Dossier recrutement
Accélération très forte dans l'univers numérique, légère amélioration dans les métiers traditionnels: 2011 devrait être un bon millésime en matière d’emploi.

Enfin le dégel! Après trois années de glaciation pour les recrutements et les salaires, le réchauffement climatique est en route. Une bonne nouvelle pour les habitants de la planète publicité, marketing et médias. Bien sûr, il ne faut pas s'attendre à de très fortes augmentations, car le redoux sera très progressif. Mais la nouvelle a été confirmée il y a quelques jours par Maurice Lévy, PDG de Publicis Groupe, qui a annoncé le dégel des rémunérations à ses 47 000 collaborateurs dans le monde. «En ce qui concerne les embauches, nous serons plus prudents et mesurés, en fonction des besoins des clients», pondère Benoît Roger-Vasselin, DRH de Publicis.

Autre indicateur encourageant, la dernière étude Kantar Media, qui affirme que le marché publicitaire (hors Internet) a progressé de 10,2% en 2010. Même si la reprise s'est faite à retardement par rapport aux autres secteurs. «Un classique, commente Martin Villelongue, directeur des départements commercial et marketing du cabinet Michael Page. La publicité et les médias ont tendance à ralentir avant les autres et à repartir après tout le monde.»

 

Publicité

«Depuis la fin de l'année, on note un très fort accroissement des recrutements, en particulier dans les agences totalement numériques», constate Damien Crequer, directeur du cabinet Taste RH. Illustration avec Fullsix, qui compte 450 salariés en France et qui va se développer fortement cette année (lire l'encadré p.40). Tendance que confirme Martin Villelongue chez Michael Page: «Les régies et agences Web tirent le marché, tandis que les entreprises traditionnelles reprennent plus progressivement.»

Le mastodonte Publicis est également confiant pour 2011. Ainsi, Benoît Roger-Vasselin estime que l'activité sera meilleure en 2011 qu'en 2010 et prévoit des embauches au cas par cas dans l'Hexagone au sein de sa centaine d'entités (4 500 salariés).

Créatifs, profils marketing Web, commerciaux: ces trois familles de métiers profitent du rebond. Pour l'instant, ce sont plutôt les cadres confirmés qui sont prisés. Au point que les agences recommencent à faire appel aux cabinets de recrutement, constate Pierre Cannet, PDG du cabinet Blue Search Conseil et délégué général du club des DRH du Net.

Autre changement, les agences ne cherchent plus des «divas de la pub» mais des stratèges de la communication multicanal, capables de piloter des projets de A à Z. Et ce n'est pas seulement une évolution sémantique, mais une philosophie mise en œuvre à chaque gain de budget. «Comme les marges sont moins importantes, les équipes sont constituées au plus juste et les rémunérations revues à la baisse, explique Damien Crequer. Il y a trois ans, un directeur commercial était payé 100 000 euros, aujourd'hui ce serait plutôt entre 70 000 et 80 000 euros.» Seule exception: le webmarketing, où l'on commence à sentir de vraies tensions sur les rémunérations.

 

Médias

Depuis la reprise des investissements publicitaires, au milieu de l'année dernière, les groupes médias ont retrouvé des couleurs. Le groupe Figaro – qui possède Aden Classifieds – a ainsi réalisé en 2010 un résultat opérationnel de plus de 30 millions d'euros pour quelque 550 millions d'euros de chiffre d'affaires. Médiamétrie, qui multiplie les études sur les nouveaux médias, recrute 30 personnes en CDI. «Pour autant, ces acteurs ont attendu de voir si l'année se passait bien avant de relancer les embauches», observe Damien Crequer, de Taste RH.

Comme tous les indicateurs sont au vert en ce début d'année, ces structures réinvestissent le terrain en embauchant des commerciaux et en relançant des projets. Mais la reprise est inégalitaire et ne sauvera pas les groupes de presse trop focalisés sur le papier, comme l'atteste l'activité presse gratuite d'Hersant, la Comareg. L'entreprise, en redressement judiciaire, prévoit de supprimer 30% de ses effectifs, soit 758 emplois.

