PRINT
Encore un papier qui affirme que le papier n'est pas mort? Oui, mais cette fois-ci, nous sommes en mesure de le prouver. Ainsi, en publicité, le print n'est pas abandonné. Loin de là!

C’est sans doute le refrain qu’on entend le plus dès qu’est évoqué le sujet. Et pourtant, non, le papier n’est pas à jeter à la poubelle. Certes, la tendance est au numérique, certes, les chiffres ne sont pas au vert… «Mais le digital a eu un effet “nouveauté”, “poudre aux yeux”, qui a un impact sur les chiffres du marché, avance Eric Trousset, directeur général adjoint de Mediapost Publicité. La réputation “mourante” du média papier reste injuste par rapport à la réalité des choses.»

Prenons le courrier non adressé, par exemple, dont le prospectus publicitaire représente le plus gros morceau. Selon France Pub, il est en légère baisse, de 1,5%, en 2014. «Derrière ce chiffre se cache un changement de stratégie qui ne remet nullement en cause le média», explique Xavier Guillon, directeur général de l’organisme. Le prospectus reste toujours autant utilisé. Au 1er trimestre 2015, selon l’Irep, quand les investissements médias (hors digital) sont en baisse de 2,9% par rapport au 1er trimestre 2014, l’imprimé sans adresse est lui stable, à –0,2%. C'est qu'il reste, notamment pour le secteur de la distribution, d’une redoutable efficacité. «Il est devenu une drogue pour les enseignes», lance Florian Grill, cofondateur et PDG du réseau d’agences Cospirit Mediatrack. «D’ailleurs, celles qui avaient annoncé vouloir s’en séparer n’en prennent toujours pas le chemin», confie un expert du secteur. Ce petit magazine, qui vit de la boîte aux lettres au barbecue, peut en effet avoir un impact de 10 à 15% sur le chiffre d’affaire des magasins, avec pourtant un temps moyen de lecture de… cinq secondes par Français.

Certes, que veut dire une moyenne quand on sait qu’un prospectus n’est lu en moyenne que par 13% de la population, tous secteurs confondus (source Mediapost). Mais il arbore un bêta de mémorisation de 28%, quand la télévision affiche 17%. Voilà sa force! Pour ceux qui le lisent ou même qui ne le lisent pas… «Le prospectus est efficace car c’est un média de masse», explique Matthias Berahya-Lazarus, président de Bonial France, une des premières places de marché pour prospectus digitaux. «C’est le seul qui vous permet de toucher 100% d’une zone de chalandise», ajoute Florian Grill. Car il passe quand même entre les mains, sauf dans les foyers «stop pub», estimés à 15% de la population. Un chiffre qui varie selon les zones et les régions. Mais quand bien même: «Tout le monde est content du “stop pub”, cela augmente le ROI du média», ajoute Xavier Guillon, de France Pub. Paradoxe: le ciblage des prospectus explique la baisse de 2014, explique Xavier Guillon: «Les volumes des prospectus diminuent, car les annonceurs ciblent mieux les envois à partir de leur CRM, notamment. Les données récoltées grâce au digital les aide à augmenter leur efficacité. C’est donc la structure même du marché et des budgets qui change.»

Opérations hybrides plus ciblées et efficaces

Et si les annonceurs dépensent encore 50 à 70% de leur budget médias en prospectus, c’est bien que le papier ne meurt pas. Quant à sa numérisation, elle est surtout une opportunité pour atteindre d’autres cibles. «Les personnes qui consultent les prospectus digitaux ne sont pas les mêmes que celles qui les lisent en papier, précise Matthias Berahya-Lazarus. Le prospectus digital est en “pull”, et non en “push”. L’audience est beaucoup plus impliquée, avec des profils différents.» Plus jeunes et digitaux, forcément… «Le digital ne vient pas, sur ce mode de communication, supplanter le papier, il le renforce», avance Eric Trousset, de Mediapost. Autre exemple pour le courrier adressé. Le repli persiste, voire s’amplifie, avec une chute de 9,6% en 2014, après une baisse de 7,5% en 2013. «Mais cela s’explique par un changement de modèle économique des acteurs de la vente à distance, tempère Xavier Guillon. A eux seuls, ils représentaient 40% des dépenses.» En passant à un modèle e-commerce, ils ont drastiquement coupé leur budget de courriers adressés, et «l’essentiel de la baisse est là-dedans», assure Xavier Guillon.

Mais, encore une fois, le digital permet au papier de passer à des opérations hybrides, plus ciblées et efficaces. La Poste Solution Business, par exemple, voit ses offres, comme la Web Key, qui consiste à inclure une clé USB dans le courrier, gonfler dans son chiffre d’affaires. «Cette offre a augmenté de 64,2% entre avril 2014 et avril 2015», détaille Simone Sampiéri, sa directrice marketing.

L’échantillonnage lui aussi se développe dans d’autres secteurs. «Nous allons chercher des annonceurs qui ne pensaient pas ou n’avaient jamais pensé au courrier», estime Eric Trousset. Comme Lancôme dans la cosmétique, qui a pu mettre en place un diagnostic de peau sur internet et envoyer par La Poste des échantillons de crèmes ciblés. Ou d’autres offres de retargeting, où les acteurs arrivent à récupérer les adresses postales sur le web grâce à des cookies et en faisant le lien avec des réseaux de partenaires. Inclure le papier dans le digital ou inversement est naturel si l'on raisonne points de contact.

Ne reste que la presse qui, elle, baisse de 8%... «Le problème vient du coût de contact, qui est encore beaucoup trop faible. Car l’audience a considérablement augmenté avec le digital», explique Xavier Guillon. Le modèle économique n’a pas encore été trouvé. Une question de temps?

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