Dossier Presse magazine

Pour séduire les annonceurs, malgré la baisse des ventes, les éditeurs de presse magazine font valoir la portée de leurs marques en incluant les canaux numériques. Un article également disponible en version audio.

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Moins de lecteurs papier, plus de consommateurs de contenus : voilà en résumé la situation des marques de presse magazine. Celles-ci ont enregistré une nouvelle baisse de leurs ventes en 2022, de 5,4 % sur un an, à 709 millions d’exemplaires vendus, selon les données de l’Alliance pour les chiffres de la presse et des médias (ACPM). Interrogé sur le déclin de leur diffusion payée, Stéphane Bodier, directeur général de l’ACPM, se montre prudent : « La baisse des ventes dépend des titres. Certains sont en croissance comme le magazine L’Équipe, M le magazine du Monde, Le Point, Côté Maison ou encore Dr. Good ! »

Lecture sur mobile

Le paradoxe est que si la diffusion payée des magazines se réduit d’année en année, les titres de presse qui ont pris le virage du numérique voient leurs audiences croître. En effet, les Français lisent, pour 96 % d’entre eux, la presse chaque mois. Et deux lectures de la presse sur trois se font sur des écrans, le mobile étant le device le plus utilisé. « Sur les canaux digitaux, le nombre de lecteurs est en très forte augmentation, confirme Stéphane Bodier. Certaines marques comme Marie Claire, Biba, Madame Figaro et Vogue ont vu doubler, voire tripler, leur lectorat en l’espace de dix ans. »

Par la voie du numérique, les magazines peuvent toucher plus de monde, notamment en raison de la gratuité d’une partie des contenus. C’est le cas par exemple de Madame Figaro, qui a ouvert en février 2022 un compte sur TikTok. Un an plus tard, le magazine féminin y compte plus de 470 000 abonnés. La présence sur le réseau social chinois permet à la marque d’atteindre une cible plus jeune, en l’occurrence les 15-24 ans, une audience complémentaire du print, qui s’adresse avant tout à des femmes CSP+ de plus de 40 ans.

Stéphane Bodier remarque qu’il y a de plus en plus d’expertises marketing au sein des régies pour concevoir des produits d’audience, avec une facilité de mise en œuvre pour les acheteurs. D’ailleurs, face à la puissance publicitaire des Gafam, il note que les régies s’allient, notamment sur le secteur alimentaire. On peut citer Food Brand Trust des régies de Reworld Media, Prisma Media et CMI, ou encore Impact For Food d’Uni-Médias, Bauer Media, Bayard et du groupe Marie Claire. « Le principe est de concilier la qualité du contexte, que ce soit sur le digital ou le print, et les mesures d’efficacité », ajoute le directeur général de l’ACPM.

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À Prisma Media, qui édite des titres comme Femme Actuelle, Télé Loisirs, Capital, Ça m’intéresse ou encore la version française de Harper’s Bazaar (lancée en février 2023), plus de 70 % du chiffre d’affaires est réalisé hors print. « Souvent, on nous considère comme une régie presse qui fait du digital alors que nous sommes une régie digitale qui fait de la presse », rétablit Charles Jouvin, directeur délégué marketing, études et communication de Prisma Media Solutions.

Mais la monétisation des bonnes audiences de la presse magazine sur le digital n’est pas toujours au rendez-vous. Cela tient principalement à des habitudes d’achat que Charles Jouvin juge « très silotées ». « La réalité média est allée très vite en termes d’audience sur le digital, mais la réalité d’achat média est plus lente car il y a derrière des organisations aux schémas et metrics encore très classiques », résume-t-il. « Côté agence média, ce ne sont pas les mêmes équipes qui prennent en charge l’achat d’espaces sur le digital et sur le print car ce ne sont pas les mêmes plateformes d’achat, ni les mêmes KPI, et donc pas les mêmes évaluations dans le média planning », éclaire François Liénart, directeur data et insights à Cospirit Groupe.

De plus, l’achat média sur l’un ou l’autre des supports ne répond pas aux mêmes objectifs. Le print est privilégié pour les campagnes d’image, le digital, pour des campagnes marketing produit. Et, en termes de ciblage, « en presse, on est sur un critère sociodémographique tandis qu’en digital, on est sur un critère conso, voire intentionniste », ajoute François Liénart. Les agences médias raisonnent aussi en fonction du budget, le digital étant moins cher. « Une page de publicité dans un magazine peut s’élever à 10 000 ou 15 000 euros. Or, pour qu’un plan presse soit efficace, une seule parution ne suffit pas », commente Sophie Dando, directrice générale média associée de Big Success.

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De l’avis de plusieurs professionnels, les régies auraient particulièrement du mal à vendre la vidéo, et ce, bien que le format soit considéré par Sophie Dando comme celui qui « fonctionne le mieux » en termes d’efficacité publicitaire, « particulièrement si la vidéo est intégrée au milieu d’un article sur un site de presse ». Pour convaincre de la puissance du média face à la télévision, les régies Media Figaro, Prisma Media Solutions et 366 sont partis à l’offensive avec la création, en 2021, d’un inventaire vidéo commun baptisé Video Impact for Brands. Une initiative qui rejoint le vœu de « total vidéo » de Médiamétrie, qui prévoit de comptabiliser les non-équipés de téléviseurs (mais bien équipés de smartphones) à horizon 2024.

 

L’efficacité publicitaire des versions numériques

Les ventes de magazines en version numérique ont augmenté de 15,3 % en 2022, selon l’ACPM, à 116 millions d’exemplaires. En novembre, Les Échos-Le Parisien Médias, M Publicité et Media Figaro ont publié une étude, réalisée par OpinionWay, pour démontrer l’efficacité publicitaire des versions numériques de leurs magazines Le Parisien Week-end, Les Échos Week-end, M le magazine du Monde, L’Obs, Le Figaro Magazine et Madame Figaro. Il en ressort que le temps de lecture moyen des versions numériques : 26 minutes. « Les valeurs de la marque se transfèrent du print vers le digital », constate Aurore Domont, présidente de Media Figaro et directrice engagement et RSE du groupe. Sur les deux supports, le taux de mémorisation des campagnes de publicité est identique, y compris pour les doubles pages et la quatrième de couverture. Pour 74 % des lecteurs interrogés, la publicité dans la version numérique donne une image positive de la marque ; pour 52 %, elle leur « donne envie d’en savoir plus ».

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