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Le spot «Les Blessés» de la Sécurité routière vient d’obtenir le Prix Effie dans sa catégorie [Communication publique et d'intérêt général]. Il montre le combat quotidien de grands blessés de la route. Maryse, Marius, Sébastien, Frank, Cyril, Alan et Aurélien sont filmés au cours de leur séance de rééducation, encadrés par leur thérapeute ou à leur domicile, au sein de leur famille.

A l’agence nous souhaitions nous placer au plus près de ces vies en reconstruction. Nous avons donc décidé de ne faire appel à aucun comédien. Aller à la rencontre des personnels hospitaliers, gagner leur confiance, rencontrer des grands blessés, leur expliquer notre projet, les convaincre de témoigner et d’impliquer leur entourage fut parfois bouleversant, toujours émouvant, mais cela nous semblait le préalable indispensable à cette démarche de vérité.

Dommage collatéral

Pour prouver que nous n’avions pas eu recours à la figuration pour évoquer les difficultés de la vie quotidienne de personnes handicapées, la Sécurité routière nous a demandé de préciser à la fin du spot que les sept témoins n’étaient pas des comédiens, mais bien de «véritables blessés de la route». J’ai trouvé cela étrange de devoir souligner ce qui m’apparaissait comme une évidence, mais je me suis rangé à l’avis de la Sécurité routière, qui ne voulait pas qu’on puisse imaginer qu’il s’agissait de faux témoignages, ce qui est trop souvent la norme dans les campagnes corporate.

Pour accréditer un argument de nature publicitaire (l’attachement des salariés à leur entreprise, la satisfaction des clients), il est en effet courant de faire appel à des salariés-témoins, des clients-témoins, qui sont en réalité des comédiens sans qu’aucune mention ne le précise. Je ne parle évidemment pas des œuvres de fiction où chacun comprend bien que les comédiens jouent un rôle de composition, mais de ces campagnes où l’on a recours au faux témoignage.

Code de déontologie

Alors que nous nous désolons, à raison, de la défiance du grand public à l’égard de nos métiers publicitaires, il faut ouvrir ce débat et, pourquoi pas, s’inspirer du code de déontologie des journalistes qui s’interdisent le faux témoignage ou qui font l’effort de préciser, le cas échéant, qu’il s’agit d’une reconstitution.

La publicité ne peut pas, sans dommage collatéral, emprunter les codes du documentaire et profiter de sa puissance d’évocation en s’affranchissant de ses règles de bonne conduite.

Et ne serait-il pas plus déontologique que ceux qui ont recours à des comédiens-témoins le signalent et non l’inverse? Il suffirait, dans une logique de transparence, d’inciter les agences et leurs annonceurs à préciser que les témoins joués par des comédiens sont inspirés par des personnages réels.

La publicité y gagnerait en crédibilité, en confiance et, surtout, en efficacité. 

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