Presse
Finie l’époque des sites de presse criards sans lien avec les codes du journal. Aujourd’hui, unifier le design print et digital de sa marque est la priorité des quotidiens nationaux. En un an, les quatre plus grands auront fait leur révolution. Décryptage.

Pas un grand quotidien national qui ne fasse sa mue digitale depuis quelques semaines. Avec l'érosion des ventes au numéro, tous ont à coeur d'offrir (enfin) une expérience digitale à la hauteur de la qualité de leur offre éditoriale, en conjuguant technicité, expérience utilisateur et design, comme on parlait fond et forme avant l'ère du numérique. 

Un Monde unifié sur le numérique
Oubliée la version abonnés et non abonnés de 2014. Le journal du soir a refondu son offre en novembre dernier : « Les deux sites qui nous avait permis de nous développer étaient devenus une contrainte avec la gestion avec deux Home, notamment sur le mobile, explique Jérôme Fenoglio, le directeur du quotidien Le Monde. Notre plateforme unifiée a créé un effet de boost, avec un presque doublement des nouveaux recrutements d’abonnés mensuels, de 8 000 à 14 000. Nous atteindrons bientôt 200 000 abonnés numériques ». Le design de ce nouveau site a été piloté par Melina Zerbib, ex-directrice artistique du site qui inaugure le poste de directrice du design print et numérique : « Nous voulions une fonction unifiée pour une pensée homogène de notre image » souligne le directeur. « Outre développer les performances de chargement des pages, nous avons affirmé l’unicité et la force de la marque Le Monde sur le web » souligne Melina Zerbib. Soit l’adoption du logo unique (et non plus Lemonde.fr), de la charte graphique et du code couleur bleu du print sur tous les supports. Prochain chantier ? L’appli pour la fin 2019.

Des abonnés aux Echos moins exposés à la pub
Les Echos proposent une « nouvelle expérience digitale » dixit Pierre Louette, son président. « Nous avons valorisé l’expérience utilisateur pour refondre le front et le back office », explique Bérénice Lajouanie, qui a piloté ce projet sur dix-huit mois avec un budget de 2 millions d’euros. L’objectif ? « Proposer une simplicité d’utilisation proche de celle des plateformes de vidéo et de musique, avec une fluidité de navigation (et un sommaire possible en vignette) et une performance de chargement de page (divisés par 5) » explique Thomas Karolak, directeur du numérique. Deux sites coexistent, l’un « prospect » (80 % des visites) pensé comme un fil de réseau social et l’autre, très élégant, dédié aux abonnés (20 % des visites). 48 000 clients sont abonnés au numérique contre 41 000 au print. Le choix d’un seul encart publicitaire premium à droite sur le site abonné vise à laisser toute sa place au contenu éditorial, épuré. Les chapos sont les résumés des articles, pour optimiser le temps de lecture. Le tout placé sous le signe de l’épure avec les codes du print adopté sur le web (portraits au crayon) tandis que le journal propose « des ouvertures plus forte dans chaque section y compris en une, avec la suppression de la colonne de gauche» souligne Nicolas Barré, le directeur de la rédaction.
Le Parisien/Aujourd’hui en France façon Washington Post
Seul journal européen à avoir acquis Arc Publishing, le CMS développé pour le Washington Post, le Parisien/Aujourd’hui en France peaufine sa mue print et digitale. Prouesses technologiques « avec un temps de chargement de pages divisé par 4 » se conjugueront avec élégance graphique. « Et l'on verra l’adoption d’une typo très lisible, plus proche de celle du print, explique Sophie Gourmelen, directrice générale du journal. Les valeurs de la marque : proximité, accessibilité, simplicité, journalisme de solution et détection des signaux faibles seront affirmés sur le digital. Avec trois axes : l’info locale (via la politique locale, l’immobilier, l’emploi et la mobilité), l’engagement citoyen (via le pouvoir d’achat, la consommation, la fiscalité, l’environnement, le mieux vivre et la santé, et un guide des écrans). Le troisième axe sera l’enquête et le récit, renforcés sur le digital ». Trois newsletters seront inaugurées : Loisirs en Île-de-France, Pouvoir d’achat et PSG. L’agence américaine Area 17 épaule le titre en design avec l’envie de faire la part belle aux visuels, au motion design, à l’infographie et la data. À voir avant l’été.
Le Figaro vers un nouvel horizon
« Le design est une problématique majeure de notre projet Horizon, qui prévoit la refonte du back et du front office du Figaro.fr en un seul site mêlant offre gratuite et payante » explique Bertrand Gié, directeur délégué du pôle News. C’est l’image que l’on renvoie de notre marque, avec le premier site d’actualité en France depuis plus de dix ans, avec 23,5 millions de visiteurs uniques mensuels ». Le projet entend accentuer l’efficacité du paywall, l’efficacité publicitaire et le chargement des pages (comme ses concurrents) et proposer une expérience utilisateur « qui doit être la plus exceptionnelle possible, poursuit-il.  L’UX design (user experience design) est un mixte de plusieurs critères : la beauté du produit, sa cohérence avec les valeurs de la marque, l’intuitivité et la fluidité de son fonctionnement. Il faut que l’internaute ait envie de bondir d’articles en articles tout en respectant nos contraintes publicitaires » souligne l’ancien directeur des médias numériques du groupe. Un directeur artistique et trois designers se concentrent sur ces problématiques. L’offre devrait être proposée pendant l’été.

L'appli très sélective de Télérama

 

Lancée le 5 avril, la nouvelle application de Télérama est garantie à 100 % sans filtre algorithmique. En témoignent ses entrées « notre sélection » ou « nos listes » qui mettent en avant les programmes ciné et TV et reflètent les choix de la rédaction. Tous les soirs, donc, l'internaute se voit proposer un contenu gratuit, délinéarisé (Netflix), YouTube, replay ou offert aux abonnés via un partenaire (Canal VOD, e-cinema, Tënk, Spicee, Bref, Mui...), soit 300 films par an. Une appli « cousue main » qui vise à passer de 2000 à 100 000 abonnés numériques ( à 6,90 euros par mois)  en cinq ans. Pour l'occasion, les contenus payants du site passent de 10% à 30%. Objectif : convaincre les 30-45 ans qui « commencent à moins lire la presse », selon la directrice de la rédaction, Fabienne Pascaud. Cette génération a « plus envie de plaisir que les lecteurs cinéphiles classiques », observe-t-elle. D'où la volonté de lui proposer des « choses excitantes et plaisantes », et « pas forcément un documentaire sur les prisons en Iran ». Interstitiels et format parallax [fond d'image ralenti lors du scroll] sont prévus côté pub.

AdR

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