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La nouvelle agence de presse Sipa News, née du rachat d’AP France par l’Allemand DAPD, mise sur une plus grande réactivité et un ton moins institutionnel pour attaquer le monopole de l’Agence France-Presse.

C'est dans une ancienne usine d'armement du XVIe arrondissement de Paris, siège de la mythique agence de photojournalisme Sipa, que les quelque 120 salariés de la nouvelle agence de presse Sipa News affûtent leurs armes. Début septembre, ils ont investi cette vaste salle de rédaction de 900 m2, située boulevard Murat, à deux pas de la porte de Saint-Cloud. C'est également à cette adresse que travaillent les équipes de Réservoir Prod, la société de production de feu Jean-Luc Delarue.

«Dans tous les pays, il y a plusieurs agences de presse, sauf en Chine, constate un brin ironique Erik Monjalous, directeur général adjoint de Sipa et ancien directeur commercial de l'Agence France-Presse. Notre ambition est de détrôner l'AFP et de prendre à terme entre 20 et 30% du marché français. Nous pensons qu'il y a de la place en France pour une deuxième agence de presse, surtout quand les tarifs de celle-ci sont élevés et que certains clients se plaignent.»

Filiale du groupe de presse allemand DAPD, Sipa News, officiellement lancée le 23 octobre, compte dans son bataillon 70 journalistes rédacteurs, dont quinze sont issus du service en français de l'Associated Press, agence rachetée par DAPD le 16 juillet dernier. Un an plus tôt, le groupe allemand avait déjà repris l'agence photo Sipa Press. Une quarantaine de journalistes ont été recrutés cet été, parmi lesquels Jean-Luc Testault, ancien rédacteur en chef France de l'AFP, aujourd'hui directeur de la rédaction.

Il est 17 heures, et pour la deuxième fois de la journée, la rédaction fait le point sur les sujets à venir. Sur le fil quelques heures plus tard, le handballeur Nikola Karabatic rappelé en équipe de France malgré une mise en examen pour escroquerie, les suites de l'ouragan Sandy aux Etats-Unis et l'inauguration du Salon du chocolat à Paris. Au total, quelque 350 dépêches sont publiées chaque jour, contre près de 800 pour l'AFP. «Nous souhaitons faire moins d'institutionnel que notre concurrent, être davantage sur la vie de tous les jours», explique Erik Monjalous. Ici, pas de tabou: le vainqueur de l'émission Masterchef aura sa dépêche. «Nous voulons sortir de ce dogmatisme selon lequel l'information n'existe pas tant qu'elle est en dehors de chez nous. Notre rôle est aussi d'informer nos clients que tel média sort telle information. Rien n'empêche de vérifier ensuite.» Au risque de se faire l'écho d'une fausse information, comme lorsque la chaîne BFM TV a annoncé dans un bandeau en mars dernier, à tort, que Mohammed Merah s'était rendu? «Plutôt que de ne rien dire, nous préfèrerons émettre des doutes, dire que l'information n'a pu être vérifiée», tempère Erik Monjalous.

Plus de légéreté égal plus de réactivité

Grâce à une structure plus légère, Sipa News mise sur une plus grande réactivité. Parmi ses premières victoires, les quatre minutes d'avance sur l'AFP dans le jugement en appel de l'ancien trader Jérôme Kerviel, le 24 octobre. «Avec moins de journalistes [70 pour Sipa, 650 collaborateurs pour l'AFP en France], c'est possible de faire un journalisme plus pertinent», estime le directeur général adjoint. C'est ainsi que sur chaque dépêche, les clients de Sipa News – 28 durant la phase de test jusqu'en décembre – ont la possibilité de poser leurs questions, laisser un commentaire, mais également télécharger directement les photographies associées sans avoir à passer par une plate-forme photo. Cette offre, qualifiée de «low cost» par certains, serait facturée entre 30 et 50% moins cher qu'un abonnement AFP. Déjà, cette dernière prépare sa riposte, avec le lancement de plusieurs groupes de travail sur l'évolution de l'agence. La guerre est déclarée.

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