L'idée lui est venue alors qu'il effectuait un stage à New York fin 2006. Michaël Philippe a alors 20 ans, il étudie la finance à l'université Paris I et souhaite lire en PDF un magazine français qu'il ne trouve pas. D'où le projet d'une plate-forme qui rassemblerait l'ensemble de la presse française au format numérique. C'est avec l'aide de son frère Nathaniel et d'un ami, Robin Sabban, qu'il lance une première version du Kiosk. Les trois entrepreneurs lèvent alors 600 000 euros auprès d'investisseurs privés et intègrent un nouvel associé, Ari Assuied, aujourd'hui PDG.
«Michaël est quelqu'un d'assez visionnaire, estime Robin Sabban, en charge du développement commercial. Dès le départ, il savait que le kiosque numérique était une solution d'avenir quand le support numérique naturel de la presse allait arriver.» Nous sommes trois ans avant le lancement de l'Ipad par Apple. A l'époque, on parle davantage d'e-paper que de tablettes. «Nous étions convaincus qu'un support allait démocratiser la lecture numérique», se souvient Michaël Philippe, aujourd'hui âgé de 26 ans et responsable du développement produit et du marketing.
Effectivement, l'arrivée de la tablette d'Apple début 2010 changera tout. «Quand nous étions uniquement sur le Web, Le Kiosk ne marchait pas très bien. Nous nous adressions à une niche, notamment aux expatriés qui voulaient lire la presse française. L'Ipad a bouleversé l'écosystème», explique le jeune entrepreneur. En janvier 2011, Le Kiosk lance sa première application pour tablettes, un kiosque en trois dimensions qui permet aux lecteurs de visualiser la une des magazines comme chez un vrai marchand de journaux. Depuis, les revenus sont en plein boom: le chiffre d'affaires de 1,4 million d'euros en 2011 a atteint près de 6 millions cette année, avec 70 000 clients par mois, dont 25 000 abonnés au forfait dix magazines pour dix euros.
De l'entrepreneuriat au management
«Comme toutes les start-up qui rencontrent leur marché, un des défis auxquels nous faisons face aujourd'hui est de gérer notre croissance. Nous passons d'une start-up à une PME, et de jeunes entrepreneurs au métier de manager, ce qui implique d'apprendre à dire non», souligne Michaël Philippe. Pour mener à bien cette croissance, les fondateurs se sont peu à peu entourés de personnes d'expérience, comme Ari Assuied ou Stéphane de Luca, 47 ans, responsable de la technique et issu du monde du jeu vidéo. Un recrutement d'autant plus stratégique que sur les 35 salariés que compte Le Kiosk, vingt sont des ingénieurs et quinze des commerciaux.
«Depuis le début de l'année, nous sommes entrés dans une phase d'industrialisation. Il a donc fallu intégrer de nouvelles compétences, clarifier le rôle de chacun et rationaliser les projets», ajoute Michaël Philippe. Il a pour lui un calme à toute épreuve. «Michaël est quelqu'un de réservé, de discret, doté d'une importante capacité d'écoute et d'observation. Ce n'est pas une personne directive. Il est aussi très pragmatique dans ses décisions», juge Marc Fournier, cofondateur du fonds Serena Capital et professeur affilié à l'ESCP. «Il apporte toujours un regard positif sur les choses mais ce n'est pas un rêveur», renchérit Stéphane de Luca.
Après la France, Le Kiosk part aujourd'hui à la conquête du monde, avec des ouvertures au Royaume-Uni en mai dernier et en Italie ce mois-ci. Egalement en projet, une plate-forme consacrée à la bande dessinée. «Nous sommes dans une phase d'investissement», justifie Michaël Philippe quand on lui demande si Le Kiosk est rentable. Objectif, atteindre l'équilibre fin 2013.
Son parcours en bref
1986. Naissance le 8 septembre à Paris.
2008. Lancement du Kiosk, et maîtrise de finance à l'université Paris I.
2009. Master en innovation et entrepreneuriat à l'ESCP.
2011. Arrivée du kiosque sur l'Ipad.
2012. Lancement à l'international, d'abord au Royaume-Uni puis en Italie.
