Reportage
Pour la troisième édition de la Creative Connection organisée par l’AACC, 60 directeurs de création s’étaient donné rendez-vous dans le 11e arrondissement. L’occasion pour de jeunes talents de rencontrer leurs idoles dans un cadre détendu mais aussi de préparer leur avenir professionnel.

Ambiance speed dating ce 13 mars à La Cartonnerie dans le 11e arrondissement de Paris. À l’initiative de l’AACC se tenait la troisième édition de la Creative Connection, opération visant à faire se rencontrer les directeurs de création des agences de pub et des étudiants ou primoaccédants au marché du travail. Pas moins de 45 tables, réparties sur les trois niveaux de l’ancienne manufacture familiale de carton reprise par Arnaud Bouret, fils de la lignée, en 2002 et entièrement redécorée en un lieu cosy, permettaient aux participants d’échanger avec de grands noms de la publicité comme Olivier Altmann (Altmann + Pacreau), Xavier Beauregard (Humanseven) ou encore Alexandre Hervé (Romance). Ce sont plus de 60 créatifs qui ont répondu à l’appel pour environ 130 participants.
« Il est très important d’être présent à cet évènement car il permet de découvrir des jeunes créatifs et étudiants. Nous sommes ici plus encore dans un souci de transmission, avec certes de grosses attentes, mais aussi l’indulgence nécessaire », déclare Olivier Altmann à Stratégies, voyant cette opération comme « un échange bénéfique pour toutes les parties car nous représentons l’expérience et eux la modernité ». Il est 19 h, les minutes passent, et une file d’attente conséquente s’étend désormais le long de la rue Deguerry. Olivier Altmann précise : « Cette troisième édition a eu beaucoup de succès et nous n’avons jamais eu autant d’inscriptions. » La soirée débute par un discours introductif du président d’Altmann + Pacreau suivi par Valérie Decamp, directrice générale de Metrobus.


Rencontres professionnelles informelles

À l’entrée, chaque participant s’est vu remettre un papier, de manière aléatoire, sur lequel est inscrit « round 1 », « round 2 » ou « round 3 ». Afin de ne pas créer de pagaille, les vingtenaires doivent patienter, parfois de très longues minutes. « La pression commence à monter car j’ai un peu peur du jugement, mais la motivation est plus que jamais présente », raconte Carla Kentzinger, étudiante à Sup de pub en création publicitaire et communication. Elle qui a hérité du round 2 regrette néanmoins qu’« il n’y ait pas plus d’endroits destinés à l’attente ». Au rez-de-chaussée se trouve un bar où chacun se restaure avec les petits plats préparés par le soin des cuisiniers. Les entretiens durent une quinzaine de minutes pendant lesquelles les créatifs observent les books de leurs futurs acolytes et prodiguent critiques et conseils.
Pour Léa Trabelsi et Noémie Matter, team étudiante à Sup de Création : « Étant à la recherche d’un stage, cette opportunité présente de nombreux avantages. Par exemple : bien plus de liberté que lors d’un entretien classique. » Ce que confirme Damien Foui, directeur de création chez Dare.Win : « Bien sûr, on comprend qu’ils soient un peu stressés mais cette configuration tend à dédramatiser l’instant pour aboutir à un véritable échange à double sens. » Il est vrai que la génération présente à cette soirée est bien différente de ce qu’étaient les créatifs à leurs débuts. « Les profils sont, certes, très variés mais plus encore les supports, qui ont complètement changé par rapport à l’époque où nous étudiions », avouent Cerise Leclerc et Louise Mussot, team créatif chez Rosapark, récompensé en 2017 par de nombreux prix avec leur campagne pour Monoprix. Si certains se font parfois rabrouer, d’autres réussissent à taper dans l’œil de leur mentor d’un soir et repartent de la Creative Connection avec un stage. C’est le cas pour l’agence BETC qui profite de l’occasion pour recruter pas moins de quatre profils à partir de septembre.


Transmettre et déconstruire

Passés les trois premiers rounds, chacun est désormais libre de s’installer où bon lui semble. La volonté d’échanger les savoirs se retrouve à chacune des tables, une véritable cocotte-minute cérébrale dans laquelle les idées fusent. D’après Damien Foui : « Ce seront les créatifs de demain et il y a un côté galvanisant à leur transmettre des choses. C’est aussi pour cela que certains d’entre nous donnent des cours dans des écoles de création. » Les participants sont eux ravis du déroulement de la soirée. « C’est la première fois que je participe à cette opé et il est très agréable d’échanger avec tous ces grands créatifs », assure Antoine Guinet, récemment entré à l’agence Spoke en tant que directeur artistique, après un master en design et communication visuelle à e-artsup, et qui « voudrait encore voir Olivier Altmann et Xavier Beauregard ».
La plupart des directeurs de création que nous avons rencontrés semblent satisfaits des travaux présentés. Selon Alexis Benbehe et Pierre Mathonat, directeurs de création chez DDB Paris : « Ils sont tous très talentueux et c’est une occasion pour nous de nous remettre en question ». Même son de cloche pour Cerise Leclerc et Louise Mussot : « Les books étaient pour la plupart de qualité et nous ont permis de découvrir des jeunes venant de tous d’horizons, ce qui rend la démarche bien plus intéressante. » Elles reconnaissent par ailleurs « un esprit parfois formaté chez certains qu’il faudra s’appliquer à défaire ». Leur analyse est partagée par les créatifs du récent spot de Médecins du Monde (Stratégies n°1933 du 18 janvier 2018). « Il y a vingt ans la publicité était encore un métier de pirates, mais désormais les jeunes peuvent sortir avec un diplôme de directeur de création ce qui augmente le risque d’aseptisation. D’un côté, ils apprennent à une vitesse totalement folle, mais de l’autre ils respectent encore trop la publicité, certainement en partie aussi à cause de leur âge. Il faut vouloir salir la publicité ! » Voilà qui a le mérite d’être clair.

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