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Le "real time bidding", ventes aux enchères sur Internet, progresse sur la Toile. Au point d'apparaître comme un relais de croissance face à une publicité display qui s'essouffle.

Ce sera le 4 décembre qu'Audience Square sera lancée avec les groupes M6, Le Monde, Libération, Les Echos, Express-Roularta, Nouvel Obs, le Point, Next RadioTV, Prisma Media et RTL Net. Cette plateforme de vente d'inventaires publicitaires, forte de 27 à 28 millions de visiteurs uniques par mois, sera le deuxième ad exchange média, spécialisé dans les enchères en temps réel, après le lancement en septembre de La Place Media (TF1 Pub, Figaro Média, Lagardère Publicité, Amaury Media...).

 

Selon Alexis Marcombe, son directeur général, la plateforme, qui comptera sept salariés, se définit avant tout comme une régie innovante qui marie la cohérence éditoriale avec une capacité de ciblage sur des segments qualifiés. «Ce sera notre point de différenciation, précise-t-il. Nous avons une vingtaine de cibles-types et des segments ad hoc avec une approche data, qualifiée, sur les cent sites médias qui composent nos audiences.»


Pour aller au-delà du classique ciblage socio-démographique, Audience Square a fait appel à un prestataire, Ezakus, pour la qualification et le ciblage de ses audiences. La plateforme est en mesure de déterminer les profils des internautes de façon fine grâce à un moteur sémantique développé avec l'Inria: les contenus sont ainsi scannés afin d'isoler les centres d'intérêt des visiteurs des sites.

Un horizon à 180 millions

«Nous avons 15 millions de profils qualifiés depuis neuf mois, ajoute-t-il. Nous utilisons donc de la data de façon transparente pour qu'on puisse faire de la couverture sur cible. Il ne s'agit pas que d'une approche sur la performance et le prix.»


A la différence de la Place Media, qui se pose en alternative à Google et qui vient de lancer un appel d'offres auprès d'un prestataire «data» pour 2013, Audience Square n'entend pas se positionner sur les seuls avantages de la commercialisation en temps réel des invendus publicitaires, à la façon d'une place boursière.

 

Mais, alors que le display s'essouffle (-5,6% en octobre selon Kantar), c'est bien le même gâteau évalué par l'institut IDC à 180 millions d'euros à l'horizon 2015 (contre 60 millions aujourd'hui) qui est visé. La Place Media en veut le quart. Audience Square se contente d'indiquer qu'il entend amener «60% de croissance» sur l'ad exchange à ses éditeurs.


Selon Emarketer, une bannière sur quatre sera achetée en 2015 en «real time bidding» (RTB), ce système d'enchères en temps réel qui totalise déjà 13% du display aux Etats-Unis. La Facebook Exchange, lancée en juillet, a multiplié par quatre le nombre d'impressions quotidiennes disponibles pour les porter à 7 milliards par jour. Yahoo, qui a mis en place sa «Right media exchange» depuis 2005, commercialise une grande partie de ses inventaires invendus en France depuis 2010.

 

Avec 12 à 15 milliards d'impressions publicitaires par mois en France (sur 300 milliards dans le monde), le pure player estime à 20% la part de son chiffre d'affaires display réalisé via l'ad exchange. «On est en temps réel depuis mai 2012, souligne Brigitte Cantaloube, directrice générale de Yahoo France. Tout notre inventaire est disponible en RTB, mais celui-ci ne représente que 5% de la part d'ad exchange, sachant que toutes les agences n'achètent pas en RTB en raison des développements technologiques nécessaires de part et d'autre.»


Orange, qui a repris depuis cet été la technologie App Nexus, comme Audience Square, compte aussi démarrer à partir de décembre son ad exchange en temps réel. «Avec 27 millions de visiteurs uniques et 7 milliards de PAP (pages avec publicité), ce sera l'occasion de revaloriser nos inventaires, souligne Sophie Poncin, directrice générale de Orange Advertising Network. Nous, nous connaissons notre abonné et nous avons de la data importante. On sait comment transformer nos PAP.»

 

Au profil socio-démographique s'ajoute une approche géo-marketing par type d'habitat, ainsi que comportementale, à partir des données de navigation et du moteur de recherche, fort de 80 millions de requêtes par mois. Propriétaire de ses données, Orange entend ainsi établir un modèle prédictif et transparent qui le distingue des ad networks (Specific Media, Adconion...) coupable à ses yeux d'engager les prix dans une spirale déflationniste. Erik-Marie Bion, son homologue à Microsoft, souligne aussi que l'ad exchange est une opportunité de marque: «On est dans un univers propriétaire avec une transparence sur les prix et les endroits où l'on passe.»


Reste que le RTB, qui devrait passer de 6 à 10% du display en 2013, implique de la désintermédiation et de l'automatisation. Selon Didier Beauclair, directeur médias de l'Union des annonceurs, cela n'est pas sans conséquence: «Les ad exchanges ne font pas exception à la loi Sapin. Même si le prix peut être élaboré de façon différente, le statut de chacun des intermédiaires doit être clair: acheteur ou vendeur, il faut choisir son camp. La recommandation doit être neutre, et sans ambiguïté, en fonction des seuls intérêts de l'annonceur.» En clair, ne pas jouer sur les deux tableaux.

 

Selon Luc Tran Thang, président de Starcom, les places de marché médias en tireront profit à condition de ne pas limiter les transactions à des invendus à faible valeur: les technologies d'optimisation via l'ad exchange permettent de vendre des espaces premium deux à trois fois plus cher aux Etats-Unis...

 

Encadré

 

Yahoo connecte le consommateur

 

En croisant sa base mail avec les 200 000 utilisateurs de la carte de fidélité Carrefour, Yahoo vient d'importer en France son programme «consumer connect». Pendant un mois, le groupe étudie les comportements en ligne des clients du distributeur et définit des "sosies", des profils sur Internet ressemblant aux comportements d'achats de la base de Carrefour. Avantage: offrir un ciblage sur Internet à partir d'un fichier de clients enrichi par la base de données de Yahoo (recherche, bannière, mail...). En Grande Bretagne, 30% de ventes supplémentaires auraient été enregistrées en magasins dans le deux mois, avec 3,5 livres de retour sur investissement (4,35 euros) pour 1 livre investie (1,24 euro) sur Yahoo.

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