Profession
Trois grandes associations représentaient les agences événementielles. Elles ont officialisé début juillet leur intention de s’unir au sein d’une seule instance représentative: Levenement. Un mariage de raison, mais pas seulement…

À dire vrai, on n’osait plus vraiment y croire, encore moins en rêver. Et pourtant, les trois associations représentatives des agences d’événement l’ont fait ! Au 1er janvier 2016, l’Anaé (60 membres), l’AACC Événement (10 membres) et le Raffut (13 membres) auront disparu au profit d’une seule entité : Levenement. Elle regroupera 75 agences environ –certaines étant membres de plusieurs associations– réparties en trois collèges pour représenter toutes les facettes du métier : Corporate, Grand Public et Mice (meetings, incentives, conferencing and exhibitions).

La nouvelle structure sera membre des deux institutions de référence : l’AACC et l’Unimev (Union française des métiers de l’événement). Elle assumera la bipolarité de son activité, avec d’un côté la production et la logistique et de l’autre le conseil et la création. «Nos agences n’ont pas toutes le même profil, elles ne font pas toutes exactement le même métier mais elles s’appuient sur un socle commun d’expertises et de compétences. Elles ont aussi des problématiques communes sur les questions sociales, la fiscalité, la formation, la reconnaissance et la représentativité du métier», rappelle Bertrand Biard, président de l’Anaé et de l’agence Manifestory. Logiquement, les gros chantiers de la future association seront en grande partie ceux des entités qui l’ont fondée: les compétitions, la rémunération des agences, la valorisation de l’activité, la défense de la créativité, le statut des intermittents, l’harmonisation de la TVA, les autorisations légales d’exercer…

Sur le fond, le rapprochement met un terme à dix ans de séparation entre les agences de l’Anaé, association historique de la profession, et celles de l’AACC Event créée en 2005 par une poignée d’agences, en majorité des filiales de grands groupes de communication : Publicis, TBWA, Havas, DDB, Young & Rubicam… La dissidence se justifiait à l’époque par l’intégration cinq ans plus tôt par l’Anaé des agences de tourisme d’affaires qu’elles considéraient plus proches du tourisme que de la communication événementielle. Défendable dans un premier temps, la posture n’était en revanche plus tenable depuis quelques années, certaines agences de l’AACC Event disposant elles-mêmes d’activités ou de filiales spécialisées en tourisme d’affaires.

Redéfinir les statuts

«La situation était devenue ridicule, à l’image des vieilles guerres entre deux villages dont plus personne ne sait vraiment pourquoi l’un est opposé à l’autre», explique Thierry Reboul, patron d’Ubi Bene. Fondateur du Club des créateurs d’événements grand public, alias Le Raffut en 2011, il est l’un des principaux initiateurs du rapprochement entre les trois associations. Mais c’est aussi l’opiniâtreté de Bertrand Biard et l’ouverture de Julien Carette, président d’Havas Event élu nouveau président de l’AACC Event, qui auront permis au projet d’aboutir.

Avaient-ils le choix? À l’heure où les marges se réduisent dans la communication, l’expérience de marque est devenue un «must have» de toute stratégie marketing: l’événement, créateur par définition d’expérience, suscite les convoitises des agences de publicité mais aussi des agences médias ou digitales qui l’utilisent pour créer du buzz sur internet ou redonner une dimension humaine aux pure players du web. D’où une entrée massive de challengers sur leur marché historique. «Nous avons un gros travail de pédagogie devant nous pour faire savoir à l’extérieur qui nous sommes et ce que nous faisons, rappelle Julien Carette. C’est important pour notre business.»

Reste maintenant à définir les statuts de la future association. «La plupart des freins ont été levés, même si des points restent à traiter, précise Julien Carette. Nous devons par exemple travailler à l’évolution des statuts de l’AACC pour permettre à Levenement d’en être adhérent. Actuellement, seule une entreprise peut adhérer à l’AACC.» Une équipe de douze personnes –quatre représentants par association– menera à bien la transformation et assurera une gouvernance provisoire jusqu’au lancement de l’association en janvier 2016. À l’heure où nous bouclons, nous n’en saurons donc pas beaucoup plus. Mais les discussions sérieuses ne font que commencer. «Chaque association s’est structurée autour de savoir-faire, explique Jacques-Olivier Broner, président du Raffut. En cinq ans, nous avons réussi à faire beaucoup de bruit autour de notre métier, mais nous avons négligé tout le reste: le social, la représentation auprès des pouvoirs public, les relations avec les annonceurs…»

Fédérer les clans

Au-delà des statuts de l’association, le gros challenge de Levenement devrait porter sur la définition d’un mode de gouvernance et l’élection d’un président capable de fédérer les trois clans. Car comme le rappelle Vincent Leclabart, président de l’AACC, «les agences vont devoir parler d’une seule voix» pour être audibles et pertinentes (lire entretien). Les candidats ne manqueront certainement pas. La difficulté sera toutefois d’identifier le mouton à cinq pattes alliant charisme, légitimité, représentativité, disponibilité et maîtrisant suffisamment tous les sujets transversaux… pas simple.

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