Tribune
Un an après l'entrée en vigueur du RGPD, de nombreuses questions se posent pour les différents acteurs de ce marché. Comment booster l’obtention du consentement ? Peut-on imaginer des alternatives ? Le secteur doit poursuivre sa mue.

Il y a un an, l’entrée en vigueur du RGPD (Réglement général sur la protection des données), suivi des mises en demeure de la Cnil, est venu bouleverser un marché du drive-to-store qui connaissait un formidable essor (plus de 50 millions d’euros levés entre 2015 et 2018). 2018 a été une année d’incertitudes pour tout le secteur : quelles activités et quels process seraient interprétés comme étant conformes ou non aux exigences de la Cnil ? Quels changements devrait-on concrètement apporter ? Quel impact ces changements auraient-ils sur le marché ? Regagnerait-on la confiance des partenaires ? En bref, le secteur s’en relèverait-il ?

Un an plus tard, nous constatons finalement une baisse du taux de consentement (opt-in) de seulement 30%. Aujourd’hui, la croissance est repartie à la hausse, avec une confiance plus forte qu’avant le RGPD de la part des annonceurs, et avec une meilleure prise de conscience de la part des utilisateurs de ce que sont leurs données. C’est une bonne chose pour le marché qui a besoin d’avoir la confiance des utilisateurs pour assurer sa pérennité. Mais avec 30% de données - donc de revenus - en moins, et avec une expérience utilisateur sensiblement alourdie, plusieurs questions peuvent légitimement se poser et les évolutions ne font peut-être que commencer.

D'abord, comment booster l’obtention du consentement tout en offrant une bonne transparence et une expérience utilisateur de qualité ? Un nouveau challenge s’offre aux marketeurs et de bonnes pratiques commencent à voir le jour. Selon la façon dont le bandeau est formulé, le taux d’opt-in peut par exemple varier chez certains acteurs entre 50% et 80%. L’équilibre optimal entre expérience utilisateur et transparence reste donc à trouver. Être clair et concis, ne pas perdre l’utilisateur dans un flot d’information et de cases à cocher… Les deux niveaux de bandeau assurent une bonne transparence de l’information et garantissent à l’utilisateur un contrôle parfait de ses données.

Prise de conscience de la valeur de sa donnée

Une autre question se pose : comment améliorer l’expérience utilisateur aujourd’hui médiocre des consentements ? Quelle expérience propose-t-on aux utilisateurs pour faire mieux que ces innombrables bandeaux ? Il sera intéressant d’analyser d’ici quelques mois leur comportement par rapport à eux. Si l’utilisateur accepte ou refuse systématiquement de partager ses données, pourquoi ne pas proposer une interface unique pour lui permettre de donner ou retirer son consentement et de gérer l’ensemble des finalités ? Reste à savoir qui détiendrait la clé de cette interface, et si elle ne bénéficierait pas une fois de plus aux GAFA.

Enfin, est-il juste d’imposer une baisse de 30% de leurs revenus aux éditeurs d’application ? Pourrait-on imaginer des alternatives au consentement ? Cette question cruciale devra être abordée. Internet et la gratuité ont généré une série de nouveaux business modèles, notamment liés à la publicité et à la géolocalisation. La presse en ligne est peu à peu revenue à un modèle plus ou moins payant, les applications de streaming musical également, mais ces revenus suffisent-ils aux éditeurs ? Et qu’en est-il des autres applications ? N’ont-elles aucune valeur ? Est-il juste de devoir demander son accord à l’utilisateur pour pouvoir se rémunérer, tout en ayant l’obligation de lui offrir le même service quelle que soit sa réponse ?

Le RGPD permet à l’utilisateur de prendre conscience de la valeur de sa donnée. La prochaine étape conduira peut-être à une prise de conscience de la valeur du service proposé par les applications. Alors des alternatives verront peut-être le jour pour rééquilibrer le marché. Cela peut être d'accepter de partager sa data à des fins publicitaires, de refuser de la partager et donc d'être confronté à quatre, cinq ou dix fois plus de publicités non-ciblées (pour parvenir à un équilibre budgétaire), ou encore de refuser à la fois de partager sa data et d’être confronté à de la publicité, et donc de choisir de payer pour le service proposé. Pour que le RGPD ne profite pas qu’aux GAFA, le secteur va devoir poursuivre sa mue, accompagné par un législateur sensibilisé aux problématiques des « petits » acteurs. LE RGPD a eu le mérite d’ouvrir de vastes questions.



 

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