Evénement
En se portant candidate à l’organisation des Jeux olympiques de 2024, Paris, et par extension la France, confirme son ambition de (re)devenir «the place to be» du sport mondial. Explications.

C’est officiel depuis le 23 juin, Paris est candidate à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024. KO debout depuis son éviction en 2005 face à Londres pour les JO de 2012, la capitale semble avoir enfin digéré ses échecs, si on y ajoute celui de Paris 2008. En a-t-elle tiré toutes les leçons ? Pour Étienne Thobois, directeur général d’Ambition olympique, la structure qui porte la candidature de Paris pour les deux ans à venir jusqu’à la désignation de la ville hôte en 2017, c’est une évidence. Paris a fait l’inventaire de ses erreurs passées, notamment de la prédominance des politiques dans la défense du dossier au détriment des sportifs.

«Cette fois, les athlètes auront le leadership en s’appuyant sur de grands noms. Au-delà de Jean-Claude Killy, nous disposons aujourd’hui d’un grand nombre de personnalités influentes dans toutes les instances sportives internationales.» À commencer par Bernard Lapasset, président de l’International Rugby Board et d’Ambition olympique, ou encore de Tony Estanguet, triple médaillé olympique, aujourd’hui membre du Comité international olympique (CIO).

Méthodes guerrières

Paris et la France auraient donc de vraies bonnes raisons d’y croire. Et pas seulement parce que les jeux de 2024 se dérouleront cent ans après les derniers jeux organisés à Paris! Dans son autocritique, Paris n’a pas oublié que l’un des principaux reproches faits aux comités français de candidature pour les JO est la faiblesse de la communication et du lobbying auprès des 120 membres votants du CIO. Pour 2024, Ambition olympique s’est offert les services d’experts reconnus. Il y a d’abord Étienne Thobois, qui avant de prendre la direction générale de l’association était cofondateur et dirigeant de Keneo, société de conseil en candidature et en organisation d’événements sportifs (Tokyo 2020, Roland-Garros, Euro UEFA 2016…). Mais il y a aussi, et surtout, Mike Lee et son cabinet Vero Consulting. Pour la faire simple, cet ancien attaché de presse de Tony Blair reconverti dans le lobbying international sportif n’est autre que celui qui a fait gagner Londres aux dépens de… Paris pour les JO de 2012! Connu pour ses méthodes guerrières, il est aussi derrière le succès des candidatures de Rio 2016. Le signal est donc assez fort. Proche de Bernard Lapasset, qui s’est appuyé sur lui pour faire entrer le rugby à sept aux JO, il devrait jouer un rôle central dans le montage du dossier.

Convaincre en pro

Pour Étienne Thobois, la réussite de la candidature repose sur la combinaison de trois facteurs: «Un professionnalisme poussé à l’extrême, à la hauteur des enjeux et d’une compétition de très haut niveau; la capacité d’écoute et d’analyse de l’ensemble des parties prenantes (élus, athlètes, grand public…) pour faire un projet en phase avec son temps; et enfin la capacité à donner envie…» Sur ces derniers points, la partie devrait se jouer sur le terrain de la communication. Pour donner envie, les porteurs du projet vont devoir convaincre. Et pour convaincre, il va d’abord falloir cerner les différents courants d’opinion à l’œuvre dans la société. À commencer par les contestataires, de type altermondialistes et autres adeptes de la décroissance. «Pour embarquer la population dans l’aventure, il va falloir un discours rodé, au-delà du patriotisme et de l’intérêt économique, capable de contrer celui des sceptiques, très structuré intellectuellement, estime Julien Landfried, associé du pôle influence de Publicis Consultants. Il faudra aussi multiplier les actions de proximité, les campagnes de porte-à-porte. Elles font émerger les sujets sensibles, et un même message a plus d’impact quand il est transmis en face à face que via une vidéo. » Une remarque qui vaut aussi bien pour les JO que pour n’importe quel autre événement, qu’il soit sportif ou culturel.

Rupture de ton et de style

S’il est encore un peu tôt, à l’heure où nous bouclons, pour jauger l’importance qu’accordera Ambition olympique à la communication, l’annonce officielle de la candidature effectuée le 23 juin a clairement montré une rupture de ton et de style. Si la conférence «physique» orchestrée par Double 2 et Ubi Bene au CNOSF n’avait en soi rien de très spectaculaire, son amplification sur les réseaux sociaux est devenue un cas d’école: en s’appuyant sur les comptes de 150 athlètes français pour relayer l’annonce de la candidature, le hashtag #Paris2024 a généré 150 millions d’impressions en 24 heures sur 54 millions de comptes Twitter, faisant du sujet le premier trending topic en France pendant toute la journée et le quatrième dans le monde!

«Il est important d’intégrer des professionnels capables de donner à la candidature une résonance mondiale, estime Lionel Malard, consultant spécialisé dans l’accompagnement des acteurs de l’événementiel. S’il est indispensable de s’appuyer sur des spécialistes de type Vero Consulting, intégrer la communication, et plus particulièrement dans son approche événementielle, l’est tout autant pour mettre en forme le dossier et mettre en scène le discours pour toucher les ayants droit.» Il n’y a donc plus qu’à… serait-on tenté de dire. Mais pour l’emporter, Paris va devoir transformer les paroles et les intentions en gestes concrets. Elle va devoir prouver que l’ambition déclarée n’est pas qu’un coup de com, même si cette dernière lui est indispensable.

Suivez dans Mon Stratégies les thématiques associées.

Vous pouvez sélectionner un tag en cliquant sur le drapeau.