Préambule nécessaire: cette tribune est uniquement consacrée à Trump en tant que marque. Trump, dont j’ai côtoyé les équipes et observé les méthodes lors de mon expatriation au Moyen-Orient.

Trump est une marque qui peut se targuer d’un nom phénoménal («atout» en anglais) et d’un fondateur aussi controversé que charismatique. On a dit que Trump se servait des élections pour faire fructifier ses marques. En fait, il a utilisé le pouvoir de sa marque pour gagner les élections. La présidentielle, c’est un combat de marques où le «personal branding» joue un rôle majeur. On se rappelle à quel point la marque Obama était puissante, en s’appuyant sur des valeurs claires, un discours puissant («yes we can») et des codes visuels facilement reconnaissables (dont la fameuse affiche Hope de Shepard Fairey).

Une marque de grande conso

A l'élection 2016, le combat des marques fut déséquilibré. Ce que la communauté des médias a sous-estimé, c’est la puissance de la marque Trump, en dehors de toute considération idéologique. Trump est caricatural, sa marque en est d’autant plus forte auprès des publics les moins instruits. Trump, c’est une marque de grande consommation. Ça fait quarante ans qu’elle est sur le marché et ça fait quarante ans qu’elle délivre la même promesse: «Je suis un type qui réussit ce qu’il entreprend.» Il vient d’en apporter une nouvelle preuve.

L’architecture de la marque Trump est monolithique: aucune tête ne dépasse, on ne voit que sa mèche. Quand j’étais à Dubai, le promoteur immobilier pour lequel je travaillais s’était associé à Trump pour faire un golf sous sa propre marque, Akoya. Notre intérêt était d’utiliser l’endossement de Trump pour faire décoller notre propre marque (exemple: Akoya Golf by Trump). La discussion a tourné court. Le projet s’est finalement appelé Trump International Golf Club - Dubai. Il nous a aussi fallu trouver un slogan pour les villas qui entourent le green. Le milliardaire n’a pas mis longtemps à choisir l’une de nos propositions, «The Meaning of Success». Ça vous rappelle quelque chose?

Chez Trump, toute la famille participe. Trump a ses marques filles, Ivanka en est la plus spectaculaire. Belle, talentueuse et beaucoup plus tempérée que son tribun de père, elle contrôle sévèrement son image. Nous avions dû retoucher dix-sept fois la photographie où elle posait sous son meilleur profil.

Toutes les extensions possibles?

Ce qui m’avait impressionné (soyons francs, totalement effaré), c’était la détermination de ses équipes, professionnelles, totalement dévouées à sa cause et à la philosophie du clan: une audace et une confiance démesurées que justifie la réussite. J’en étais arrivé à cette conclusion: la marque Trump est une marque «ingrédient» (un atout déterminant) qui garantit le succès du produit ou du service auquel elle est associée ou intégrée. Mettez du Trump dans l’immobilier, les médias, le luxe ou le sport, et ça marchera.

La marque Trump permet-elle toutes les extensions? Sa victoire aux élections américaines tenterait à le prouver. On peut tout faire avec du Trump.

Sauf que.

Sauf que nombre de marques ont échoué dans leur tentative d’extension parce que la promesse dont elle se prévalait se heurtait aux contraintes du marché ou parce qu’elles ont déçu leurs consommateurs. La marque Trump sera-t-elle crédible dans sa nouvelle extension (politique)?

Sauf que le danger de cannibalisation est réel. On dénonce déjà les conflits d’intérêts, à commencer par le Trump International Hotel, à seulement quelques encablures de la Maison-Blanche. Trump est-il prêt à se débarrasser de ses fleurons pour ne pas compromettre sa nouvelle ambition?

L’avenir nous dira si la marque Trump a dépassé les bornes en investissant un territoire qui lui est pour l’instant étranger: l’intérêt général.

 

 

 

 

 

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