Les porte-cartes virtuels séduisent de plus en plus consommateurs et entreprises. Les bonnes vieilles cartes de fidélité sont-elles promises à l'obsolescence ?

Chaque mois, quelque 100 000 nouveaux utilisateurs viennent grossir les rangs des Français utilisant un porte-carte virtuel tel que Fidall ou Fidme, des services de dématérialisation de cartes de fidélité lancés en France en 2010. Une fonctionnalité qu'Apple a directement intégrée à son IOS 6, avec l'application Passbook, qui centralise cartes de fidélité, coupons, billets d'avion et de cinéma. «Ce qui était une innovation il y a deux ans est devenu un usage courant», pointe Laurent Bourgitteau-Guiard, fondateur de Snapp, l'entreprise qui a développé Fidme.

Gérant plus de 37 000 cartes et programmes de fidélité dans 80 pays, ce service laissait de marbre les enseignes les plus frileuses il y a encore quelques mois. Mais le nombre d'utilisateurs de ces systèmes ne cessant de croître, les marques ont dû se mettre à la page. Alors qu'en 2012, seuls 15% des possesseurs de smartphone utilisaient un portefeuille dématérialisé, ils sont aujourd'hui 27%, selon une étude menée par l'institut Init en 2013.

Affichant respectivement 2 millions et 1,5 million d'utilisateurs, l'idée des leaders de la dématérialisation Fidme et Fidall a séduit les Français. Et d'autres acteurs du marketing relationnel. C'est le cas de Catalina Marketing, dont les 50 000 petites imprimantes déversent chaque jour leur lot de coupons en caisse. L'entreprise vient de lancer C-Wallet, son application mobile de dématérialisation de coupons. Fini les mailings à conserver, les offres cartonnées à découper et les e-mails à imprimer, il suffit de choisir sa réduction et de fermer l'application.

Pour Monoprix, dont Catalina gère la base de données clients, le consommateur n'a qu'à présenter sa carte de fidélité en caisse. Pour les autres enseignes, une preuve d'achat à scanner avec l'application suffit à voir son compte C-Wallet crédité du montant des réductions sélectionnées. Une dématérialisation du coupon de réduction qui intéresse 86% des consommateurs, selon une étude réalisée par Ipsos pour le groupe Highco.

Que ce soit Fidall, Fidme, Passbook ou C-Wallet, tous ces portefeuilles dématérialisés sont bien plus que des vide-poches virtuels. L'utilisation du mobile permet en effet d'aller bien plus loin que n'importe quel programme de fidélité physique. Avec la fonction «geofencing», un mobinaute peut recevoir une promotion sur son smartphone quand il arrive à proximité d'une boutique dont il est client.

 

Limites de la dématérialisation

Une technologie encore peu utilisée aujourd'hui mais qui s'inscrit dans l'évolution d'un commerce toujours plus connecté et qui permet de «récompenser les clients là où ils sont, en mobilité. C'est la base du Solomo [social, local, mobile] et ça ouvre de nouvelles perspectives», indique Benjamin Le Clercq, directeur du planning stratégique d'Uniteam.
Le système n'est accessible qu'aux grandes enseignes. Fidme propose aux commerces de proximité d'utiliser un QR code à la place de leur carte à tampons. Le client scanne le QR code de l'enseigne et sa carte dématérialisée est automatiquement créditée du tampon correspondant. Mais Fidall, «solution de CRM [customer relationship management]mobile», comme la définit son fondateur Yann Casanova, permet aussi aux mobinautes de souscrire à des programmes de fidélité dont ils ne seraient pas encore membres.

Si les possibilités semblent infinies, notamment avec la fonction de paiement qui a toutes les chances de se développer, «l'avenir ne se trouve pas dans la dématérialisation totale, prévient Thierry Spencer, fondateur de Testntrust.fr, comparateur de satisfaction clients. Il y a une dimension sociale au fait de posséder une carte, même si cet aspect statutaire peut s'effacer s'il y a des avantages significatifs».

Pour Xavier Durcutil, directeur associé chez Vertone, cabinet de conseil en stratégie, «une trop forte dématérialisation tue la relation, car si on n'a plus aucun signe de la marque physique, on y pense moins».

La carte physique, qui équipe 96% des Français, aurait donc encore un bel avenir devant elle... à condition d'être couplée à un programme dématérialisé qui «soit le prolongement de la relation client, avec un environnement et un design que l'on trouve en points de vente», conclut Jérémie Leroyer, fondateur de la société spécialisée en solutions de «mobile shopping» Airtag.

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