Evénementiel
Au Féminin et Aude de Thuin organisent en novembre "Happy happening" qui vise à promouvoir les femmes et à favoriser leur insertion professionnelle.

Aude de Thuin n'est pas à une contradiction près. Quand elle fait visiter son jardin, en plein 16e arrondissement de Paris, elle n'omet jamais de présenter ses deux poules: Marie et Antoinette. Des noms très Ancien Régime pour ces gallinacées, alors que la fondatrice du Women's Forum - revendu en 2009 à Publicis - prône la révolution des mentalités par l'accès des femmes au sommet de la pyramide professionnelle.

Associée depuis deux ans à Au Féminin dans une joint-venture, elle a déjà à son actif plusieurs «Rencontres aufeminin.com» autour des femmes et de la réussite (Paris, novembre 2013), des «femmes, de la science et de la technologie» (Toulouse, décembre 2013) ou sur le thème «femmes et audace» (Lyon, janvier 2014). Ces rencontres mobilisent jusqu'à un millier de personnes, à 35 euros la place, même si l'événement sur la science, à Toulouse, fut un échec, avec 150 participantes.

Avec Marie-Laure Sauty de Chalon, PDG d'Au Féminin, Aude de Thuin en en a tiré les leçons: elle décide cette fois de viser très haut en organisant un événement à Paris pour 10 000 personnes: «Happy happening». Les 14,15 et 16 novembre prochain, trois journées sont en effet proposées au Carreau du Temple, au cœur de la capitale, afin de servir de «tremplin à tous les possibles», d'apprendre à «dépasser ses peurs et repousser les limites», ou encore «de réussir à concilier toutes les facettes de sa vie et révéler l'héroïne en chacune de nous».

Des mots qui fleurent fort la superwoman? Sans doute. Mais ce laboratoire d'idées, qui fera intervenir quarante «speakers» - et non pas speakerines -, de la boxeuse Sarah Ourhamoune à la tradeuse Katia Lawson en passant par les ministres (non confirmées) Fleur Pellerin et Najat Vallaud-Belkacem, se veut une source d'inspiration pour les jeunes générations gonflées à bloc. «Ce sera un événement majeur, innovant, presque futuriste», affirme Aude de Thuin.

Fabrique à héroïnes

Comme dans un magazine féminin, les marques sont invitées à être présentes dans un «happy corner», dans une démarche d'interactivité, avec des espaces conçus comme des rubriques: «Job, Green, Me, Geek, Look, Food.» Un lieu de formation («training») complète le dispositif. Au programme: la prise de parole en public, le dépassement des stéréotypes, les techniques du storytelling.

«La crise n'est pas favorable aux femmes, note Aude de Thuin, elle entraîne un repli sur soi. Les femmes se disent qu'il vaut mieux ne pas être chef pour ne pas prendre de coups. Notre message est de dire: ayez confiance en vous car le monde a besoin de vous.» La fondatrice du Women's Forum rappelle qu'il faut trois femmes dans un conseil d'administration pour changer les habitudes. S'il y a des progrès à ce niveau, elle déplore encore des directions exécutives très masculines: «On est devenus très bons dans les conseils et déplorables dans les comex».

Marie-Laure Sauty de Chalon, elle, constate que le monde des médias et des régies s'est beaucoup féminisé en quinze ans. Mais peut-être pas au bénéfice des femmes: ce peut être le reflet d'une moindre attractivité pécuniaire du secteur alors que la mutation des métiers vers la data favorise la culture d'ingénieur ou d'informaticien, domaine dont les femmes ont souvent tendance à s'exclure. On ne comptait ainsi l'an dernier que 80 étudiantes sur les 960 de l'Ecole 42 de Xavier Niel. Et l'on trouve, estime-t-elle, encore très peu de femmes à la tête de médias.

Mais il n'est pas écrit qu'il en sera toujours ainsi. «L'optimisme est quelque chose de très féminin, ajoute-t-elle. Nous disons à travers Happy happening “sois moteur de ta vie”. On veut être une fabrique à héroïnes». La patronne d'Au Féminin est bien placée pour savoir que le virtuel - dont raffole la génération Y - ne suffit pas à créer des liens. D'où cette incitation au networking sur différentes thématiques. Le prix? 10 euros pour les moins de 25 ans... et gratuit pour les garçons!

Méga-échange

Comme être actrice du changement? Développer son «insertivité»? Assurer sa promotion professionnelle quand on est une femme seule avec des enfants? Témoignages, formations et rencontres se proposent de répondre à toutes ses questions. A la sortie des études, rappelle Marie-Laure de Chalon, le différentiel salarial avec les hommes n'est pas si important (3 à 5%) mais tout bascule à la trentaine lorsque les femmes décident - ou acceptent - de ne pas faire de leur carrière professionnelle un axe dominant de leur vie. A la sortie, l'écart des salaires est alors de 20%.

Au final, ce méga-échange est une promesse d'évolution pour la condition professionnelle des femmes. Mais aussi, pour les entreprises, une proposition d'immersion dans la réalité féminine au travail. Les patrons prennent peu à peu conscience des mutations à opérer. A l'instar de Jean-Paul Agon, PDG de L'Oréal, qui a reconnu n'avoir jamais pris conscience du problème des femmes jusqu'à ce qu'ils se rendent compte que ses filles avaient des freins... et pas seulement dans leur tête.

 

FOCUS. Un modèle d'affaires hors normes
Happy Happening représente un «vrai risque d'entrepreneur» pour ADT Lab, la start-up d'Aude de Thuin, associée à Au Féminin. Financée à 90% par les annonceurs, l'entreprise vise un très large public grâce à un prix bas (de 10 à 14 euros). Outre une «zone de papotage», des «happy» ou «very happy» partenaires feront parler d'eux à travers cette opération: Groupama, L'Oréal, Renault, Orange, Philips et Google. Les partenaires médias sont JC Decaux et France Télévisions. L'événement, doté de «corners», est aussi un lieu de recrutement pour les entreprises.

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