateur est l'un des nouveaux outils les plus puissants contre la démocratie», écrivent les directeurs de l'étude, Philip Howard et Samuel Woolley, qui notent que les traces de ces offensives proviennent principalement de Russie, mais aussi de Chine ou même des pays visés par cette propagande. «Il y a un immeuble à Saint-Pétersbourg (nord-ouest de la Russie) avec des centaines d'employés et des millions de dollars de budget dont la mission est de manipuler l'opinion publique» dans un certain nombre de pays, a détaillé Philip Howard mardi, lors d'une présentation à la presse.

Les techniques russes consistent par exemple à diffuser de «multiples» publications «contradictoires», a poursuivi M. Howard. «Il s'agit de semer la confusion. Il ne s'agit pas forcément de diffuser de fausses informations mais de rendre les gens tellement indifférents à la politique qu'ils n'ont plus envie de s'engager», a poursuivi Samuel Woolley.

L'équipe a analysé des dizaines de millions de publications sur sept réseaux sociaux pendant des élections, des crises politiques et divers «incidents» liés à la sécurité nationale. En Russie, les chercheurs ont calculé que 45% des discussions d'ordre politique étaient alimentés par «des comptes largement automatisés».

Scandale aux Etats-Unis

Même si la propagande et les «fausses informations» ne sont pas une nouveauté en politique, l'utilisation des algorithmes pour créer des «bots» sur les réseaux sociaux semble bien avoir amplifié le phénomène. Aux Etats-Unis, l'étude estime que les «bots» ont eu une influence lors de l'élection présidentielle de 2016. «Des armées de bots qui suivent, retwittent ou likent les publications d'un candidat le rendent ainsi plus légitime, et il semble davantage soutenu qu'il ne l'est réellement», écrivent encore les auteurs de l'étude. Faire croire sur internet qu'il bénéficie d'un tel soutien «peut amplifier son soutien réel grâce à un effet d'entraînement», ajoutent-ils.

Selon l'étude, Twitter est le plus vulnérable aux «bots» car il est possible d'y créer un compte anonyme et sa plateforme de programmation est en libre accès. L'influence supposée de la Russie dans l'élection américaine, soupçonnée d'avoir voulu favoriser le républicain Donald Trump au détriment de sa rivale démocrate Hillary Clinton, est au coeur d'un scandale aux Etats-Unis, avec des investigations sur une possible entente entre les autorités russes et l'équipe de campagne de M. Trump, lui-même très actif sur Twitter.

Facebook avait annoncé fin avril qu'il renforçait sa sécurité pour contrer les efforts de gouvernements et d'autres acteurs organisés pour répandre de fausses informations ou manipuler les discussions sur sa plateforme pour des raisons politiques. Cela rentrait dans le cadre des mesures prises par le groupe pour lutter contre les "fake news", qu'il avait été accusé d'avoir trop laissé circuler durant la campagne présidentielle américaine, favorisant ainsi la victoire de Donald Trump. Les exemples les plus flagrants de la propagande par «bots» sont visibles en Ukraine, note encore l'étude britannique, qui cite l'exemple d'une fausse histoire de «garçon crucifié» ou de soldats ukrainiens payés «avec deux esclaves et une parcelle de terrain». Deux exemples devenus selon eux des «cas d'école».

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