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Le président du conseil de surveillance de Vivendi a imposé sa stratégie de valorisation boursière, par le démantèlement du groupe, en obtenant le départ de Jean-Bernard Lévy.

Sa biographie n'occupe que deux lignes sur Wikipedia. Pourtant, Jean-René Fourtou, 73 ans, est et demeure l'homme fort de Vivendi. C'est lui qui fait aujourd'hui pencher le groupe dont il préside le conseil de surveillance dans le sens d'un démantèlement afin d'obtenir une meilleure valorisation en Bourse (il possède en propre 786 599 actions Vivendi, d'après le rapport annuel 2011). C'est lui, aussi, qui a entraîné le départ pour «divergences stratégiques» de Jean-Bernard Lévy, président du directoire du groupe qui fut l'apôtre d'une convergence industrielle centrée sur le numérique. Lui enfin qui tient les clés de la nouvelle orientation que s'apprête désormais à suivre Vivendi.

Recentrage sur les télécoms ou au contraire priorité donnée à un grand groupe de contenus avec Canal + et Universal Music dans lequel Vincent Bolloré, futur administrateur, pourrait jouer sa partition? Scission entre les deux pour permettre au même Bolloré, bientôt actionnaire à 5%, de peser davantage dans une branche auquel il souhaiterait intégrer ses 37% dans Havas?

«Rien n'est tranché, assure-t-on à Vivendi, à la sortie des récifs, le pilote peut continuer tout droit, ou aller à gauche comme à droite.» L'idée est d'attendre l'automne, avec la décision de Bruxelles sur le rachat d'EMI et l'arrivée de Bolloré, pour commencer à dessiner l'avenir du groupe.

Pour l'heure, la révolution de palais a déjà son histoire officieuse. Michel Combes, le directeur général de Vodafone qui s'apprêtait à devenir PDG de SFR, le 1er août, a tenté son va-tout en demandant, en sus, la présidence du directoire de Vivendi, que venait de lâcher celui qui l'avait recruté. Lorsqu'il a cette exigence, en milieu de semaine dernière, à l'issue d'une longue conversation, Jean-René Fourtou vient de lui demander de rejoindre malgré tout SFR. Le dompteur de fauves fait alors le tour de son bureau et lui tend la main: «Je crois qu'on s'est tout dit.»

Exit donc Michel Combes, remplacé par Stéphane Roussel, le DRH du groupe, qui aura à négocier avec les syndicats le plan de départs volontaires que le groupe a annoncé à SFR, le 3 juillet, pour novembre prochain. Selon nos informations, le conseil de surveillance de Vivendi a reproché à Jean-Bernard Lévy d'avoir racheté trop cher à Vodafone, à près de 8 milliards d'euros, les 44% dans SFR et d'avoir sous estimé l'offensive de Free dans la valorisation de cet actif. Vu sous cet angle, il est logique que les deux artisans de ce rachat jettent l'éponge. Michel Combes, pourtant, se croyait promis à un bel avenir à Vivendi puisque Jean-Bernard Lévy lui avait assuré de lui transmettre le flambeau du groupe dans quelques années...

Pour l'heure, et par interim (au plus tard jusqu'à son départ à la retraite début 2013), c'est Jean-François Dubos, ex-secrétaire général du groupe qui prend les rênes de Vivendi. Alignant 23 ans de carrière après avoir commencé dans le cabinet de Charles Hernu, il est bien sûr un dirigeant de transition. C'est encore Jean-René Fourtou qui aura la charge de d'insuffler les grandes réorientations stratégiques sous l'œil attentif de Vincent Bolloré.

Sera-ce la chance de Bertrand Meheut, pour sortir par le haut de la présidence de Canal+? Pour présider un holding, d'autres voient plutôt un profil plus consensuel comme celui de Thierry Breton, actuel PDG d'Atos. Quoi qu'il en soit, le futur patron devra être un homme habile pour faire oublier la coresponsabilité de Jean-René Fourtou dans toutes les grandes options stratégiques de Vivendi, de l'achat de la filiale brésilienne GVT à la reprise d'Emi et... des 44% de SFR. Autant d'acquisitions qui pèsent sur la dette, estimée à 14 milliards d'euros en 2012.

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