À l'heure des derniers préparatifs du SIEC, véritable mercato des offres des centres commerciaux pour les enseignes, il n'est pas inutile de réaliser un petit inventaire des «e-novations» supposées répondre à la baisse de fréquentation.

 

1. La fabuleuse histoire du «cross-enseigne»: des «market places» aux sites des centres commerciaux? Le site du centre commercial qui proposerait un assortiment des produits vendus par les enseignes qu'il abrite (pour trouver la fameuse petite robe noire) verra-t-il enfin le jour ? Il s'agit d'aller bien au-delà de la présentation séparée des catalogues des enseignes telle que l'internaute peut les trouver en surfant sur les sites de chaque marque, enseigne ou «market place». Ce site «cross-enseigne» pourra croiser et comparer les marques et les modèles, connaître la disponibilité en magasin de chaque référence, les prix, avec les offres spéciales du moment, et assurer la réservation en ligne. Le problème se corse pour l'habillement qui multiplie les références, un centre peut réunir avec ses enseignes plusieurs centaines de modèles de jeans: lesquels présenter ? Il semble impossible, de fait, de mettre tous les articles en ligne.

 

2. Où mènent les «drives» exactement ? Un point fort, l'existence physique du centre commercial, ce qui lui permet d'aménager un «drive» central multienseigne pour ne pas faire attendre plusieurs fois le client: le rêve absolu. En théorie, car en pratique, le «drive» induit un coût pour la préparation et le regroupement des commandes (qui va le payer, le client ou les enseignes ?), aggravé par la diminution importante des achats spontanés liée à la pré-sélection sur Internet et à la baisse consécutive de la fréquentation des «malls». Même raisonnement pour la réservation et le stylisme en ligne (il n'y a plus qu'à essayer en magasin l'e-commande toute préparée), ou la liste de courses pré-programmée : la rentabilité reste à prouver…

 

3. Où est passée la géolocalisation ? Application géolocalisée de fidélisation avec bonus immédiat «personnalisé», notification d'offre spéciale en batterie et envoi d'e-mail et de SMS, le schéma semble imparable. Dans les faits, il suppose un vrai travail de mise à jour des offres et des données, ce que les commerçants ne font que rarement tant leur activité est déjà chronophage, et que les gestionnaires de centre ne souhaitent pas non plus prendre à leur charge. Quant aux avantages financiers consentis pour créer du trafic et générer des ventes sur un nombre limité d'internautes, ils se révéleraient ravageurs pour la marge s'ils devaient être généralisés à tous les clients.

 

4. Le Français n'est que très rarement «ami» avec une marque. De là à devenir fan d'un centre commercial… Partage de tranches de vie dans le «mall» par des photos ou des vidéos «postées», cadeaux, invitations et échanges sur les réseaux sociaux… bien sûr, mais sans contrainte ni mercantilisme prosélyte : même les marques les plus modes et les plus fun peinent à mobiliser leurs adeptes, puisque seuls 10% des Français (contre 28% dans le monde, source Ipsos OTX 2013) se sentent engagés par une marque qui répond à leur demande et question. Il y a donc peu à attendre du fan club d'un centre commercial !

 

5. Les centres commerciaux n'existent toujours pas sur la Toile : une erreur de communication ? La faiblesse du digital pour les centres commerciaux tient d'abord à la nature purement informative de leurs sites (horaires, liste des commerçants, promotions, animation du moment, services, etc.). Résultat : ils ne touchent pas la fibre sensible de l'internaute, ne lui donnent pas vraiment envie de venir et ne se positionnent pas non plus en partenaire shopping. Il y a là d'énormes marges de progrès pour créer une vraie proximité avec son public, en faisant vivre le centre et ses commerces sur la Toile, en présentant sa sélection d'objets iconiques du moment, en coachant à distance ses clients… Cela nécessitera une vraie remise à plat des sites actuels et un «community management» permanent pour construire le volet actualité des enseignes, mais nul ne pourra y échapper bien longtemps.

 

6. Retour à l'humain ! Toutes ces innovations ne serviront à rien si le lien humain est oublié. Le client veut du sourire, de la bienveillance, du conseil expert, bref, être simplement bien accueilli et assisté dans son shopping. Pour 62% des clients des magasins, la qualité de l'accueil constitue l'élément principal qui incite à acheter et à revenir en magasin (source Viavoice-Equipmag 2012). Par sa richesse relationnelle, le commerce a encore de beaux jours devant lui ! Et si l'innovation la plus efficace était d'offrir un maximum de bienveillance et de compétence professionnelle dans les lieux de commerce, à commencer par l'accueil et l'information ?

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