communication interne
Le silence n'inspire pas confiance. Les entreprises qui l'ont compris construisent désormais la prise de parole de leurs dirigeants en misant sur l'interactivité directe ou numérique.

Si les entreprises sans PDG sont rares, celles dirigées par un mutique ne manquent pas. Une étude menée fin 2012 par Meanings et Harris Interactive révèle que 29% des salariés n'ont jamais entendu la voix de leur plus haut dirigeant. Ce constat est d'autant plus partagé parmi les jeunes, les nouveaux venus dans la société, les employés et les ouvriers. Globalement, 42% seulement des salariés ont déjà entendu la voix de leur patron. Problème: ce silence mine la confiance des salariés. L'étude établit en effet une corrélation sans équivoque entre prise de parole et confiance. Si le PDG ne vient jamais leur parler, seulement 30% des salariés lui accordent leur confiance, un taux qui grimpe à 70% lorsqu'il s'exprime «souvent».

Les entreprises ayant traversé des crises l'ont bien compris. Avant même de succéder début 2011 à Didier Lombard à la tête de France Télécom après sa vague de suicides, Stéphane Richard a multiplié les déplacements et les rencontres avec les salariés pendant un an. «Le dirigeant d'un grand groupe doit intervenir quand l'ampleur et la dimension stratégique de l'événement l'exige, même s'il ne concerne pas directement tous les salariés, mais aussi dans les contextes particuliers, que leur nature soit politique ou commerciale, lorsqu'ils impactent l'entreprise et son avenir», explique Béatrice Mandine, directrice de la communication du groupe.

Un impératif logique et instructif

Si les grandes lignes ne varient guère, les conditions pratiques limitent inévitablement les échanges, en particulier dans les grandes entreprises. À la SNCF, le comité exécutif a donc été mobilisé aux côtés de Guillaume Pepy pour rencontrer quelque 90 000 salariés pendant neuf mois: «Le point clé, c'est l'oralité et le contact, estime Patrick Ropert, directeur de la communication du transporteur ferroviaire. L'échange permet de faire entendre les dirigeants, mais aussi de clarifier la communication et de laisser les salariés se parler entre eux.»

Les écouter revêt aussi une importance croissante, souligne Bruno Bruno Scaramuzzino, directeur associé de l'agence Meanings, partisan des échanges informels: «Au-delà des rencontres ritualisées, des rendez-vous emblématiques, des repères qu'il convient de réinstitutionnaliser, les dirigeants doivent aller à la rencontre des salariés, à la cantine, dans les ateliers. Ils doivent avoir des échanges informels avec eux. C'est là qu'ils peuvent démontrer leur capacité à écouter, là que se construit la confiance.» Un impératif logique, riche d'instruction pour les dirigeants, mais qui vient buter sur l'impossibilité d'organiser ce type de rencontres à grande échelle.

Pour dépasser cette limite, Internet et autres intranet offrent de nouvelles possibilités d'échanges. C'est la solution mise en place par la Société générale ou la SNCF. Les dirigeants du groupe bancaire ont ainsi pu recueillir nombre d'appréciations sur la stratégie suivie. De son côté, la SNCF utilise les nouvelles technologies pour améliorer l'interactivité de ses séminaires. Via des tablettes, les managers peuvent poser des questions au président, Guillaume Pepy, et voter pour les questions qui leur semblent les plus pertinentes. Celles qui recueillent le plus de suffrages sont les premières à être évoquées. «Ce système permet d'assurer une bonne interactivité et de soumettre la parole du président à une boucle de retour, explique Patrick Ropert. Si une réponse ne satisfait pas les participants, ils peuvent demander de nouveaux éclaircissements.»

 

Encadré

De la nature des entreprises sur leur prise de parole
«Toutes les entreprises n'ont pas la même approche de la prise de parole, souligne Jeanne Bordeau, fondatrice et directrice de l'Institut de la qualité de l'expression. Les plus engagées dans la performance responsable, ou dont l'activité implique un fort engagement vis-à-vis du public, prennent plus souvent la parole. La Maif et Leroy Merlin méritent ainsi d'être montrés en exemple car leurs dirigeants parlent souvent de leurs salariés. Les entreprises B to B, avec une forte technicité, éprouvent moins ce besoin, qui est encore plus ténu dans l'agroalimentaire ou le CAC 40.»

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