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Le Nouvel Observateur lance un nouveau supplément «styles de vie» dans un secteur florissant où les annonceurs se bousculent.

Ne dites qu'il s'agit d'un vulgaire supplément! «Le terme est toujours péjoratif, il renvoie à un appendice sans intérêt où l'on ne trouve que de la publicité. Je préfère parler de journal», s'agace Laurent Joffrin, coprésident du directoire du groupe Nouvel Observateur, qui inaugure ce 29 mars Obsession, un... supplément lifestyle, proposé chaque dernier jeudi du mois avec le news magazine. Regard bleu glacier, barbe rousse et larme fugace, serpentant dans le pli d'une joue: Michael Fassbender, qui jouait dans le film «Shame» le rôle d'un accro au sexe, prête son visage à la couverture du numéro un.

«Dans sa sonorité, Obsession fait référence, de manière évidente, à l'Observateur, mais aussi à l'univers de la mode, dans lequel évoluent beaucoup d'obsessionnels», s'amuse Olivier Wicker, directeur de la rédaction, créateur du Next de Libération. «La Repubblica publie un supplément qui tient plutôt du catalogue publicitaire. Ce n'est vraiment pas le sujet ici: nous désirons que les lecteurs viennent en kiosque chercher Obsession», martèle Laurent Joffrin.

Chanel, Emporio Armani, Ralph Lauren... Le journal, dont la maquette est signée par l'agence BETC, s'ouvre sur une succession d'annonces publicitaires. Il faut attendre la page 22 avant de voir démarrer le rédactionnel: le premier numéro d'Obsession, fort de 147 pages, est diffusé à 510 000 exemplaires avec Le Nouvel Obs et devient, par là-même, mécaniquement le supplément le plus puissant des news magazines.

Il contient 54 pages de publicité, soit «50% de plus que nos objectifs», se félicite Nathalie Collin. La directrice générale du groupe, qui vise la rentabilité pour 2013, ambitionne les 30 pages de publicité en moyenne.

La chasse est ouverte. Le gisement publicitaire semble encore loin d'être tari. M-Le magazine du Monde, lancé en septembre 2011 autour des tropismes actualité et art de vivre, est un succès commercial. L'Express Styles a fait évoluer sa formule début mars. Le Parisien serait en période de tests: il prévoit le lancement à l'automne prochain d'un magazine lifestyle, bien décidé à ne pas passer à côté de cet Eldorado.

«Ne nous cachons pas derrière notre petit doigt: en 2011, le luxe et l'habillement sont parmi les catégories d'annonceurs qui ont le plus progressé», remarque Véronique Priou, directrice de l'expertise presse de Zenith-Optimédia. Des marques comme Maje, Sandro ou encore Zadig & Voltaire cherchent, par exemple, à gagner en statut en sa bagarrant pour apparaître dans les pages premium, en début de journal.»

Pour capter des pages de publicité, les éditeurs soignent l'écrin. Lorsqu'on joint au téléphone Guillaume Crouzet, rédacteur en chef adjoint de L'Express Styles (+22% de recettes publicitaires brutes en 2011), il est en partance pour Milan, où il présentera la nouvelle formule du titre aux annonceurs Gucci et autres Prada.

Pour autant, affirme-t-il, il n'est pas question que les lecteurs se sentent pris en otage dans des tunnels de pub. «Nous avons redensifié l'hedomadaire: la frivolité nécessite le plus grand sérieux, explique le journaliste. Il s'agit de donner envie de lire le titre, même si on ne peut pas l'acheter séparément.»

Cela n'empêche pas les éditeurs de lorgner aussi les ventes au numéro. D'ailleurs, il n'est pas exclu que des hors-série de L'Express Style apparaissent en kiosque, envisage Guillaume Crouzet.

Les suppléments rêveraient-ils d'indépendance? L'hebdomadaire Madame Figaro (diffusion France payée: 449 905 ex., +6,4%) s'est affranchi en mars dernier, en apparaissant seul en kiosque, dans un format «pocket». Cette première a provoqué une levée de boucliers chez les éditeurs Conde Nast, Prisma, Marie-Claire et Mondadori, qui ont obtenu une condamnation du Figaro pour pratiques anticoncurrentielles. L'éditeur a fait appel.

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