Etude
Le réseau social d'entreprise (RSE) est devenu un catalyseur et un terrain d’expression pour les personnes qui veulent porter le changement, selon l’étude Lecko/You Gov, que Stratégies publie en exclusivité.

La clé de la transformation digitale des entreprises, c'est… la collaboration. Tel est l’enseignement principal de la neuvième édition de l’étude Lecko/You Gov, intitulée «Mettre en mouvement les acteurs de l’entreprise pour réussir sa transformation. Etat de l’art des réseaux sociaux d’entreprise (RSE)», publiée ce 26 janvier. «L’ère digitale remet en cause les activités actuelles des entreprises et leur manière de travailler pour y faire face. La collaboration est une modalité de travail, mais aussi un levier pour faciliter le changement», peut-on lire dans le rapport, qui a choisi cette année d'analyser la façon dont l’entreprise encourage les initiatives et de quelle manière les collaborateurs s’investissent pour impulser des changements. On y apprend que cette transformation tant attendue est enfin enclenchée. Pour 69% des salariés, des changements sont en effet en cours dans leur environnement de travail. Il était temps! Car, comme le révèle cette enquête, 83% des salariés pensent qu’il est nécessaire de modifier leurs façons de travailler. Initialement perçu comme un support de travail plus moderne, le RSE, multiple et toujours plus innovant, est enfin compris comme un levier indispensable à une mutation en profondeur des organisations.
Le degré des utilisations du RSE progresse en moyenne de 15% par an. Les déploiements les plus importants au sein des grandes entreprises dépassent les 10 000 utilisateurs engagés en plus chaque année. En général, le rythme d’«embarquement» des salariés est compris entre 1 000 et 4 000 utilisateurs par an. «Il faut bien distinguer les “inscrits” des “engagés”», avertit Arnaud Rayrole, fondateur et directeur général du cabinet-conseil Lecko. Certaines entreprises inscrivent d'un coup tous leurs collaborateurs sur leur RSE, mais ce n'est pas pour autant qu'ils sont actifs – engagés – à la fin de l'année.»
Mutation hétérogène
Focus inédit cette année, l’enquête Lecko/You Gov se concentre sur la notion de «porteurs d’initiative». «Les entreprises ont le mot “transformation” constamment à la bouche, mais très peu parlent des gens qui la portent, observe Arnaud Rayrole. Pourtant, pour nous, ces collaborateurs sont au cœur des réussites.» Aujourd’hui, les grandes entreprises ne se transforment pas d’un seul tenant, c’est une mutation hétérogène qui se fait par itération, par des initiatives locales portées par des personnalités qui réussissent à fédérer leurs collègues autour d’une nouvelle façon de travailler. Selon le rapport Lecko, 68% des salariés ont envie de porter le changement. Et parmi ceux qui pensent que le changement est possible, 86% d’entre eux veulent porter des transformations dans leur environnement de travail. Ainsi, ce n’est plus forcément un dirigeant ou un manager qui va imposer un RSE à tous les collaborateurs, mais plutôt le fruit d'initiatives locales.
La fin d'un mythe
La «digital workplace», ce concept désignant la combinaison des collaborateurs, des outils et de l'organisation d’une entreprise, semble dans une impasse, tant aucun progrès n’a été réalisé dans l’intégration des différentes solutions. «On est loin de tenir la promesse de l’environnement unique, parce que les outils sont très concurrents les uns des autres. Si on regarde les acteurs dominants, Google et Microsoft, ce sont des suites logicielles apposées les unes à côté des autres et très peu intégrées», souligne Arnaud Rayrole. Du reste, il est clair que l’environnement de travail est aujourd’hui bipolaire avec les deux grands intervenants que sont Microsoft et Google. Dès lors, adopter une technologie commune ne garantit en rien que les collaborateurs de ces différentes entités pourront échanger entre eux.
A la fois liberté et difficulté
«La digital workplace ne peut se bâtir en enfermant les utilisateurs dans une plateforme», insiste l’étude. Les entreprises évoluent dans leur mode d’acquisition des solutions pour soutenir leur transformation organisationnelle et culturelle. Si, encore récemment, le service informatique dominait la démarche, aujourd’hui, chacun peut souscrire à un outil collaboratif en ligne: les métiers sont capables de s’équiper par eux-mêmes. C’est à la fois une liberté nouvelle, dont l’entreprise profite, et une difficulté, car il y a un risque de perte de cohérence, chacun ayant la possibilité de travailler sur un outil différent. «Ce risque est avéré et c’est pour cela que la manière de piloter l’acquisition technologique doit évoluer. En imposant une solution, on empêche les collaborateurs de travailler et on les incite à contourner ces systèmes», assure Arnaud Rayrole. La solution résiderait dans le juste milieu, c'est-à-dire de ne plus choisir une solution, mais d'appréhender un environnement multiple. D'accepter la pluralité de solutions et réussir à réguler cela de manière collective, sans rentrer dans le chaos où chacun choisit son propre outil.

Avis d'expert

«Une vraie prise de conscience au sein des entreprises»

Arnaud Rayole, fondateur et directeur général de Lecko

S’il fallait ne retenir qu’un chiffre? 

Arnaud Rayrole. 24% des salariés ayant envie de porter le changement s’orientent vers leurs pairs pour les fédérer autour de leur initiative. C’est-à-dire sans passer par la voie hiérarchique, pour essayer de les convaincre de travailler différemment. Au cours de l’étude, nous avons noté une vraie prise de conscience au sein des entreprises.

Quelle est l’initiative la plus innovante rencontrée pendant l'enquête?

A.R. La compagnie aérienne Air France KLM est exemplaire dans la manière dont elle a développé le principe de culture client auprès de tous les collaborateurs, en «front office» comme en «back office», en les fédérant autour de cet objectif sur leur réseau social Yammer. Une organisation classique n’aurait jamais permis de faire cela. Il faut saluer les efforts réels de mise en réseau de tous les acteurs, l'engagement des community managers et de la direction pour animer la communauté, la priorité effective donnée par l'entreprise et par les salariés au service au client ainsi que la capacité des administrateurs de Yammer à professionnaliser les usages de tous ces acteurs. 

 

Méthodologie

L'enquête a été réalisée auprès 1 145 collaborateurs d'entreprises de plus de 1 000 salariés en France. Le sondage a été effectué en ligne, sur le panel propriétaire You Gov France, selon la méthode des quotas, du 19 au 21 décembre 2016.

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