Améliorer les services existants ne suffit plus. Pour être disruptif, il est urgent de dégager du temps et de la matière grise afin de penser l'idéal. Sans craindre l'échec.

Nos grandes entreprises ont toutes été forgées par la culture de l’optimisation. La culture des «Big 5» du consulting, la culture du benchmark. Ce qui a marché ici marchera là.

On a optimisé les rendements des rotatives et des rédactions, mais on n’a pas prévu qu’on s’informerait sur Twitter ou via News Cred. On a optimisé les pages des 3 Suisses, les rayons et les stocks des magasins, mais on n’a pas prévu l’ergonomie d’Amazon. On a optimisé les coûts de grille des chaînes de télévision et standardisé les émissions, mais on n’a pas prévu Makers Studio ou Awesomeness TV, qui font réaliser leurs programmes par leur communauté. On a optimisé les coûts d’usage des voitures, mais ni McKinsey ni le BCG n’ont pu prévoir Autolib ou Uber.

A une époque où l’heure d’un maxicalculateur digne du Centre d’études atomiques coûte le prix d’un jean, on assiste à la rencontre explosive de deux mondes. Le monde de l’optimisation et le monde de l'idéal. «Quel est le produit ou le service le plus génial que je pourrais proposer?»: cette question pourrait paraître naïve si elle ne sortait pas de la bouche du fondateur de l’une des premières capitalisations mondiales, Steve Jobs.

Tester, rater, apprendre.

La force de la page blanche, ou de la crise profonde, c’est qu’elle cherche le produit idéal. «Idéalement j’aimerais…» Sans acquis, c’est vrai, mais surtout sans entrave et dans un monde de capitaux abondants et aux barrières à l’entrée beaucoup plus faibles.

Pour autant, il y a encore du monde dans les magasins, dans les concessions automobiles; on lit encore son journal préféré au bistrot ou au bureau; on est toujours heureux devant un bon show ou une bonne série, bien produite, à la télé. Jusqu’à quand?

Nous, chefs d’entreprise, et surtout nous qui les conseillons, devons impérativement inventer, à côté du management classique – faire mieux avec ce que l’on connaît –, le management de l’idéal. Nous devons professionnaliser l’imprévu. Recruter des profils différents – la patronne des technologies programmatiques chez Havas France est une ancienne «wedding planner» –, célébrer les enseignements des échecs et leurs auteurs, comme j’ai vu faire Yossi Vardi, le parrain des «venture capitalists» israéliens à Tel Aviv. Nous devons passer un jour par semaine à inventer les produits idéaux ou à rencontrer les start-up qui nous permettrons de le faire. Tester, essayer, investir, rater, apprendre.

Dans le groupe Havas Media France, par exemple, nous avons un idéal: délivrer pour nos clients uniquement des messages intéressants et adaptés à leur audience, au bon moment, au bon endroit. Parce que nous savons que cela crée de la croissance organique pour les marques. Et pour atteindre cet objectif, nous essayons de manager l’idéal. Bonne année 2015.

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