Numérique
Financer ses contenus grâce à la puissance de calcul des ordinateurs de ses lecteurs, c’est le pari fou qu’ont tenté des sites comme Streetpress en France et Salon.com aux Etats-Unis. Explications.

Connaissez-vous le minage de cryptomonnaie ? Derrière ce terme un peu barbare se cachent des monnaies décentralisées qui reposent sur la blockchain et dont la plus connue est le Bitcoin. Chaque transaction est tracée et vérifiée, ce qui nécessite des millions d’ordinateurs pour effectuer l’ensemble des opérations. D’où l’apparition de sociétés spécialisées dans le minage de cryptomonnaies, comme Coinhive ou Moonify, qui proposent aux éditeurs de sites internet, notamment médias, de gagner de l’argent en mettant à disposition la puissance de calcul des ordinateurs de leurs lecteurs. C’est ainsi que le site français Streetpress a lancé un test fin 2017 autour du minage de Monero, une cryptomonnaie bien plus accessible que le Bitcoin.

Un bilan maigre

« Ce test a été mené dans une réflexion plus globale autour du financement de notre média par la communauté sans fermer l’accès aux contenus. Dans un contexte de prolifération des fake news, il serait dangereux que les “true news” ne soient accessibles que derrière des paywalls », explique Johan Weisz-Myara, fondateur de Streetpress. Le bilan est maigre : en une semaine de test, les quelques centaines de milliers d’internautes qui se sont rendus sur le site ont permis à Streetpress de gagner seulement… 5 euros ! « Cela semble difficile pour un média de se financer par le minage de cryptomonnaie, d’abord parce que cela demande beaucoup de puissance de calcul pour avoir un bon rendement et, pour le lecteur, ce n’est pas gratuit puisque plus son ordinateur monte en cadence, plus il consomme d’électricité », souligne Julien Cadot, rédacteur en chef du site Numerama.

Aux États-Unis, le magazine en ligne Salon.com a lancé en février dernier un test similaire, cantonné aux utilisateurs d’adblockers. Puisque ceux-ci bloquent l’affichage des publicités sur lequel repose le financement du site, il leur est demandé de « rémunérer » les contenus en mettant à disposition la puissance de leur ordinateur qu’ils n’utilisent pas, essentiellement celle de leur carte graphique. « Rien ne sera installé sur votre ordinateur et Salon n’aura jamais accès à vos informations personnelles, ni à vos fichiers », précise le site, qui, comme dans le cas de Streetpress, a prévenu ses internautes. D’autres sites l’ont fait sans le dire, d’autres encore ont été piratés, le minage permettant alors de rémunérer non pas l’éditeur du site mais une autre société.

« Plus que les médias, le secteur des jeux vidéo semble plus propice à ce type de modèle puisque les temps de connexion sont beaucoup plus longs (parfois 11 heures de jeu) et les machines des gamers beaucoup plus puissantes », note Johan Weisz-Myara. Pour Jean Offman-Oulhiou, fondateur de la start-up montpelliéraine Moonify, c’est surtout le minage de crypto-monnaie via les applications mobiles qui pourrait faire décoller le marché car il permet de gagner beaucoup plus. Reste à voir quel sera le degré d’acceptation des utilisateurs en ces temps troublés autour des données personnelles.

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