Dossier
Confrontés pour la plupart à des baisses de revenus, les groupes médias se concentrent sur leurs marques phares pour sauver leur marges.

Après des années de consolidation, le temps n'est plus à la course à la taille pour les groupes médias. «Avant, les opérateurs voulaient que leur chiffre d'affaires progresse, explique Jean-Clément Texier, président de la Compagnie financière de communication. Aujourd'hui, ils n'hésitent pas à sacrifier du chiffre d'affaires s'ils sentent qu'une activité va générer des pertes prévisibles.» Témoin, la décision récente du groupe Lagardère de mettre en vente une dizaine de magazines pour se recentrer sur ses marques médias à fort potentiel numérique, suffisamment rentables et capables de résister au déclin du papier.

Une initiative qui intervient après le désengagement du groupe de la radio en Russie et de sa presse magazine internationale en 2012. Résultat: Lagardère Active, passe dans notre classement de la 6e à la 8e place. 386 millions d'euros sont sortis du périmètre du groupe, ce qui se traduit par une chute de près de 30% du chiffre d'affaires (-3,4% à périmètre comparable) pour un résultat opérationnel de 64 millions d'euros, contre 95 millions d'euros en 2011 (46 millions pro forma).

Avec la vente de ses 25% dans les éditions Philippe Amaury et de ses 20% dans Canal+ France, Arnaud Lagardère – désormais sorti d'EADS – s'est employé à valoriser au mieux ses participations minoritaires. «Sur dix ans, c'est un sans-faute sur la politique de cessions, poursuit Jean-Clément Texier. En revanche, il n'y a pas de clarté absolue sur ce qu'il va faire de ce cash.» Ira-t-il développer son groupe dans les médias numériques, dans la production ou en profitera-t-il pour renforcer sa branche de sport?

Le fait est que les groupes médias ont tendance à se diversifier pour résister à l'érosion des revenus liés à leur activité traditionnelle. Que ce soit dans la distribution, comme Spir Communication avec Adrexo, le sport et l'entertainment tels Amaury et Lagardère, l'e-paiement, avec la régie Hi-Media, ou encore la vente de billets de spectacles et les annonces classées sur Internet, à l'instar du Groupe Figaro.

Double effet

Les chutes (ou les stagnations) de chiffre d'affaires s'observent un peu partout. Mais les groupes de presse sont ceux qui subissent le plus fort impact en raison d'un double effet: le recul des ventes et la baisse de la publicité. Longtemps épargnés, les empires de presse magazine (Hachette Filipacchi, Prisma Média, Mondadori) ressortent à la baisse, tout comme les groupes de presse quotidienne (Le Figaro, Le Monde, Le Progrès, 20 Minutes, etc.) ou le géant de la presse professionnelle Wolters Kluwer. Les groupes médias qui s'en sortent le mieux sont ceux qui sont présents dans l'audiovisuel et la TNT (Canal+, NRJ Group, Next Radio TV, RMC) ou la communication extérieure (JCDecaux, Clear Channel).

S'agissant d'Internet, outre la progression de Google France (dont la réalité des revenus est supérieure à 1 milliard d'euros), on notera la santé éclatante d'un autre acteur, Au Féminin, qui tire les fruits de son activité publicitaire et de son logiciel Smart Adserver. A l'inverse, Hi-Media a été particulièrement touché dans son activité publicitaire en raison de sa dépendance aux marchés d'Europe du Sud, où il réalise 30% de son activité.

Faut-il s'attendre à une nouvelle vague de concentration dans les médias? «Si on veut que la filière de l'écrit conserve des acteurs capables de survivre, il faudra autoriser bien plus de rapprochements», estime Jean-Clément Texier. En attendant, la dévalorisation des actifs de presse est telle que Nice matin et La Provence, vendus ensemble 160 millions d'euros en 2007 par Lagardère, ne valent plus que 50 millions six ans plus tard. L'expert craint aussi que le joint-venture, signé en novembre entre la SNCF et Relay, incite les points de vente des lieux de transport à moins bien exposer la presse au profit d'autres activités ou produits culturels.

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