RH
Travailler n’est plus nécessairement synonyme de stress voire de souffrance. Le bien-être au travail est non seulement possible mais il ouvre de nouveaux champs d’innovation et d’efficacité.

D’après une étude Wrike, 94 % des personnes interrogées déclarent être victimes du stress sur leur lieu de travail. Près d’un tiers d’entre elles ont même indiqué que leur niveau de stress était « élevé voire insupportable ». La société de consulting Willis Towers Watson ajoute que 57 % des employés qui subissent une telle pression à un haut niveau s’estiment moins productifs et moins motivés dans leur travail. 

Comment s’assurer du bien-être pour garantir la satisfaction et, in fine, la productivité des salariés ? Le point avec Charles de Fréminville, dirigeant et cofondateur de Bloom at work, start-up spécialisée dans le bien-être au travail, et Amélie Motte, chief happiness officer de la Fabrique Spinoza. 

 

1 - Évaluer le niveau de bien-être

C’est faisable, selon Charles de Fréminville : « Il faut effectuer des enquêtes plus fréquentes, plus courtes et plus ludiques que celles pratiquées aujourd’hui. Nous préconisons de poser tous les quinze jours une série de sept questions, ce qui prendra deux minutes à chaque collaborateur. »


2 - Distinguer les différents besoins

Derrière la diversité des demandes liées au bien-être, les collaborateurs expriment quatre grands types de besoins : physiologiques (relatifs au cadre de travail et à la charge de travail) ; sociaux (relations entre collaborateurs et managers) ; de développement (formation, reconnaissance) et aspirationnels (créativité, sens du travail, fierté d’appartenance), relève Charles de Fréminville.

 

3 - Connaître ses besoins

Pour faciliter les échanges entre ses équipes réparties entre différents étages, l’agence FullSix a invité ses collaborateurs à identifier un collègue à partir d’un indice particulier. Au terme de l’enquête, le fin limier et le collègue mystère font un selfie commun diffusé à tous. Une initiative très louable, estime Amélie Motte : « Mieux se connaître, c’est aussi mieux savoir ce que font les autres, leur contribution aux résultats de l’entreprise, cela crée une plus grande cohérence, un climat positif qui permet de mieux gérer les sources de tension. »


4 - Instaurer un vrai feedback

Il s’agit de mettre en place des séances régulières de « feedback » en suivant un canevas précis : rappeler les faits qui ont généré une forme d’insatisfaction ; ensuite, expliciter cette insatisfaction, la caractériser ; puis faire une pause avant d’aborder les pistes et solutions possibles pour remédier à la situation. « Cela permet d’éviter le syndrome dit du “bouchon de champagne” qui décrit l’accumulation de tensions au fil de l’année, tensions qui se libèrent lors de l’entretien annuel », note le dirigeant de Bloom at work.

 

5 - Plonger dans le réel entre collègues

Trop souvent, les demandes des autres services sont vécues comme des irritations. Amélie Motte est ainsi intervenue dans une entreprise du BTP où régnait une tension entre les services comptables et les collaborateurs sur les chantiers, les seconds accusant les premiers de les harceler pour avoir des documents. « Ils ont eu l’idée d’organiser des “vis ma vie” qui les ont amenés à passer une journée dans l’univers de l’autre. Les collaborateurs de la compta ont compris qu’il pouvait être difficile de répondre à leurs demandes et inversement, les chefs de chantier ont mieux compris les contraintes de la comptabilité, de sorte qu’une forme de coopération s’est mise en place. » L’effet bénéfique du dispositif se dissout à mesure que les contraintes reprennent le dessus. « Certains peuvent être découragés mais c’est humain : il faut réinventer en permanence », ajoute-t-elle.

 

7 - Clarifier la stratégie d'entreprise

Combien de collaborateurs comprennent vraiment la stratégie ? Toujours trop peu. Mais rien n’est irrémédiable, selon Charles de Fréminville, qui a déjà mis en œuvre un dispositif probant chez de nombreux clients : « Nous invitons les membres du Comex à bloquer une heure régulièrement pour présenter aux salariés leur stratégie et répondre à leurs questions. Cela donne plus de sens et de clarté et cela se traduit par de meilleures appréciations de la part des salariés. »


8 - Engager ses collaborateurs

En cas de graves difficultés, la plupart des directions se replient dans leur pré carré pour trouver une solution. LinkValue, spécialiste de la transformation digitale des entreprises, a au contraire engagé ses collaborateurs dans une réflexion globale. « Leur démarche était intéressante parce qu’ils ont permis à des collaborateurs de s’engager dans des domaines qui n’étaient pas les leurs, souligne Amélie Motte. Des gens qui n’étaient pas des communicants ont par exemple pu prendre part à une action dont l’objectif était d’augmenter la visibilité du blog. Cela permet aussi de tisser du lien entre gens qui travaillent dans des univers différents. Cette découverte amène à plus de bienveillance. »


9 - Faire de l'erreur une source... d'amélioration

Rares sont ceux qui acceptent de reconnaître leurs fautes, surtout en milieu professionnel : « Il faut valoriser le droit à l’erreur. Blablacar a même institué des réunions où les collaborateurs font état des fautes qu’ils ont commises et ce que cela leur a appris. Cela fait grandir les équipes. C’est indispensable dès lors que les entreprises font de plus en plus appel à la capacité d’innovation de leurs collaborateurs. L’innovation implique une incertitude, d’où le droit à l’erreur », conclut Amélie Motte. 

Encadré – Trois questions à... Frédéric Fougerat, directeur de la communication, du marketing et de la RSE du groupe Foncia

« Il faut une réciprocité dans la confiance »

Est-il possible de mesurer le bien-être au travail à l’intérieur de l’entreprise ?


Il faut associer quatre indicateurs. Les deux premiers sont l’absentéisme et le turn-over qui ne constituent que des indices. Le troisème doit mesurer l’engagement des collaborateurs à travers une enquête de satisfaction interne sincère et honnête. Elle doit mettre en lumière, en toute transparence, les points négatifs qu’il faut évoquer clairement, comme les actions qui vont être conduites pour les réduire. Le quatrième est le taux de recommandation qui se mesure en lançant des plans de cooptation. Si lors d’un recrutement vos collaborateurs vous apportent des CV, c’est qu’ils sont bien prescripteurs de l’entreprise.

La bienveillance peut-elle se décréter ? Être une obligation de fonction et non un état de nature ?

La bienveillance comme l’exemplarité est une élégance de management. Je crois que l’être humain naît bienveillant mais il se transforme en fonction des milieux et des influences. C’est ainsi que les mauvais pratiques managériales se propagent. Mais il est possible de se former à la bienveillance. Cela réclame un travail sur soi et du coaching. Mais c’est payant car cela va motiver les collaborateurs et créer de l’harmonie dans les équipes. Se faire coacher est essentiel pour les managers qui veulent progresser sur ce champ.

La confiance du manager est-elle déterminante pour le bien-être au travail ?

J’en suis totalement convaincu. Il faut instaurer une réciprocité dans la confiance. Cela demande du temps et des preuves, à travers le partage d’expériences de travail. Pour un manager, faire confiance passe par la capacité à déléguer, c’est-à-dire laisser son collaborateur agir et le soutenir dans sa démarche pour atteindre l’objectif fixé. Cela implique de favoriser l’initiative et d’accorder un droit à l’erreur.



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