La réputation et l'influence des entreprises se jouent désormais sur les médias numériques, qui ont accéléré le temps et démultiplié les points de contacts avec les publics.

«Il y a dix ans, le PDG d'une entreprise était légitime par sa compétence, son expérience et son savoir. Aujourd'hui, il ne maîtrise plus que 15% de l'information, tout le reste est connu par des centaines d'autres personnes.» Le constat d'Emmanuel Bachellerie, directeur corporate chez Thomas Marko et Associés, est sans appel. Le temps est loin où piloter sa communication en direction de quelques médias suffisait pour faire passer les messages sur l'image ou la réputation de son entreprise ou son institution. Le digital est passé par là.

A la fois outil et mode de consommation de l'information, le Web et les réseaux sociaux ont engendré chez les parties prenantes (salariés, journalistes, élus, communauté financière... et consommateurs) un besoin de transparence de la part des entreprises et des institutions. Or, celles-ci ne peuvent pas tout dire pour des raisons de propriété intellectuelle et d'intelligence économique. «C'est le travail du directeur de la communication de devenir expert en résolution d'injonctions paradoxales, et d'apporter la réponse adéquate aux cibles qui en ont réellement besoin», rappelle Thomas Barbelet, directeur marketing et communication de Vinci Concessions.

«Cette logique communautaire propre au Web, il faut la faire comprendre aux entreprises. On ne s'adresse pas au grand public dans son ensemble, mais à des populations circonscrites», corrobore Bruno Scaramuzzino, président cofondateur de Meanings. «Avec les réseaux numériques, nous avons une vraie difficulté à percevoir l'importance de l'émetteur, ajoute Benoît Cornu, directeur de la communication de PMU. Un "twitto" peut relayer une information corporate, sans que l'on sache qui il est ni quel est son impact.»

Pas simple à gérer. En effet, si 96% des décideurs pensent que la gestion de l'e-réputation est un enjeu crucial pour l'entreprise, les deux tiers admettent que leur entreprise ne serait pas en mesure de gérer une crise dans ce domaine (étude Idaos, novembre 2012). «Avec le digital, l'entreprise doit accepter la pluralité des collaborations dans la constitution de son image, analyse Laurent Habib, président de l'agence Babel. Un hôtel qui ouvrirait aujourd'hui sans tenir compte du site Trip Advisor et des avis de consommateurs n'a aucune chance de s'en sortir.»
«Nous savons parler aux journalistes. Mais pour informer d'autres interlocuteurs, blogueurs ou e-influenceurs, nous avons eu besoin d'une expertise externe», confie Catherine Rose, directrice des relations médias corporate chez L'Oréal, qui a confié à Net Intelligenz, le pôle digital de Publicis Consultants, la création d'une plateforme de veille en ligne.

 

Réseaux sociaux d'entreprise, une vraie tendance

Du côté de la communication interne, le bouleversement est notoire. «Le digital change beaucoup de choses pour les directeurs de la communication, c'est assez violent. Les médias sociaux sonnent la fin de la communication d'autorité "top-down", du sommet de la hiérarchie vers le reste des salariés», estime Dimitri Granger, directeur de Net Intelligenz. Aussi les grandes sociétés multiplient-elles les réseaux sociaux d'entreprise pour canaliser le discours interne et motiver les collaborateurs en les invitant à s'exprimer. «Ils aident à devenir plus intime avec son employeur, à donner son avis sur les changements en cours, même si on est contre. C'est une position dynamique de la part de l'entreprise», souligne Renaud Gassin, directeur de New BBDO.

Le digital est un moyen de «pousser» des contenus maison vers les blogs, Twitter ou Facebook, comme le fait le groupe Bouygues, qui emploie 134 000 personnes dans le monde. «Impossible d'envisager une communication interne qui ne passe pas par le digital», résume Pierre Auberger, directeur de la communication. «Le Web est un lieu d'échanges. L'Intranet ou les réseaux sociaux internes constituent une vraie tendance et une véritable innovation», entérine Élisabeth Coutureau, vice-présidente exécutive de TBWA Corporate.

La communication financière n'échappe pas, non plus, à la digitalisation: 80% des rapports annuels sont aujourd'hui consultables sur un site Web ou via une application. Il en allait de leur survie.

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