En 2012, Audrey Pulvar a fait ses adieux au 6/7 de France Inter en mai, à l'émission On n'est pas couché de France 2 en juin, avant de prendre la tête des Inrocks en juillet. Ce qui a suscité une polémique fin août, le mandat de la Banque publique d'investissement ayant été attribué à Mathieu Pigasse, propriétaire de l'hebdo, par le ministère de l’Économie, sous la tutelle duquel exerce son désormais ex-compagnon Arnaud Montebourg.
En octobre, elle défilait dans une robe en chocolat au Salon du chocolat. En novembre, elle embrassait à la télévision une chroniqueuse de D8, chaîne sur laquelle elle officie depuis la rentrée, aux côtés de Laurence Ferrari et Roselyne Bachelot. Le 18, elle annonçait à l'AFP sa rupture avec Arnaud Montebourg. Point final d'une année éprouvante pour la flamboyante éditorialiste, qui dégainait jusqu'alors le regard courroucé lorsque l'on évoquait sa vie privée - «Je parle en tant que femme indépendante», a-t-elle maintes fois répété.
«Elle ne va pas forcément chercher le compromis», convient Pierre Siankowski, rédacteur en chef des Inrocks. Un peu bling-bling et très de gauche, ancienne compagne de ministre et journaliste, elle n'aime pas choisir; sur ce dernier point, «contrairement à d'autres, elle ne s'est pas écrasée», note Pierre Siankowski. Pour se défendre, elle attaque, au risque de perdre, comme ce 9 février au cours duquel la justice rejette sa poursuite en diffamation du site Backchich, auquel elle réclame 12 000 euros de dommages-intérêts (oh! le prix de ses lunettes, selon Technikart). Pour un article affirmant qu'elle se trouvait avec Montebourg au siège du Parti socialiste, le soir du second tour des régionales, en 2010.
«Pourquoi elle dérange?» Le dossier prémonitoire que Les Inrocks lui consacre en mars dépeint une bosseuse, très à gauche intrinsèquement, plutôt froide. L'auteur du texte, Marc Beaugé, quittera le journal peu de temps après son arrivée, comme Thomas Legrand, Bernard Zerki et Arnaud Aubron. «Elle est assez sympa», assure cependant Pierre Siankowski, qui, lui, a «accepté le package Audrey», avec ses excentricités «et son petit dalmatien Gaufrette».
Ceux qui sont restés louent, comme beaucoup d'anciens collègues, son côté travailleuse, professionnel, accessible; même du temps de son histoire avec le ministre, elle ne censurait pas. «Tu peux lui reprocher de tweeter plus vite que son ombre, de mettre une robe en chocolat, de faire des émissions sur D8, mais tu ne peux pas lui reprocher de ne pas être une vraie journaliste. Lorsque les politiques qu'on interroge veulent relire les interviews, elle leur dit: "Il y a des choses qu'on ne changera pas, vous l'avez dit". Elle a tenu des positions comme ça, avec Duflot ou Filippetti», affirme encore Pierre Siankowki.
Au moment des manifestations contre la réforme de l'audiovisuel public, Audrey Pulvar, alors présentatrice du journal de France 3, était descendue dans la rue: «On est devenu amis en raison de son professionnalisme et de ses engagements, raconte Jean-François Téaldi, leader SNJ-CGTde l'époque. Pour moi, qui suis dans la boîte depuis plus de trente ans, c'est l'une des meilleures journalistes qu'on ait eu, à cause de ses interviews qui décoiffent, de ses excellentes questions. Après son départ, je ne regardais I-télé que pour elle.» A France 3, selon lui, «elle était très appréciée. A son pot de départ, plein de gens pleuraient». La belle époque!
Est-elle si «mal barrée» aujourd'hui, comme elle l'affirmait récemment à GQ? Phrase qu'à la rédaction des Inrocks, on «n'a franchement pas compris», d'ailleurs. La paradoxale Audrey Pulvar, la lettrée de D8, la fan de Brassens des Inrocks, la journaliste de talent rongée par son double people, a encore les moyens de prouver le contraire.
