L'actu vue par
Thierry Mandon, directeur de la publication d’Ebdo, ex-secrétaire d’État à la Réforme de l’État revient pour Stratégies sur l'actualité de ces dernières semaines comme la crise de Lactalis, la neutralité du net, la tribune du Monde signée notamment par Catherine Deneuve....

Le lancement et l’accueil d’Ebdo, journal sans publicité

Ce n’est pas par idéologie anti-pub envers un secteur dont j’apprécie, par ailleurs, le côté créatif. Mais nous savons que sous la contrainte publicitaire, les éditeurs de presse ont dérivé vers des catégories socio-professionnelles +++. Or, notre pari est de rouvrir l’accès à l’information à un public très large. En outre, c’est plus facile d’aller dans l’investigation quand vous n’êtes financés que par vos lecteurs. On voit très bien les difficultés que l’on aurait avec la SNCF, un des premiers annonceurs de France, après notre enquête sur les accidents de passages à niveau. Pour ce qui est de l’accueil d’Ebdo, il y aura à l’évidence un succès sur le numéro 1. Nous avons des remarques de lecteurs qui jugent ce journal innovant dans sa forme et dans son contenu, et plutôt du côté du lectorat qu’on recherche. Du côté des professionnels, je note la volonté de saluer le format, l’objet, les photos…. Notre dimension pédagogique intéresse, même si certains auraient voulu qu’on soit plus musclé. Enfin, pour le modèle économique, il y a ceux qui y croient et ceux qui nous souhaitent bonne chance.

Presstalis qui pourrait augmenter le prix de vente des journaux pour sauver la distribution

La question de la distribution de la presse appelle une réflexion structurelle. Elle ne porte pas tant sur les mesures d’urgence à mettre en place que sur la façon dont on rebat les principes d’un système qui n’est pas viable. Il s’agit de voir quel modèle peut fonctionner durablement. Rien ne serait pire qu’un énième plan d’urgence.

Facebook revoit son algorithme pour privilégier les amis et la famille au détriment des médias et des marques

Ce n’est pas une surprise. C’est la stratégie prévisible de ces groupes. Ils s’acheminent vers une forme de solvabilisation de leurs prestations. Pour ce qui nous concerne, le numérique est présent à travers une animation éditoriale qui doit ramener l’internaute vers le papier. Par équité envers ceux qui créent de la richesse, on ne comprendrait pas qu’un grand opérateur comme Facebook soit dispensé de l’impôt. Le temps du bonheur fiscal par le contournement et l’optimisation des règles est terminé.

La crise de Lactalis et la communication du fabricant comme des distributeurs

On voit là toute la difficulté à faire exister un juge de paix indépendant. Longtemps, ce rôle était rempli par l’État quand celui-ci était équipé pour faire des contrôles. La question est maintenant de savoir comment restituer un régulateur, une capacité d’arbitrage. Autrement, bonjour pour savoir qui a fauté dans cette affaire ! Chacun y va de sa com de crise sous forme de mistigri qu’on se renvoie à grande échelle sur le mode « c’est pas moi, c’est l’autre » !

François de Rugy propose d’inscrire dans la constitution la neutralité du net

Le principe d’un accès libre et illimité à internet, pour les petits comme pour les gros, est une excellente idée. Mais il mérite une vraie étude d’impact avant de l’inscrire dans la constitution. Peut-on décider dans notre coin que le net sera neutre en France ? Quelle sera notre capacité de mise en œuvre face aux États-Unis ? L’inscription constitutionnelle ne doit pas devenir un principe d’affirmation politique.

La polémique à la suite de la parution dans Le Monde de la tribune des 100 personnalités, dont Catherine Deneuve

Il faut arrêter avec la police de la pensée ! Je ne suis pas d’accord avec le texte qui a des formulations excessives et va un peu vite par endroits. Mais chacun a le droit de dire ses convictions et je reconnais le droit de dire des bêtises !

Aude Lancelin dénonce le système médiatique dans son livre, La pensée en otage, en affirmant que « tout est fait pour que les points de vue dérangeants soient marginalisés »

Le risque n’est pas tant la marginalisation que l’interdiction des propos dérangeants. La question de l’indépendance des médias est un vrai sujet. Quand de grands propriétaires et des annonceurs contrôlent des médias mainstream, cela peut contribuer à réduire le champ des débats tolérables. 

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