Tribune
La violence liée aux réseaux sociaux, sous toutes ses formes, constitue une menace. Comment éviter le pire pour ne garder que le meilleur de ces médias ?

Sur les réseaux sociaux, on peut être acteur ou observateur. Quand on y fait de la politique, on ne peut pas être placé sur le même plan que les personnes qui souhaitent simplement partager des connaissances ou une passion. Les premiers cherchent à promouvoir ou tester des idées, à susciter le débat. C’est ce qui arrive en fonction de la qualité des réflexions, du niveau de provocation réel ou perçu. Les seconds sont dans une démarche supposée moins clivante, à la recherche d’un dialogue avec une communauté d’intérêts ou d’initiés. Dans les deux cas, les auteurs ont en commun de prendre un risque, celui de s’exposer. Sans en avoir toujours bien conscience, chacun peut se retrouver la cible d’un tribunal populaire, avec pour règles la violence de l’invective et des commentaires défoulatoires, qui peuvent l’emporter sur la raison, la courtoisie, et même la loi.

On réalise alors que toute idée ou action est sujette à controverse, à polémique ; que surgissent facilement des ennemis qui ne connaissent rien de vous ; et qu’ils peuvent déverser sur vous une haine effrayante, parfois doublée de harcèlement, avec une violence inouïe, faisant de vous la cible d’une foire où l'on acclame celui qui cogne le plus fort.

Il n’est pas forcément question d’activistes ou de militants très engagés, mais de personnes hystérisées, seules devant leur écran, parfois déconnectées des sujets qui ne les concernent même pas. Il peut s’agir de jalousie du succès ou de la visibilité d’une personne ; il peut aussi s’agir de l’association de deux biais cognitifs : l’erreur fondamentale d’attribution (juger sans savoir) et l’auto-complaisance (moi j’ai le droit), qui autorisent certains à donner des leçons ou à se transformer en justiciers autoproclamés du web.

Pas de liberté sans prise de conscience

Il est donc nécessaire de rappeler des évidences : si chacun a le droit d’émettre des avis, dans le respect de l’autre et les limites de la légalité, chacun a également le droit de ne pas vouloir en prendre connaissance ou y répondre. Il faut prendre conscience de cette liberté dont on ne saurait être privé, afin de pouvoir se soustraire à l’aspect parfois très négatif, voire dangereux, des réseaux sociaux. Ces réseaux ne sont pas des espaces qui nous obligent à subir ce que d’autres voudraient nous imposer. Nul n’est contraint d’échanger avec un autre s’il ne le souhaite pas.

Ne nous rendons pas complices de la tyrannie des réseaux sociaux, en légitimant certains travers, en nous y soumettant, en alimentant les propos malveillants, en reprochant aux autres leur manque d’exemplarité, quand nous pourrions en manquer nous-même, confortablement abrités derrière l’écran d’un smartphone. À celui qui se sent agressé, à celle qui se sent perturbée sur les réseaux sociaux, il n’y a donc pas d’obligation à subir, à se soumettre, encore moins à souffrir.

Il n’est pas obligatoire d’ouvrir sa communauté à des inconnus, ni d’en maintenir l’accès à des personnes nuisibles. Surtout, il est autorisé et recommandé d’avoir recours à la fonction «bloquer» pour ne plus être en lien avec des personnes qui ne vous respectent pas. N’oublions jamais que chacun est responsable de son exposition sur le web, et de ce qu’il accepte de supporter ou pas. On peut limiter son exposition et sélectionner ses contacts, afin de ne pas s’installer durablement dans un environnement virtuel dont les bienfaits peuvent être aussi importants que les méfaits redoutables.

 

Frédéric Fougerat a publié l'ouvrage Un DirCom n’est pas un démocrate, aux éditions Bréal.

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