Social media
Laurent Busca qui a axé ses travaux de thèse sur le social media management. Avec une question centrale : les community managers sont-ils efficaces ?

«J’ai fait ma thèse sur le social media management, ses pratiques routinières et les manières dont elle façonne les marchés. Ces pratiques ont des conséquences sur eux sans forcément que ce soit intentionnel. En termes de social media management, nous ne disposons pas d'indicateurs réels. En revanche, on mesure des indicateurs artificiels comme l’engagement, qui correspond aux likes et commentaires sur la publication, en somme toutes les actions sur le post. On peut aussi mesurer le nombre de personnes atteintes : des milliers de publications passent sur nos fils d’actualités. Pour autant, on ne sait pas si elles ont généré une meilleure appréciation de la marque...

 

Un taux de rebond sous-employé

Enfin, on peut quantifier le trafic web: les clics qu’on fait sur la publication. L'indicateur n'est pas représentatif: 60 à 90% du prétendu trafic volontaire est involontaire. La plupart des gens ne font pas exprès d’ouvrir la publication. Souvent, ils ont cliqué dessus car elle prend trop de place sur la page! Quant aux jeux-concours, ils provoquent un très fort engagement sur les réseaux sociaux mais cela n’est pas représentatif d’une adhésion envers la marque. 

À partir de là, comment mesurer l'efficacité des community managers sur la marque? Les directions marketing se félicitent des résultats obtenus par ces derniers. Tant que les indicateurs comme l’engagement, les personnes atteintes ou le trafic web sont dans le vert, tout va bien. Mais les community managers devraient également mesurer le taux de rebond: c’est-à-dire le temps passé sur la publication qui montre une véritable adhésion à la marque. Quand les community managers sont en CDI dans l'entreprise, ils se trouvent souvent en bas de la hiérarchie et n’ont donc aucune influence sur leurs supérieurs. Les rapports sont donc le plus souvent inexistants entre les dirigeants et les community managers. Cela n’a rien à voir avec un effet générationnel à proprement parler mais plutôt avec la définition du marketing, laquelle ne tient pas encore assez compte du social media management. Du coup, on se retrouve avec des community managers qui sont obligés de se légitimer en tant que profession. Pour cela, le community manager va booster les indicateurs d’engagement sous la bienveillance de leurs supérieurs. Chacun se croit ainsi gagnant.

 

Relation client et ethnographie

Pourtant, le community manager est mal employé et devrait être mieux intégré dans le processus du marketing de la marque. Il a un rôle dans la relations clients et aussi un rôle d'ethnographe. Grâce aux commentaires des internautes, et des intuitions qu’il développe à force de côtoyer sa communauté, il peut renseigner les directeurs marketing. Pour que la stratégie des community managers gagnent en efficacité, il s'agit donc que la direction adopte une politique volontariste visant à réellement intégrer ses praticiens du social media management.»

Le prof :

Laurent Busca, enseignent de marketing digital et statistiques à l’Université Toulouse Capitole 1. Ces travaux se concentrent principalement sur le social media management et notamment le rôle des community managers. Membre de l’Association française de marketing et de l’Académie européenne de marketing, il a animé de nombreuses conférences pour les deux organisations. Il a également participé à l’organisation de la journée toulousaine de marketing et écrivait des articles pour le blog dédié à l’événement.

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