Au-delà de l'exemple de la presse gratuite, tous les groupes en retard en matière de développements Web vont devoir recruter des profils Internet. Ce devrait être le cas de l'allemand Prisma, par exemple. Et même dans les groupes bien positionnés sur le Web, les recrutements ont recommencé. «La tendance est plutôt à l'embauche, affirme Thierry Funck-Brentano, directeur des relations humaines du groupe Lagardère (30 000 salariés). Même si l'on se fixe des priorités par compétence.» Autrement dit, les experts du numérique sont les bienvenus. Bien que Lagardère soit sur le point de céder sa branche magazine internationale (4 800 personnes) à Hearst, ses autres filiales semblent reparties du bon pied. «Chez Lagardère Active la publicité est revenue, la filiale Publishing va plutôt bien, et Lagardère Services étend son implantation géographique», passe en revue le DRH.

«Autre tendance, les filiales interactives des médias (télévisions, radios) recommencent à nous demander de leur trouver des managers – directeurs Internet, nouveaux médias, e-commerce», se réjouit Pierre Cannet, PDG du cabinet Blue Search Conseil et délégué général du club des DRH du Net. Des cadres chevronnés, avec 10 d'expérience du Web, payés au prix fort: plus de 100 000 euros.

 

Marketing et communication

Dans le marketing, les volumes de recrutement devraient être importants cette année. Dopés là encore par le numérique. «Plus de 80% des offres diffusées sur notre site sont liées au marketing Web (référencement, SEO, SEM, etc.)», relève Carlos Goncalves, cofondateur de Jobintree.com. Un phénomène qui ne se limite plus aux agences de communication. «Les banques, par exemple, recrutent énormément de profils de ce type en ce moment», poursuit le responsable du site emploi. Les autres experts très demandés: les responsables e-CRM, «data miner» ou connaissance client.

Même constat pour l'animation de communautés et le «social media marketing». «Dans ce domaine, les sociétés m'ont confié autant de missions sur le mois de janvier que pour toute l'année 2010», se félicite Pierre Cannet, du cabinet Blue Search Conseil. La reprise commence aussi à se ressentir dans les fonctions traditionnelles (non Web), tels les «responsables marketing opérationnels, chefs de produit», remarque Bern Terrel, du cabinet Hudson.

Néanmoins, beaucoup de professionnels du marketing sont encore au chômage. Chaque offre passée reçoit donc un flot de candidatures. La situation n'est pas meilleure pour les fonctions de communication en entreprise. «Le marché n'a pas repris du tout, nous avons seulement quelques demandes en CDD ou management de transition», constate Bern Terrel.

 

Télécoms et Internet

Entre la hausse de la TVA qui ouvre la possibilité de résilier son opérateur et l'arrivée prochaine de Free Mobile, le secteur des télécoms est en plein chamboulement et reprend les recrutements. Bouygues Telecom prévoit d'intégrer 800 personnes cette année, essentiellement à des postes de conseillers de clientèle, conseillers de vente, ingénieurs commercial B to B et managers de points de vente. Peu dans le marketing.

De son côté, France Télécom-Orange va embaucher une cinquantaine de spécialistes en marketing client (marché grand public et marché entreprise), produit (nouveaux produits et services), publicité et quelques communicants (attaché de presse, spécialistes marque).

Chez SFR, les 550 embauches prévues cette année concerneront principalement les fonctions commerciales, service client, ingénieurs télécoms (réseaux) et informatique (SI).
Les figures du Web comme Facebook ou Google devraient également fortement étoffer leurs équipes. La firme de Mountain View, 24 000 salariés, a prévu 6 000 embauches au niveau mondial, mais refuse pour l'instant de donner des chiffres pour la France. Quant à Viadeo, il devrait être l'un des champions du recrutement cette année: l'entreprise prévoit de doubler de taille en 2011 (lire l'encadré en p. 38).

 

E-commerce

Les sociétés de commerce sur Internet multiplient les recrutements. Cela, parce qu'elles ont été parmi les plus gros fournisseurs du père Noël 2010, avec 6,2 milliards d'euros de chiffre d'affaires contre 5 milliards un an auparavant, selon la Fédération de l'e-commerce et de la vente à distance (Fevad). Exemple avec Groupon qui connaît une croissance folle (lire l'encadré en p.36) ou avec Price Minister, racheté il y a quelques mois par le japonais Rakuten, engagé dans un plan de conquête européen sur trois ans. L'objectif: passer de 200 à 350 salariés en 2014. Rien que cette année, 60 personnes dont une dizaine d'embauches dans le commercial, quelques-unes dans le marketing. Dans l'e-commerce, on ne parle plus de dégel mais de risques de surchauffe…

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