Les particuliers semblent encore plus généreux grâce au web. Applis mobiles, systèmes de microdon, crowdfunding, collectes peer-to-peer… le numérique révolutionne les «bonnes œuvres».

Qui a dit que les Français donnaient moins? Les dons aux associations et fondations françaises ont augmenté de 4 % en 2013 selon le Baromètre de France générosités, qui regroupe 81 associations et fondations. Mieux, le don moyen en ligne a progressé de 7,5% pour atteindre 95 euros, contre 59,70 euros par le bon vieux don par chèque. Certes, les dons en ligne ne représentent que 5% des dons reçus. Mais, par la grâce d’Internet et des innovations technologiques, de nouvelles formes de générosité apparaissent. «Les gens donnent mais sans s’en rendre compte», résume Alexis Botaya, cofondateur de l’agence-conseil en innovation Soon Soon Soon, qui a détecté cette tendance pour Stratégies.

Cela a notamment redonné un coup de jeune au microdon. L'idée: le donateur arrondit son panier d’achat à la somme supérieure, pour arriver à un compte rond, le «surplus» étant reversé à une association ou une ONG. La start-up Microdon.org propose ainsi depuis 2009 des outils de microcollecte de fonds. «C’est une relation différente à la générosité, puisqu’elle est ancrée dans le quotidien des gens, à la différence du don en liquide ou par carte bancaire. En un clic, on peut attribuer une partie de son montant total de courses à une "charity"», poursuit Alexis Botaya.

Fidélisation

Ce concept solidaire se prolonge sur internet, avec par exemple Ze Give, qui a lancé début 2013 un système de dons en ligne accolé à des sites d'e-commerce partenaires, un peu à la manière du bouton «like» de Facebook. «L'ONG qui a reçu un don nous rétribue à la transaction, à hauteur de 5% sur un microdon (jusqu'à 50 centimes). Sur les dons importants, on prend un forfait plafonné à 2,99 euros», explique Pierre Janicot, son cofondateur.

Mais son succès reste timide. «Le microdon doit être un moyen de fidéliser le donateur à long terme. Mais pour avoir un effet de masse, il faut des partenariats importants, avec grosses plateformes de e-commerce», nuance ainsi Mélanie Cagniart, directrice de la collecte de fonds privés chez Médecins sans frontières.
Autre initiative, celle de la start-up Goodeed.me: adossée au Programme alimentaire mondial et à l’Unicef, elle permet à l’internaute de «donner» sans contribution financière, juste en visionnant un spot publicitaire en ligne.

Financement direct

Le crowdfunding a lui aussi impulsé de nouvelles formes de générosité virtuelles. Par exemple, «pour financer les besoins des personnes les plus démunies, comme un soin dentaire», explique Alexis Botaya. A San Francisco, la plateforme Hand Up, gérée par une association, permet de financer les besoins directs de personnes, l’association s’assurant que ces fonds sont alloués aux besoins les plus vitaux. Le site propose un profil pour chaque sans-abri, avec une photo perso, un récit de vie et le descriptif de son projet à financer.
En France, la start-up Hello Asso, qui a levé un million d’euros mi-2013, a monté une plateforme de crowdfunding dédiée au secteur associatif. Elle se rémunère au pourboire, fixé librement par l’internaute-donateur.

«C’est une vraie révolution dans la façon de donner. Mais le crowdfunding est complexe: on y mélange don, prêt et investissement. Il y a eu des opérations emblématiques, pour des reprises d’entreprise en difficulté, et surtout en mécénat culturel, comme Le Louvre, fin 2010, pour acquérir Les Trois Grâces de Cranach», souligne Eric Dutertre, président de l’agence Excel (TBWA France), spécialisée dans le fundraising.

Complémentarité

Prometteuses aussi, les collectes «peer-to-peer» initiées en ligne par des individus, dans le sillage de la culture «peer-to-peer» où des internautes s’échangeaient sur une même plateforme des fichiers de musique ou de films. «Chacun peut décider de lancer une collecte au profit d’une cause ou une association, et mobiliser ses contacts par mail ou Facebook. Avec le digital, le donateur devient aussi un relais. Du coup, les associations arrivent à monter des campagnes virales», estime Ismaël Le Mouël, fondateur de Hello Asso. Même la très classique fondation 30 Millions d’amis, accompagnée par l’agence Optimus, a lancé fin 2014 une plateforme dédiée pour créer des pages de collecte.
En fait, ces nouveaux canaux digitaux de dons sont de formidables outils marketing. «Il y a eu par le passé un côté boîte magique, l'idée que tout le monde allait devenir donateur en un clic et que cela coûterait moins cher aux ONG de collecter via le Net: on en est revenus. C’est bien un outil complémentaire à la panoplie du fundraiser, qui doit s’inscrire dans une campagne globale. Mais derrière, on a des outils pointus de mobilisation et de reporting», souligne Frédéric Fournier, directeur associé d’Optimus.

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